Ei si le passage en agriculture biologique n’était pas toujours rentable ? C’est ce que constatent Vincent et Nicolas, particulièrement au travers de la filière de la betterave bio. Les deux agriculteurs confient que le groupement sucrier français Tereos France refuse leur production car « ils ont deux ans de stock de sucre bio et que personne n’en veut ». Pour cette année 2024, Nicolas a donc été contraint de renoncer à sa culture de betteraves malgré son investissement dans un robot autonome pour semer et biner.
Passer à l’agriculture biologique : un choix plus éthique que rentable
Mathieu se rappelle de ses débuts en bio : « Sur le terrain, on prouvait que c’était tout à fait faisable et qu’en plus il y avait une réussite économique ». A présent, il déplore sa situation : « Il n’y a que mon éthique qui fait que je suis en bio aujourd’hui. Economiquement, je n’ai pas de quoi subvenir à mes prêts ».
C’est le même constat pour Nicolas, il y a deux ans : « Moi, je vendais mon blé 450 € la tonne, en bio. Cette année on n’est même pas encore à 300… Ça fait 30% de baisse alors que toutes nos charges ont augmenté ». Le bio reste un luxe et « c’est donner un prix à la vie des gens » rétorque Nicolas, indigné.
Les déconversions ont augmenté de 6,6 % en 2021, par rapport à 2020 dans les Hauts-de-France.
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Un bon indicateur pour des politiques publiques adaptées
Le 10 mars 2023, la Commission européenne adopte le règlement Commission Implementing Regulation qui obligera, dès 2026, les agriculteurs à tenir des registres sur l’usage de leurs produits phytosanitaires. « Dans un contexte de crise agricole où les agriculteurs se plaignent d’avoir trop de paperasse à faire, il faudra être aussi vigilant » pour leur donner les moyens de le faire, avertit Aurélien Chayre, chargé de mission agroécologie chez Solagro.
Néanmoins, l’enjeu reste celui d’un indicateur adapté pour évaluer l’évolution de la consommation des pesticides. La décision de Gabriel Attal du 21 février 2024 de remplacer l’indicateur NODU5 par celui européen HRI-1 aurait pour but de calculer les impacts sanitaires et environnementaux des pesticides. « Sauf que ça ne marche pas du tout, c’est le pire indicateur qui existe. Ça ne distingue pas du tout les risques dans la réalité » affirme Aurélien Chayre. Cet indicateur, largement contesté par les ONG et les chercheurs, minimise la dangerosité des substances catégorisées comme étant les moins toxiques.
Avec que du bio, tout le monde meurt de faim ?
C’est la question que Vincent lance lors de son entretien. Aurélien Chayre lui répond que « le bio a effectivement moins de rendement. La question à se poser c’est : si on passe au 100% bio demain, arrivera-t-on à nourrir tout le monde ? C’est moins sûr… ». Le scénario Afterres 2050 réalisé par Solagro y émet la condition d’une réduction de la consommation de protéines animales. L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) conseille également le développement du biocontrôle et de l’agroforesterie. Au même titre que la diversification des cultures et l’aide des agroéquipements pour assurer l’immunité des plantes. Grâce au bio, c’est une division par deux des émissions de gaz à effets de serre dans le secteur agricole qui est à prévoir !
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