L’organisation est maintenant bien rodée à la cuma Grain de saveurs située à Oslon en Saône-et-Loire. Le lundi c’est la première équipe, le mardi la deuxième. En effet, à tour de rôle, les adhérents y viennent pour abattre leur volaille. Un outil qui n’est pas très classique en cuma mais qui se prête bien aux élevages du territoire. Reportage dans un abattoir de volaille en cuma.
Un abattoir de volaille en cuma, c’est possible
En effet, chaque année ce sont environ 25 000 volailles d’une quinzaine d’adhérents qui y sont abattues sur deux demies journées. « Toutes les tailles d’élevages sont représentées ici, explique Michel Potdevin, président de la cuma. Un éleveur peut venir avec 20 volailles alors qu’un autre 13 000. Ce dernier est le lycée agricole de Fontaine. Il apporte 40 % du volume et aussi de la main d’oeuvre. C’était le principal moteur du projet. »
L’abattoir réuni des élevages d’un territoire assez vaste. Le plus loin étant éleveur à 80 km de là. « Il n’y a pas d’autre outil identique près de chez lui » précise le président.
Outil un peu hors normes, il a fallu beaucoup de patience pour qu’il prenne forme. « Le projet était en réflexion depuis 2009, entre plusieurs exploitations du secteur et le lycée agricole de Fontaines (71), explique Victoria Seidenglanz, animatrice de la cuma. Les exploitants souhaitaient avoir un outil de travail qui leur correspondait et leur permettait de commercialiser librement leurs produits en circuit-court. Au départ, 14 000 volailles étaient engagées chaque année. »
Après quelques retournements de situation, le projet voit le jour en 2013 sur la commune d’Oslon, la seule à accepter d’accueillir un abattoir, subventionné à 60 %. L’objectif est de correspondre aux exigences sanitaires et de repartir avec sa volaille prête à être commercialisée en quatre heures.
Une organisation bien rodée
C’est pour cela que le choix de créer une cuma il y a dix ans s’est imposé. « Nous voulions un outil adapté à toutes les exploitations et tous les éleveurs de volaille, ajoute le président. Or, construire ce type d’outil n’est financièrement pas rentable pour nos petits élevages. Ici, tous les adhérents se forment à tous les postes d’abattage. On prend le temps de bien faire les choses pour que nos produits gardent leur qualité. »
Tache et investissement se partagent. « Chacun y met de sa poche, ça engage. » Les lundis et mardis matin, deux groupes de sept à huit éleveurs investissent les lieux. Ils sont répartis selon les affinités et leur manière de travailler. « Une banque de travail est gérée par le conseil d’administration afin de comptabiliser les heures de travail de chacun, explique Victoria Seidenglanz. Elle est mise à jour tous les six mois. »
Garder la qualité du produit
La saveur et le bien être animal est l’une des priorités de ces éleveurs. Car chacun d’entre eux vendent leurs volailles au détail. « C’est important pour nos clients d’avoir un produit de qualité, assure Michel Potdevin. Dans l’abattoir, on travaille pour nous, nous sommes exigeants et on respecte l’animal. On se permet même de faire des commentaires sur les volailles abattues, toujours avec bienveillance et dans l’objectif de s’améliorer. »
Le groupe a depuis dix ans gagné en compétences et en organisation. La cuma a modernisé sa ligne d’abattage, 200 000 euros ont été mis sur la table en 2021 pour être encore plus efficace. Ainsi, ils considèrent qu’il faut en moyenne 3,5 min/volaille.
Avant d’adhérer à la cuma, une phase de test est possible. « On prend le temps d’accompagner les éleveurs, d’expliquer et de faire appliquer le protocole sanitaire, ajoute le président. Une personne fait mal son travail et c’est toute la cuma qui est perdante. » C’est très facile de perdre son agrément sanitaire.
Si l’essai s’avère positif, l’éleveur doit ensuite suivre une formation sanitaire dispensée par la DDPP (direction départementale de la protection des populations). En trois jours, le participant acquiert des notions sur le bien être animal, la mise à mort et les opérations santé et post mortem. La certification obtenue à l’issue est valable cinq ans.
Être davantage rentable
Implanté au milieu de la Bresse, l’outil a reçu les agréments de l’interprofession des volailles de Bresse, mais pour l’instant aucun des éleveurs labelisés n’est venu à l’abattoir. « C’est davantage pour avoir la possibilité d’en accueillir », explique le président. Car la volonté de la cuma est bien d’avoir un outil optimisé.
Ce qui n’est pas vraiment le cas puisque la mobilisation de l’abattoir est de deux demies journées par semaine seulement. La tarif, même s’il a tendance à diminuer reste élevé : 3,50 €/volaille. Pour la facturation, c’est le trésorier qui en est responsable. Une part fixe de 2,40 €/volaille chaque année est prévue lors des engagements, un genre de forfait. Il faut y ajouter 1,10 €/volaille réellement abattue.
« Pour réduire ce coût, il faudrait qu’on abatte 10 000 volailles de plus chaque année, avoue Michel Potdevin. C’est la tendance que nous essayons d’inculquer à nos adhérents mais nous ne voulons pas non plus perdre notre gage de qualité et notre savoir-faire. »
En attendant, la cuma se penche sur la création d’un atelier de découpe. Car pour le moment, les volailles sortent de l’abattoir en entier. « Mais ce n’est pas le mode de consommation préféré de nos clients, ajoute Michel Potdevin. Si nous pouvions proposer des morceaux de volaille, notre production pourrait facilement augmenter.» Pas de doute, cet abattoir de volaille en cuma dynamise les éleveurs du territoire.
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