Afin de mettre en œuvre l’agriculture de conservation des sols, ou ACS, la fédération des cuma du Tarn fait partie du consortium de construction du projet de démonstrateur « Objectif sol », présenté par le Syndicat du bassin versant Tarn Aval. Son animateur agroéquipement, Sébastien Jalby, fait le point.
Pouvez-vous décrire le projet d’ACS, en bref ?
« Lever tous les freins, techniques, économiques et agronomiques qui empêchent les agriculteurs du bassin versant Tarn Aval de passer à l’agriculture de conservation des sols. Cette forme d’agriculture repose sur trois piliers : minimiser le travail du sol, maximiser la couverture du sol et favoriser la diversité des espèces dans les parcelles et autour.
Vous l’avez souligné dans votre dossier consacré à la lutte contre l’érosion l’année dernière, l’ACS est efficace techniquement et économiquement pour retenir les sols, l’eau, la fertilité, le carbone et améliorer in fine la qualité des eaux. Et la meilleure échelle pour agir, c’est bien le bassin versant, en mobilisant un collectif d’agriculteurs. »
Un syndicat de bassin versant qui s’occupe d’agriculture, est-ce logique ?
« Oui ! Le Syndicat du bassin versant Tarn Aval observe depuis des années le débit et la qualité de l’eau. Ils voient qu’en cas de gros orage, le Tarn devient marron. L’équipe sait que 78 % des territoires du bassin versant sont des surfaces agricoles… et que le marron dans l’eau représente la fraction la plus précieuse des terres agricoles qui s’échappe des parcelles : la matière organique, les oligo-éléments, l’azote… le meilleur. Et jusqu’à 40 t/ha… et par an, selon Lionel Alletto, directeur de recherche à l’Inrae en Occitanie. C’est énorme ! L’ACS permet aussi au sol de mieux retenir l’eau, cela réduit les risques d’inondation et amortit les effets des sécheresses. »
Où ce projet d’ACS en est-il ?
« Pour le moment, on est en phase de maturation jusqu’à mi-2025. L’enjeu, c’est aussi d’en faire un projet solide et pertinent pour les agriculteurs, et aussi transposable. Il y a énormément d’attention de la part des collectivités autour de nous, et de tous les acteurs liés plus ou moins directement à l’ACS. France 2030 a souligné que ce projet est le seul de ce type à avoir été déposé. Il a un impact direct sur les territoires ruraux et déclenche des synergies importantes. La Banque des territoires va financer 50 % de ce projet au côté d’autres partenaires. On est sur du lourd, avec 4 millions d’euros en jeu. »
Quels financements pour les agriculteurs ?
« Ce n’est pas tout à fait consolidé. Mais on se dirige vers la signature de plusieurs packs transition sur des durées de trois ans, qui permettront la prise en charge de la formation, de l’accompagnement technique, mais aussi des semences de couverts, des agroéquipements et de la matière organique pour accélérer la restauration des sols. En résumé, il s’agit d’annuler la prise du risque liée à la transition, aux changements. Le tout, sans objectif de résultat, car tout dépend d’où l’on part. La récupération des sols peut prendre plus de trois ans. L’ACS, ce n’est pas une opération culturale : cela remet en question le quotidien du travail des agriculteurs et la stratégie d’exploitation. Mais le jeu en vaut la chandelle… y compris sur le plan économique. On va aussi travailler avec les agriculteurs qui se sont déjà lancés dans ces techniques, les pionniers. Car eux, sans accompagnement, se sont parfois plantés, mais ont persisté et progressé au vu des bénéfices qu’ils voyaient… et qu’ils quantifient désormais. »
*Le plan d’investissement France 2030, doté de 54 milliards d’euros, doit permettre, selon le gouvernement, de « rattraper le retard industriel français, d’investir massivement dans les technologies innovantes ou encore de soutenir la transition écologique ».
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