Dans ce que les techniciens appellent récolte de l’herbe « par voie humide », deux méthodes dominent : l’enrubannage et l’ensilage. Elles présentent de nombreuses différences en termes de coût, de matériel, de main-d’œuvre à mobiliser, de valeur alimentaire, etc.
Pour mieux comprendre les critères de choix des éleveurs, l’équipe du projet Opti-Herbe a interrogé une quarantaine d’entre eux, dans les Pays-de-la-Loire et en Bretagne. Il s’agissait de producteurs de lait pour plus de la moitié et de propriétaires de troupeaux allaitants ou mixtes pour les autres, tous en bovins. Les techniciens y ont ajouté leur point de vue afin d’approfondir la grille de choix entre les méthodes.
Pourquoi récolter en enrubannage?
Trois motivations principales émergent dans l’enquête : récolter des fourrages de très bonne qualité alimentaire (citée 7 fois sur 10), la facilité de stockage, et la facilité de distribution. Deux autres sont quelquefois ajoutées : faire les petits chantiers et récolter des fourrages de qualité moyenne.
Ces chantiers représentent en moyenne 16 ha, avec de grosses variations (+/-15 ha). L’enrubannage ne concerne donc pas que les petites opérations, loin de là. Quelles en sont les contraintes ? Pour 6 éleveurs sur 10, c’est le temps passé à ramasser les balles. Précisons qu’ils sont une grande majorité à employer une presse avec hacheur avec hacheur et ne sont donc pas concernés par des problèmes de longueur de brins dans la mélangeuse.
Les avantages de l’enrubannage
Les conseillers spécialisés de la frcuma Ouest et des organismes partenaires ont complété la liste des avantages de l’enrubannage (particulièrement en monoballe) plus largement recensés :
- Autonomie sur le chantier et plus de liberté de temps de travail, car cette technique mobilise moins de personnel.
- Pas de gestion de front d’attaque de silo comme avec l’ensilage.
- Souplesse d’utilisation, puisque balle par balle : par ex. fourrage d’appoints pour les systèmes pâturants.
- Distribution simplifiée adaptée aux animaux en extérieur, pas besoin de matériel de désilage.
Les inconvénients
- La manutention et le transport des balles enrubannées accroît le risque de dégradation du film plastique, avec un impact sur la qualité de conservation.
- Besoin d’une surface de stockage importante.
- En ration mélangée, il faut bien prendre en compte la longueur de fibre, qui peut conduire à une mauvaise homogénéisation et accepter un coût non négligeable du mélange, en temps et en carburant.
- Déchets de plastiques plus importants.
Récolter en ensilage : on préfère?
Les trois mêmes arguments reviennent dans l’enquête auprès des éleveurs, mais dans un ordre différent : récolter des fourrages de très bonne qualité alimentaire (cité 9 fois sur 10), la facilité de distribution puis la facilité de stockage. Quelles en sont les contraintes ? C’est de loin la constitution de l’équipe d’ensilage qui arrive en tête (citée plus de 5 fois sur 10).
Ce facteur est d’autant plus lourd quand le parcellaire est éclaté. Il faut des remorques ! Puis les éleveurs avancent le risque météo pour le préfanage. Le débit de chantier élevé peut aussi susciter des difficultés de tassement du silo. Les chantiers d’ensilage sont 50 % plus grands que les précédents, 24 ha en moyenne, mais avec là aussi de gros écarts (+/-21).
Découvrez comment économiser plus de 10% de GNR à l’ensilage d’herbe !
Les avantages de cette technique
L’équipe de spécialistes a identifié une série d’arguments en faveur de l’ensilage, qui complète ceux des éleveurs interrogés :
- Gros débit de chantier.
- Adapté à des fenêtres météo plus courtes, le taux de matière sèche optimal étant moins élevé que pour de l’enrubannage.
- Gestion du hachage plus facile, avec une longueur de coupe faible (2 à 3 cm) et homogène.
- Homogénéité et qualité du fourrage, favorable à la distribution.
- Moins de volume de stockage.
- Plus d’entraide et de convivialité lors des travaux.
Les inconvénients de l’ensilage
Le revers de la médaille comprend aussi quelques facteurs à prendre en compte :
- Besoin de mobiliser et de gérer une main d’œuvre importante le jour de la récolte.
- Infrastructure de stockage nécessaire, en veillant à la qualité des matériaux.
- Contraintes de la confection du silo : dérouler la bâche, porter les sacs, avec suffisamment de personnes.
- Gestion du front d’attaque : risques d’échauffement, et débâchage régulier.
Le top 3 des motivations selon les éleveurs !
Qu’il s’agisse d’enrubannage ou d’ensilage, les opinions des éleveurs sont partagées. La rédaction a réalisé pour vous un top 3 des motivations illustrées dans le schéma ci-dessous :
Pourquoi récolter avec l’autochargeuse ?
La remorque autochargeuse représente une troisième solution de récolte de l’herbe par voie humide, avec elle aussi ses points forts et ses limites. Les experts de l’Ouest en pointent certains et un travail réalisé récemment dans l’Yonne (Chambre d’agriculture et Alysé) en fournit d’autres :
Les avantages
- Autonomie sur le chantier : plus de liberté de temps de travail, mobilise moins de personnel.
- Adapté à des fenêtres météo plus courtes que pour l’enrubannage (30-35% de MS).
- Homogénéité et qualité des fourrages, favorable à la distribution.
- Moins de volume de stockage que l’enrubannage.
- Machine plus simple à entretenir qu’une ensileuse.
Les inconvénients de l’autochargeuse
- Débit de chantier plus faible que l’ensileuse, et cela d’autant plus que les parcelles sont éloignées.
- Infrastructure de stockage nécessaire, en veillant à la qualité des matériaux.
- Longueur de brins plus élevée qu’en ensilage (5 cm) : il faut récolter une herbe jeune, ne pas dépasser 35% de matière sèche, tasser soigneusement le silo, et la reprise peut s’avérer plus difficile qu’avec de l’ensilage en coupe fine.
- Contraintes de la confection du silo : dérouler la bâche, porter les sacs, avec suffisamment de personnes.
- Gestion du front d’attaque : risques d’échauffement, et débâchage régulier.
Le projet Opti-Herbe
Le projet Opti-Herbe est centré sur la technique de l’ensilage. Son objectif : créer et vulgariser des références, des outils et des méthodes pour optimiser les fourrages, du champ à l’auge. Il est piloté par la frcuma Ouest, en partenariat avec les fédérations de cuma des Pays de la Loire, Mayenne et Bretagne, ainsi que Seenovia et Arvalis. D’autre part, il est soutenu par les Régions Bretagne et Pays de la Loire. Le savoir-faire ainsi acquis consolide l’expérience accumulée en interne depuis de nombreuses années, ainsi qu’au fil de projets précédents comme Ecosil-Herbe avec des partenaires normands (fédération des cuma, Elvup, Littoral Normand).
Vous avez des questions? Des experts vous répondent !
Le réseau cuma de l’Ouest propose les services de deux experts de l’ensilage, en herbe comme en maïs, pour les cuma et les éleveurs. Michel Seznec (Union des cuma des Pays-de-la-Loire) et Jean-Marc Roussel (fédération des cuma Bretagne) peuvent intervenir ponctuellement sur un sujet précis (sur place ou à distance), ou organiser des journées de formation complètes. Pour les contacter : 02 99 54 63 15.
Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :