« On va vers une professionnalisation des activités d’ensilage en cuma »

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« On va vers une professionnalisation des activités d’ensilage en cuma »

Michel Seznec, expert fourrage ouest et animateur-conseiller machinisme à l’union des cuma des Pays de Loire.

Rencontre avec Michel Seznec, expert fourrage ouest et animateur-conseiller machinisme à l’union des cuma des Pays de Loire. Il nous donne quelques éléments quant aux stratégies adoptées par les cuma face à une hausse des prix des ensileuses.

Michel Seznec, expert fourrage ouest et animateur-conseiller machinisme à l’union des cuma des Pays de Loire, revient pour Entraid sur les différentes stratégies des groupes concernant les activités d’ensilage en cuma.

Lorsqu’il s’agit d’un renouvellement d’ensileuse, comment les groupes se comportent-ils afin de conserver un coût de revient raisonnable malgré une hausse des prix à l’achat ?

La première réaction des groupes, qu’il s’agisse d’un renouvellement d’ensileuse ou d’une création d’activité, est d’allonger la durée d’amortissement du matériel. C’est la tendance aujourd’hui et dans certains cas, ce n’est pas aberrant puisque d’une manière générale les machines sont assez fiables techniquement. On peut donc les laisser vieillir un peu plus longtemps.

J’ai en tête l’exemple d’un groupe qui a amorti son ensileuse sur sept ans. Il a choisi de ne renouveler que les becs, pièces qui s’usent facilement. Et il a décidé de conserver la machine encore quelque temps avec une bonne révision.

Mais cette stratégie n’implique-t-elle pas une hausse des coûts d’entretien ou d’admettre des pannes ?

Par forcément pour des groupes qui se sont professionnalisés autour de cette activité. Ils ont bien souvent un salarié en charge de la conduite et de l’entretien de l’automoteur. Ils assurent ainsi un bon suivi de l’ensileuse, de son entretien pendant la saison. Mais ils anticipent aussi la réparation ou le changement de certaines pièces de la machine en hiver.

Il faut également faire remarquer que les ensileuses, si elles sont plus onéreuses, sont également plus fiables techniquement. Avec cette organisation, un groupe peut aisément conserver son ensileuse une dizaine de campagnes sans faire flamber les coûts de revient.

La professionnalisation des activités d’ensilage en cuma incite à une autre dynamique…

Bien sûr que la professionnalisation des activités d’ensilage en cuma apporte une autre dynamique. L’embauche d’un salarié et l’investissement dans de telles machines sont une phase complexe et qui demande d’y consacrer du temps. Mais lorsque les chantiers sont bien rodés, cela apporte de vraies économies et rend la cuma attrayante. L’ensilage dans les cuma est l’une des activités fédératrices. L’embauche d’un salarié pour ces chantiers, permet aussi au groupe de bénéficier d’un chauffeur pour réaliser d’autres chantiers complets de semis, d’épandage ou encore de récolte.

Il faut aussi avoir conscience que les éleveurs réalisent des tâches de plus en plus techniques dans leur exploitation et qu’ils n’ont pas forcément le temps de conduire et de suivre des machines aussi sophistiquées.

En embauchant un chauffeur, le prix de revient peut augmenter…

Oui si on regarde uniquement ce poste. Mais, en accumulant les charges, on remarque que c’est une stratégie gagnante. Avec un chauffeur attitré, la machine est mieux entretenue, elle est conduite avec efficacité et cela apporte plus de souplesse au groupe. Sans compter les économies réalisées sur les autres activités complètes engendrées.

En quoi la qualité de l’ensilage est importante ?

Pour répondre aux exigences en matière de qualité de fourrages des élevages, la cuma doit proposer des services qualitatifs. Embaucher un chauffeur d’ensileuse formé, qui connaît sa machine et qui est capable de suivre les technologies semble être une bonne stratégie. Un travail de qualité est attrayant pour les éleveurs voisins et peut les inciter à rejoindre le groupe. Surtout si la cuma est en capacité de proposer de l’entraide pour le transport de l’ensilage. Il faut être conscient que les machines sont de plus en plus puissantes, rendant la cadence de chantier élevée.

D’autant que le maintien du coût de revient peut également s’obtenir par une hausse des surfaces ?

Oui. L’optimisation des surfaces est aussi une clé pour amortir la hausse des prix d’achat. Il est donc nécessaire d’ensiler le plus de surfaces possibles pour diluer les coûts fixes. Pour cela, les cuma peuvent envisager un regroupement d’activités avec des cuma voisines ou accueillir de nouveaux adhérents.

Cela demande une organisation de chantier bien rodée. Avec parfois des fenêtres de récoltes courtes, les groupes doivent proposer un travail de qualité avec la meilleure disponibilité et un coût compétitif. Mais grâce à un regroupement d’activités, le groupe peut aussi avoir plusieurs ensileuses de différentes capacités et âges afin d’assurer une disponibilité quoi qu’il arrive.

Y a-t-il des stratégies de financements qui permettent de conserver un prix de revient stable pour les utilisateurs d’ensileuse ?

Malheureusement, les prix d’achat sont en perpétuelle hausse et ce n’est pas toujours facile de comprendre pourquoi ! En plus, en matière d’ensileuse, le marché est peu concurrentiel, c’est compliqué d’aller vers une démarche d’achat groupé et difficile donc de négocier les prix.

En revanche, les cuma, si elles sont équipées d’un bon atelier et qu’elles peuvent s’appuyer sur un bon mécano, peuvent aussi se tourner vers du matériel d’occasion. Ce sont parfois de bonnes affaires. Enfin, il ne faut pas hésiter à saisir les bonnes offres commerciales. Les machines de démo sont de temps en temps bien remisées. Mais attention aussi aux offres qui incitent à un achat qui ne correspond ni aux besoins, ni à la nécessité de renouvellement. Il faut rester cohérent au besoin réel du groupe.

Face à cette hausse des prix constante, comment imaginez-vous les activités d’ensilage en cuma dans 10, voire 20 ans ?

C’est difficile de prévoir, mais l’ensilage reste une activité fédératrice des groupes et elle persistera. J’imagine que pour pouvoir maintenir des prix de revient admissibles, les cuma devront s’adapter et se professionnaliser grâce à des salariés compétents et un atelier bien fourni.

On peut également prévoir un regroupement des activités lorsque cela est possible. Dans certaines régions, le maillage des élevages n’est pas propice au travail en commun. Cependant, il ne faut pas oublier les unités de méthanisation qui peuvent assurer une partie des surfaces à ensiler et ainsi rendre l’activité rentable.

On peut supposer également que les machines dans les cuma seront un peu plus vieilles, mais aussi parfois plus nombreuses. Avec le regroupement des activités, un groupe recomposé possédera peut-être deux machines au lieu de trois par exemple, avec une plus âgée que l’autre, plus puissante que l’autre, pour assurer la disponibilité et l’avancée des chantiers.

Est-ce déjà une tendance que l’on observe ?

En Loire-Atlantique, oui. Près de 80 % des machines sont conduites par des salariés. Si le modèle se développe, les cuma risquent de se confronter au manque de main-d’œuvre. Il faut trouver et former les bons chauffeurs, et cela se prépare… tout comme le regroupement d’activités ou l’arrivée de nouveaux adhérents. Les responsables devront être armés pour gérer cela. Il faut que le réseau des cuma communique sur ce sujet.

Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com.

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