Comme une prouesse sportive, la campagne de plantation de pommes de terre 2024 a été difficile. Elle a mis les agriculteurs sur les rotules et leur patience à rude épreuve. En effet, dans la plupart des bassins de production, les plantations s’achèvent enfin. Alors que pour certains, en Normandie et dans le nord des Hauts-de-France notamment, les chantiers se terminent. Seulement maintenant. Avec un mois de retard et des conditions pas toujours optimales.
Des plantations de pommes de terre 2024 difficiles
« Les pluies de ces derniers mois n’ont pas toujours facilité les plantations, annonce Loïc Le Meur, chargé de missions à l’UNPT, union nationale des producteurs de pommes de terre. Le travail du sol en profondeur était délicat et les gros orages sur certaines parcelles n’ont rien facilité. On verra le résultat à la récolte, la météo des prochaines semaines sera décisive. »
Mais il faut l’avouer, celle du mois de mai a été propice aux levées et développement rapides des plantules. Si bien qu’à peine levées, les pommes de terre subissent une pression élevée du mildiou. Chaleur et humidité favorisant le développement du champignon. « Les agriculteurs doivent être vigilants et être prêts à traiter pour protéger les cultures fragiles », rappelle le chargé de mission.
Des prix du marché libre très élevés
La campagne 2024 a également été marquée par une pénurie de plants. En effet, la production , en retrait, n’a pas comblé tous les besoins. Même si les surfaces attendues ont été plantées tout de même. « Certains ont dû couper les plants en deux, d’autres ont réduit leur densité de plantation, illustre Loïc Le Meur. Bref, tous les moyens étaient bons pour réussir à planter la surface envisagée. Mais aucun producteur n’a pu être agile et modifier ses variétés selon la date de plantation. »
Ce phénomène est le résultat d’une forte pression sur les producteurs de pommes de terre. Lucrative, la culture de pommes de terre industrielle, même si elle demande beaucoup de technicité, est très demandée. Notamment par les industriels qui ne cessent de se déployer.
En effet, rien que pour approvisionner les usines françaises, il faudrait plus de 50 000 ha supplémentaires par rapport à 2023. De quoi faire tourner la tête ? Pour y parvenir, les industriels se donnent les moyens : augmentation des contrats et la concurrence entre eux est de retour. « Mais avec cette conjoncture, il semblerait que les surfaces soient restées stables », annonce le chargé de mission.
Belgique : la moitié des plantations
Toutefois, c’est avant tout la filière de production de plants qui doit être au rendez-vous pour assurer ce besoin. Il semblerait que des accords soient conclus avec à la clé des revalorisation de contrats mais aussi une sensibilisation de la filière. « Je crois qu’aucun acteur de la filière n’avait envie de revivre ce printemps, ironise Loïc Le Meur. L’hémorragie semble être stoppée. »
Chez nos voisins Belges, les conditions de plantations ont été exécrables en avril et mai. Résultat, seule la moitié des surfaces est emblavée. Aux Pays-Bas, malgré un gros retard et des disparités entre les régions, les plantations devraient se conclure cette semaine. Au Royaume-Uni et en Allemagne, les chantiers sont achevés. Cette dernière a d’ailleurs annoncé une hausse historique de ses surfaces à +4% par rapport à 2023.
Attention au déséquilibre
Dans ce contexte de difficultés de plantation et de forte demande, on imagine assez facilement les cours de la pomme de terre. « Sur le marché du libre, les cotations s’affichent entre 500 et 550 €/t, précise le chargé de mission. Mais attention, cela ne veut pas forcément dire que des transactions se réalisent. Les stocks des industriels sont encore pourvus et chez les agriculteurs, les pommes de terre disponibles s’amoindrissent. »
D’autant que sur le marché de l’export, les pommes de terre françaises souffrent de la concurrence des égyptiennes. « Il faut être vigilants à ce que les niveaux de prix ne viennent pas contrarier les cours français, fait remarquer Loïc Le Meur. C’est déjà un peu le cas pour les produits transformés. Avec des frites américaines moins chères que celles françaises. »
Le début de campagne 2024 rebat tranquillement les cartes de la filière. Entre les producteurs de plants, les surfaces contractualisées et les demandes des industriels. « Certains agriculteurs vont peut-être délaisser les contrats pour profiter du marchés du libre, imagine Loïc Le Meur. Les industriels seront-ils toujours aussi demandeurs ? C’est le choix du risque. Chacun est capable de le mesurer. »
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