Des équipes de chercheurs se sont penchées sur le lien entre la présence de cuma, de leurs adhérents et de leur réseau d’animation, et la consommation de phytos sur le territoire français. Selon les premiers résultats, il existe bien un lien statistique entre l’activité des cuma et la baisse de consommation de phytos agricoles. « A la base de cette corrélation, l’équipe de chercheurs* a identifié deux canaux », a précisé Madeg Le Guernic, enseignant-chercheur à la Rennes School of Business, lors d’une intervention en mai lors du Forum des fédérations des cuma pour présenter ces travaux.
La baisse de la consommation de phytos s’appuie sur deux mécanismes
« Cette baisse est liée à la nature des matériels utilisés sur le territoire en question. Il y a bien un effet technologique. Car dans les cuma, après discussion, après échanges, on investit dans des matériels de pointe » a-t-il précisé. « Nous détectons également un effet sociotechnique, lié aux échanges d’informations entre pairs. » En résumé, la cuma, c’est le lieu de discussion entre agriculteurs pour échanger sur la manière d’utiliser les matériels. Cela rejoint la thèse de la sociologue Véronique Lucas qui a caractérisé les cuma comme le lieu de « l’agroécologie silencieuse ».
Aujourd’hui, une douzaine de chercheurs travaillent sur l’impact des cuma, en particulier sur les pratiques agroécologiques. Ils sont répartis en 4 équipes dans le grand Ouest (comprenant notamment l’Inrae, le CNRS, l’Institut Agro, l’Université Rennes 1). Ils ont été lauréats, avec le programme ID2cuma, de l’appel à projets Ecophyto (Parties prenantes 2020) et bénéficient de l’appui de la Fncuma et d’un financement de 216800€ de la part de l’Office français de la Biodiversité. Leur projet court de 2022 à 2025.
Un modèle fructueux pour relever les défis agricoles
Les premières publications ont eu lieu et l’équipe poursuit trois objectifs :
- Dresser un état des lieux des modalités de partage de matériels agricoles dans le monde, mais aussi les spécificités du modèle cuma
- Comprendre d’un point de vue théorique comment le modèle cuma peut être fructueux à l’avenir
- « Contribuer à mettre en valeur d’un point de vue académique l’un des plus gros réseaux fédératifs en agriculture » a souligné Madeg Le Guernic
« Il existe en gros trois modèles de partage de matériels entre agriculteurs dans le monde », a t-il expliqué Madeg Le Guernic lors de son intervention. « Le modèle francophone, basé sur les cuma, qui a essaimé en Belgique et au Bénin par exemple. Mais il existe aussi un modèle germano-scandinave, qui repose sur les cercles d’échanges de machines, dont l’attendu principal est le service rendu. Ainsi que le modèle anglo-saxon, très informel. »
Rôle structurant des fédérations de cuma
Parmi les spécificités du modèle cuma, Madeg Le Guernic a souligné le rôle structurant des fédérations de cuma, et la pérennité des cuma sur les territoires. Laquelle se révèle à double-tranchant : d’un côté les nouveaux arrivants bénéficient de structures en place, efficaces, dotés de parcs matériels. De l’autre, ce confort leur paraît acquis : ils n’ont pas eu à s’impliquer activement pour en bénéficier. Et trop peu envisagent de s’investir pour contribuer au fonctionnement de la structure.
Les questions de l’audience à M. Le Guernic ont d’ailleurs largement couvert cet aspect de renouvellement des générations et d’engagement.
Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :
- Semis direct, optimisation… et 60€/ha de phytos en moins.
- Plus de matériel pour toujours moins de phytos.
- Quatre outils de destruction des couverts au banc d’essai.
- 21 matériels pour semer et valoriser ses couverts.
- Comment détruire sans herbicide.
*projet mené par Simon Cornée (CREM, Université de Rennes 1), Damien Rousselière (SMART, Institut Agro / INRAe) et Véronique Thélen (CREM, Université de Rennes 1), résumé sur le site de Fncuma