« C’est encore trop humide mais nous n’avons plus le temps d’attendre, alors on y va quand même! » lance Benjamin Smee, agriculteur dans les Flandres. Entre deux préparations de parcelles et en attendant la planteuse, il glisse, « j’en ai marre, ça fait plus d’un mois que ça n’avance pas, il est temps que nous finissions les plantations de pommes de terre. »
Des plants germés
En effet, cette année, les plantations de pommes de terre ont mis à rude épreuve les patatiers des Hauts-de-France. Au final, elles auront un peu plus d’un mois de retard, avec une totalité de la sole emblavée d’ici la fin de semaine. Engageant les agriculteurs vers une récolte tardive cet automne. Aussi impatients que les agriculteurs, entre-temps, les plants de pommes de terre ont déjà commencé à germer. « Je les ai bougé plusieurs fois pour tenter de ralentir leur germination, sans réel résultat », précise le jeune agriculteur.
Benjamin Smee aurait voulu tester une autre stratégie cette année en choisissant des variétés plus précoces, Tiger, Innovator et Fontane pour tenter de les récolter plus rapidement. Mais il l’avoue, sa stratégie ne sera peut-être pas si profitable. « Tous les ans, j’arrache mes pommes de terre dans des conditions humides, j’en ai assez. Alors j’ai voulu planter les variétés tôt pour les récolter plus tôt… mais la météo en a décidé autrement. Même si elles sont plus hâtives, je les récolterai à la même date que d’habitude. »
Car depuis presque un mois, les agriculteurs ont peiné à mettre les pieds dans les champs, faute de fenêtre météo sèches assez longues. Au total, ensemble, avec les deux collègues avec qui il partage sa planteuse, Benjamin Smee doit planter environ 80 hectares. Un première partie a été plantée début mai et pour cette semaine, il en reste plus que 35.
Plantations de pommes de terre : des débits de chantier réduits
« Quand tout va bien, on peut atteindre un débit de chantier à 10 ha/jour, estime-t-il. Mais cette année si on fait une parcelle de 6 ou 7 ha par jour ce sera bien. » Car depuis mi avril, les pluies se sont enchainées dans la partie de Nord de la France et on retardé les chantiers. Les terres trop humides n’ont pas pu sécher correctement. « J’ai fini de semer mon lin et mes betteraves, relativise ce jeune agriculteur. Il ne me reste plus que les pommes de terre. »
Pour préparer le terrain et aider à ce qu’il sèche plus rapidement, l’agriculteur multiplie les passages de rotative. Il en dénombre quatre voire cinq selon les endroits. « C’est fastidieux et le résultat reste à désirer, fait-il constater. Ca reste encore très motteux même si on ne va pas vite. » Des passages qui rendent le coût de chantier encore plus élevé.
Pour ce chantier de préparation, heureusement, Benjamin Smee peut s’appuyer sur ses deux autres collègues. « On met nos tracteurs, herses rotatives ainsi que la main d’œuvre en commun, explique t-il. Encore plus cette année, nous avons besoin d’être efficace. » Les trois agriculteurs de la région travaillent ensemble depuis longtemps et ont entre temps créé une cuma pour la récolte des pommes de terre il y a quelques années.
Engrais localisé
La planteuse de quatre rangs, une Miedema CP42, est utilisée depuis cinq ans. Achetée d’occasion par le groupe, âgée d’un an, la planteuse est équipée depuis cette année d’un système de localisation de l’azote. Un coût de 1 000 euros, dans l’espoir de rentabiliser l’engrais et de l’économiser un peu. « Nous avons acheté une cuve de 2 000 litres que l’on attèle à l’avant du tracteur, explique l’un des trois co-propriétaire. Un système de répartition de l’azote liquide est disposée au niveau du soc pour le localiser un peu en dessous du plant. »
Avec cet équipement, le groupe de patatiers a dû revoir son organisation de chantier. « Il faut être deux, à temps plein, pour la plantation dorénavant, précise Benjamin Smee. Cette personne est en charge de remplir la planteuse de plants et aussi la cuve. Pour ma part, je ne la remplie qu’à moitié pour ne pas trop charger notre tracteur de 130 chevaux. Je peux ainsi planter 2 ha sans la remplir. Il faut cependant que le pulvé, utilisé en guise de cuve, reste aux abords de la parcelle pour éviter de perdre trop de temps. »
Cette année, Benjamin Smee espère avoir eu son compte avec l’eau. Si l’année dernière il avait irrigué ses champs de pommes de terre, il espère bien y échapper pour cette campagne. « J’ai fait sept tours d’eau l’année dernière, indique-t-il. Les pommes de terre ont bien grossi mais finalement, c’était de trop puisqu’au moment de les arracher, le terrain était trop humide. J’ai dû en laisser dans les champs. » L’année 2022 était une année exceptionnelle avec aucun recul ni référence en la matière. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs, pour le moment, l’heure est à la plantation, l’arrachage, c’est pour plus tard.
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