A travers toute la France, l’écart de prix pour une même machine peut aller du simple au double … Il existe de nombreux facteurs à prendre en compte pour expliquer ce phénomène. Nous nous sommes demandé quel pourrait être l’impact des subventions agricoles sur ces variations de prix. La rédaction d’Entraid a donc analysé les montants et les subventions obtenues pour le financement de 1347 machines achetées en cuma.
D’où viennent ces données ?
La rédaction et le service AgroDev de la fncuma ont examiné les coûts d’achat de matériels agricoles acquis par les cuma en France entre 2020 et 2022, grâce aux données comptables. Ces chiffres ont été régionalisés et comparés aux moyennes nationales d’achat en cuma. L’équipe a choisi d’écarter 2023 (inflation) et les régions dans lesquelles les données n’étaient pas assez nombreuses. L’équipe d’AgroDev a aussi retiré les chiffres « hors-norme ». Egalement les matériels dotés de technologies spécifiques, pour resserrer les échantillons autour des catégories les plus homogènes possibles.
Toutefois, les données comptables ne permettent pas encore de déterminer l’ensemble des options des matériels. Il faut donc prendre les résultats avec le recul nécessaire. Autre écueil : la taille des régions. Elle permet d’obtenir assez de données pour l’analyse, mais recouvre des réalités agricoles très variables.
Subventions : zoom sur les bineuses et herses-étrilles
Au-delà des effets d’opportunité que peuvent déclencher les subventions ponctuelles comme le Plan de Relance, difficilement analysable aujourd’hui, la rédaction d’Entraid s’est penchée sur le soutien à plus long terme. Notamment celui que constitue les Fonds européens Feader / Région.
Dans un premier temps, la rédaction s’est penchée sur les subventions et les prix d’achat en cuma de deux matériels de désherbage mécanique fréquemment acquis entre 2020 et 2022 : les bineuses 6 rangs (sans caméra) et les herses-étrilles. Le choix s’est opéré sur ces matériels car ils sont souvent liés aux politiques de réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires. Et à ce titre, subventionnés dans une majorité de régions françaises.
Les années 2020 à 2022 correspondent à une période récente, où les programmes de subventions du plan d’aides 2015-2022 sont achevés avec des données comptables consolidées dans les cuma.
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Fortes disparités de tarifs
Le premier résultat, frappant, est l’écart des coûts d’achat d’une région à l’autre. Pour les bineuses 6 rangs, cet écart va quasiment du simple au double entre les régions Bourgogne-Franche-Comté et les Hauts-de-France. Le tout, sans rapport évident avec le système de soutien, qui va de 40 % à 60 % respectivement dans ces régions. Afin d’illustrer ces disparités, la rédaction a conçu des cartes que voici :
Un écart de tarifs important
Du côté des herses-étrilles, l’écart des tarifs d’achat semble aussi très important, de l’ordre de 45 % entre les Pays de la Loire et la Bourgogne-Franche-Comté. Et là encore, pas de lien évident entre les taux de soutien régional et les tarifs sur les années considérées.
La réponse à la question initiale ?
A cette échelle régionale, et sur les années 2021 et 2022, il ne semble pas y avoir de rapport direct entre le subventionnement et le tarif d’achat des matériels. Même si sur le terrain on subodore de la part des vendeurs, une politique de prix haussiers, en présence d’acheteurs subventionnés. Ponctuellement, on peut constater, dans un secteur où l’investissement sur un type de matériel est fortement soutenu par subvention, que les prix d’achat moyens en cuma sont plus élevés que la moyenne nationale. Mais la relation ne se vérifie pas forcément pour un autre matériel sur un usage voisin.
Ainsi, les tarifs des herses-étrilles achetées par les cuma en Nouvelle-Aquitaine en 2021 et 2022 étaient supérieurs de 13,71 % à la moyenne nationale. On pourrait supposer un lien. Mais, sur les bineuses 6 rangs, également soutenues par des subventions de même niveau, le tarif d’achat en cuma était inférieur de quasiment 9 % au tarif national. Les raisons de ces disparités entre régions semblent donc être situées ailleurs.
Des prix indexés sur les revenus agricoles ?
La rédaction a choisi de travailler sur une autre hypothèse. Celle du lien entre niveau de revenus des agriculteurs et tarifs des matériels. Autrement dit, tester la formule : plus les agriculteurs s’inscrivent dans des territoires et des filières rémunérateurs, plus les prix appliqués par le couple constructeur/concessionnaire est élevé. Pour vérifier cette hypothèse, nous nous sommes appuyés sur les données comptables fournies par les cuma. L’équipe a confronté les cartes basées sur les données fournies par les comptabilités des cuma. Et ainsi comparer les cartes des coûts moyens de matériels par région, à celles des revenus des agriculteurs.
Quid des autres matériels agricoles?
Au-delà des matériels de désherbage mécanique, les données analysées ont été étendues aux rouleaux de travail du sol (6 m). Mais aussi aux télescopiques et aux tracteurs dans une gamme de puissance allant de 150 à 180 ch.
Là encore, le lien de cause à effet entre le niveau de revenu mensuel moyen des agriculteurs, sur un secteur considéré, et les tarifs de ces matériels achetés en cuma, n’a rien d’évident à cette échelle régionale.
La corrélation entre des niveaux de revenus plus élevés, dans un grand quart Nord-Est, et des prix d’achat systématiquement plus élevés dans ces zones, ne se vérifie pas de manière systématique. La carte ci-dessous en témoigne. Elle détaille le revenu mensuel moyen des exploitants agricoles, par territoire :
Quel est le verdict?
Ce travail sur les chiffres d’achat de ces matériels en cuma ne permet pas de tirer de conclusion nette. Ni à une corrélation avec les subventions régionales, ni avec les niveaux moyens de revenus des agriculteurs. Au-delà de la technique, qui n’explique pas cependant les écarts considérables constatés, c’est donc davantage sur le couple constructeur/concessionnaire que l’on peut s’interroger.
Avec des variables propres au marché local à analyser à des échelles plus fines que la région. Mais aussi du côté des volumétries des ventes et des rapports de concurrence entre marques et concessionnaires.
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