Parce que le prix des engrais azotés restera élevé, parce que les effluents d’élevage fournissent de la matière organique favorable au bon fonctionnement des sols, il y a tout intérêt à apporter des fertilisants organiques sur céréales. Mais épandre du lisier en sortie d’hiver demande de lever un certain nombre de freins : le respect des sols, l’organisation des chantiers… Focus sur 4 pistes d’amélioration de l’épandage de lisier en sortie d’hiver.
1 / Réduire les pertes par volatilisation ammoniacale
Pour qu’un épandage soit pleinement rentable, il faut que toutes les unités apportées servent aux cultures. Ce qui demande de réduire les pertes par volatilisation ammoniacale. Les pendillards les réduisent de 71 %, les enfouisseurs de 90 %. « Il y a un réel intérêt à s’équiper pour bien valoriser tout l’azote du lisier, assure Gurvan Le Boulc’h, de la fédération bretonne des cuma. Si on calcule le coût d’épandage pour un même total d’unités d’azote données à la culture, un pendillard reviendra au même prix qu’un épandeur avec des buses. Certes, ce dernier coûte moins cher en investissement, mais c’est un matériel qui imposera un apport d’azote minéral pour compenser les pertes par volatilisation. »
Pour optimiser les débits de chantiers, il faudrait des tonnes de plus en plus grandes, mais cela va à l’encontre du respect des sols, à une période où la portance des sols n’est pas optimale. De plus, l’efficacité des chantiers d’épandage est plombée par les allers-retours entre la fosse et les parcelles. Une tonne à lisier peut passer les trois quarts du temps sur la route, quand les parcelles sont éloignées.
2 / Dissocier le transport et l’épandage
Pour gagner en efficacité tout en évitant de tasser les sols, une piste d’amélioration consiste à dissocier le transport de l’épandage. C’est ce que permettent les automoteurs d’épandage. L’automoteur reste au champ. Des tonnes effectuent la rotation entre la fosse et la parcelle. Elles l’approvisionnent ainsi en direct ou via un caisson. Il faut compter une tonne de ravitaillement par kilomètre de distance entre la parcelle et la fosse. Jean-Yves Prodhomme, agriculteur à Montours (35), est membre d’une unité collective de méthanisation. Il fait épandre du digestat liquide par l’automoteur de la cuma de Saint-Hilaire-des-Landes. « Il a moins de matraquage du sol qu’avec un épandeur », constate tout d’abord l’agriculteur.
Le témoin apprécie par ailleurs le débit de chantier : « L’automoteur passe 100 m3/h avec deux tonnes pour le ravitailler. On double le débit de chantier par rapport à un épandage classique. » Dernier avantage, il n’y a pas de salissement des routes, puisque l’automoteur reste dans la parcelle et les tonnes sur la route. De plus, entre l’enfouissement immédiat et des routes propres, ce sont des relations de voisinage qui sont plus apaisées.
3 / Epandre sans tonne mais avec précision
Une autre solution pour des chantiers rapides et respectueux du sol passe par l’épandage sans tonne. C’est un choix qu’a fait la cuma de Plurien, qui équipe un tracteur d’une rampe d’épandage de 24 m. Ce système intègre un débitmètre et un lecteur NIR. Grâce à l’analyse en continu du lisier, les quantités épandues s’ajustent en fonction des teneurs. Un tuyau porté sur un enrouleur sur le pont avant du tracteur alimente la rampe.
D’une longueur pouvant aller jusqu’à 1 km, le tuyau transfère le lisier depuis un caisson grâce à une pompe. « Il faut organiser l’approvisionnement en continu du caisson mais cela permet un chantier très efficace, partage Gurvan Le Boulc’h. Avec une organisation rodée, la cuma épand 30 ha dans la journée. Avec une tonne cela prendrait une semaine. » Pour atteindre cette efficacité, il faut avoir au moins 10 ha au pied de la fosse. Une autre possibilité est de disposer de parcelles regroupées où installer un caisson tampon que deux ou trois tonnes ravitailleront.
4 / Ne transporter que des matières utiles
Pour gagner en efficacité dans son épandage de lisier en sortie d’hiver, il peut être judicieux d’avoir à transporter moins de liquide ou, du moins, de réserver les effluents les plus liquides aux parcelles à proximité et les solides pour celles qui sont plus éloignées. Ce qu’aident à faire les séparateurs de phases.
« Il est possible de gagner de 10 à 20 % du volume », avance Eloi Ferracioli, de Fertinnov, une start-up bretonne qui a conçu un séparateur simple, Separafix. À partir de lisier de raclage, de fumier mou, cet équipement sépare la phase liquide des parties solides, qui deviennent stockables en tas. La phase liquide rejoindra la fosse et il y aura moins de risque de bouchage à la reprise ou à l’épandage.
« On obtient deux produits, avec deux objectifs différents, une phase liquide pour la culture, une phase solide à voir sur la durée pour le sol », poursuit Eloi Ferracioli.
Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :