L’équipe prépare ce soir-là l’assemblée générale de cuma dans la salle de la mairie. La présidente Claire Ghilbert, le trésorier Lionel Semenadisse et la secrétaire de la cuma, Évelyne Demeaux-Levy, s’activent à disposer les chaises, puis à répondre aux questions en s’accoudant à la table centrale. Ils accueillent avec chaleur l’ancien président de la cuma, Christian Bessières. Il est vrai qu’il vient aussi en voisin. Il est maire de Porte-du-Quercy, qui englobe désormais l’ancienne commune de Saint-Matré. Christian Bessières est également venu raconter la naissance de la cuma, et faire le lien avec l’histoire qui s’écrit dorénavant avec la nouvelle équipe. Retour sur l’histoire de la cuma de Saint-Matré.
Filtre à terre
« La cuma a été créée le 13 juillet 1984 », énonce la présidente en se penchant sur les archives. « Et le premier matériel dans lequel la cuma a investi était un filtre à terre », complète Christian Bessières, qui explique que « le vin devait être préfiltré, selon les préconisations de la commission label pour l’AOC Cahors. Nous le faisions fonctionner en travaillant avec un œnologue. » La cuma était exclusivement orientée, dès le départ, sur les matériels viticoles, d’où son nom de ‘cuma viticole du Plateau de Saint-Matré' », explique-t-il. « Il y avait d’autres cuma autour pour les autres types de matériels. Nous avons ensuite investi dans une effeuilleuse, puis une machine à vendanger d’occasion en 1986. Elle a servi à une quarantaine d’adhérents sur un périmètre d’action assez étendu, pendant de longues années. » Puis la cuma continue d’étoffer son parc de matériels, en acquérant un égrappoir, une, puis deux pompes à marc, deux effeuilleuses, une rogneuse, et enfin un premier tracteur d’occasion.
« Arrive la fin de ma période ‘machine à vendanger’ : « nous n’étions plus assez d’adhérents, et les frais d’entretien s’envolaient », remarque Christian Bessières. « Et il n’y avait plus qu’une personne en capacité de la conduire, qui était mon oncle, complète Claire Ghilbert. Cela devenait difficile sans avoir personne pour le relayer ».
10 000 heures au compteur du tracteur de la cuma de Saint-Matré
C’est l’activité ‘tracteur’ qui signe la redynamisation de la cuma. « Le premier tracteur avait 10 000 heures au compteur », souligne Lionel Semenadisse. Dans le sillage de la période Covid, l’équipe choisit d’investir dans un combo tracteur-prétailleuse, neuf cette fois.

La cuma de Saint-Matré a su maintenir son cœur d’activité : la viticulture. (©E. Comerford-Poudevigne)
En parallèle, les exploitations des adhérents évoluent. Leur nombre a baissé depuis la création de la cuma, au fur et à mesure des départs et des restructurations. Ils sont désormais une vingtaine. Les exploitations se diversifient aussi. « Sur la vigne, nous subissons, notamment depuis trois ans, des conjonctions d’aléas plusieurs fois par an », explique Claire Ghilbert. « Il y a la grêle, le gel, la sécheresse… Mais il y a aussi la conjoncture des marchés », reprend la présidente. « Elle n’est pas spécifique à Cahors, c’est toute la filière vin qui souffre. Même si nous avions les rendements, on ne pourrait pas les écouler, en fait », note-t-elle. D’où des diversifications au sein même de la filière viticole. Et l’apparition (ou la réapparition) d’autres productions, comme les céréales, les noix ou encore les moutons.
Cap maintenu
L’équipe maintient toutefois le cap de la viti au sein de la cuma. À son arrivée, en 2023, les nouveaux membres du bureau mettent carrément la dissolution sur la table. « Je trouvais ça dommage », pointe Claire Ghilbert. Nous avons des matériels performants, en proximité, avec des tarifs attractifs. » Le tracteur, qui tourne jusqu’à présent 800 h/an, est par exemple facturé 15 €/h (sans le carburant). « Le coût des matériels est vraiment élevé, c’est tout l’avantage de la cuma », résume-t-elle.
Lionel Semenadisse, à cette époque, plaide davantage pour un rapprochement avec une cuma voisine plus importante. « Cela nous aurait permis de diluer les charges fixes », précise le trésorier. Il se rallie toutefois au duo que forment la présidente et la secrétaire : « Nous avons voté et la majorité des adhérents se sont prononcés pour le maintien de la cuma de Saint-Matré. »
Saine gestion et bonne entente à la cuma de Saint-Matré
En parallèle du maintien de la cuma, et de la stratégie d’équipement, le nouveau bureau vient remettre l’accent sur la gestion de la cuma. « Nous avons fait des relances sur les retards de paiement, qui ont été remis en ordre, indique Évelyne Demeaux-Levy, la secrétaire. L’objectif est de trouver des solutions pour chacun. Nous avons donc fait les relances avec Alexandre, le comptable du Cerfrance qui travaille avec la fédération des cuma. La situation se lisse, on a désormais de la trésorerie et nous pouvons envisager des projets. »
Et c’est à la secrétaire de résumer l’état d’esprit : « Si on n’est pas d’accord, on se le dit, on fait fonctionner le groupe, et après, personne ne fait la tête. Avec Claire, on n’aurait pas repris s’il n’y avait pas une bonne ambiance ! Là, ça fonctionne très bien. Notre credo, c’est que les projets soient portés par l’ensemble des adhérents. Avant, je n’aurais jamais imaginé que je contribuerais à faire fonctionner la cuma. On s’est simplement dit « on le fait ! »
Belle illustration de ce dynamisme : ce jour-là, l’assemblée générale a rassemblé la majorité des adhérents, grâce à l’invitation de la présidente qui vient tout juste de créer un groupe WhatsApp dédié à la cuma.
Pourquoi Entraid a choisi ce sujet ?
Pas besoin d’être beaucoup pour créer une cuma utile sur un territoire ou une filière. La cuma de Saint-Matré reste dans son créneau, la viticulture. Mais son équipe, renouvelée et « féminisée ! » a remis à plat le fonctionnement et continue à fournir aux adhérents des matériels utiles au quotidien, à prix attractifs.
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