La question des couverts végétaux
Dans de nombreuses situations, la première question à traiter est celle du couvert végétal en place. « Sauf s’il s’agit d’une légumineuse pure, il faut se donner comme repère de détruire le couvert deux mois avant le semis. En effet, étant pauvre en azote, il va en mobiliser dans le sol pour se décomposer et concurrencer la culture ». En pratique, la saison hivernale ne se prête pas toujours à ce calendrier, d’où cette recommandation : « Avant un semis d’orge ou de betteraves, mieux vaut détruire le couvert dès novembre ou décembre pour être sûr de passer en bonnes conditions. Si c’est en vue d’un semis de maïs ou de tournesol, on peut attendre février. Mais dans ces questions de calendrier, il est également nécessaire de tenir compte de la réglementation locale en lien avec la directive nitrates ».
Vis-à-vis de l’eau dans le sol, le couvert végétal joue un double rôle, que précise Jérôme Labreuche. « D’un côté, il maintient une certaine humidité dans les cinq premiers centimètres, qui peut d’ailleurs gêner en cas de semis direct dans le couvert. De l’autre, il transpire et peut donc assécher le sol. Mais la consommation d’eau d’un couvert ne se manifeste qu’à partir de mars avril. » Se servir du couvert végétal en place pour assainir un sol gorgé d’eau avant de semer le maïs peut s’envisager, « mais avec le risque de trop assécher le profil », prévient l’ingénieur d’Arvalis.
Le bon calendrier
Pour le travail du sol avant semis, la règle demeure celle du bon sens : « Attendre que le sol se ressuie pour passer en bonnes conditions. » En plein hiver, les épisodes de gel peuvent offrir quelques créneaux, mais ensuite, c’est une question de patience. « Dans les sols légers, faciles à travailler, on peut attendre et préparer le lit de semence juste avant le semis. Un travail profond au décompacteur peut même s’envisager si le terrain est ressuyé sur les 20 à 30 premiers centimètres. » Mais en revanche, les sols lourds s’avèrent plus délicats. « À partir d’environ 17% d’argile, on va avoir des sols qui se ressuient moins bien et qui peuvent être plastiques au moment du semis. Dans ces sols, le travail profond est souvent réalisé avant l’hiver ou bien durant une période de gel. »
Les avantages de la charrue
Dans tous les cas, si un travail profond s’avère nécessaire au printemps en sol léger, la charrue semble plus polyvalente aux yeux de Jérôme Labreuche. « En retournant le sol, elle l’émiette forcément même s’il est humide. Au contraire, un décompacteur ne peut être efficace que si le sol est à l’état friable, ni trop sec, ni trop humide. »
Mais une préparation plus superficielle peut souvent suffire. « Un outil à dents passé à 10-15 voire 20 cm peut convenir pour émietter le sol, et en même temps enfouir les résidus de couverts végétaux et les effluents d’élevage, tout en nivelant le terrain. » La préparation du lit de semence intervient dans un second temps, « plutôt avec un vibroculteur qu’avec une herse rotative, si le sol est encore un peu frais. »
Si on craint la sécheresse
Les agriculteurs qui craignent des épisodes de sécheresse après les semis cherchent pour leur part à préserver l’humidité du sol dans leur itinéraire de préparation. « Si l’état structural est bon, explique Jérôme Labreuche, il est possible de ne travailler que l’horizon superficiel, celui qui se trouvera au-dessus des grains semés. » Autre conseil pour préserver l’humidité : « Préparer le sol au dernier moment, si cela est possible, et ne pas laisser sécher un sol qui a été très ouvert par un passage d’outil. » Et donc ne pas multiplier inutilement les interventions. Dans cette manière de voir, le combiné herse rotative et semoir se révèle plutôt favorable à l’économie d’eau.
On peut également penser à d’autres techniques, comme le semis direct ou le strip-till pour économiser l’eau. Mais le semis direct ne se décide pas au dernier moment. « Il faut anticiper l’itinéraire dès la moisson précédente », prévient Jérôme Labreuche. Le strip-till semble plus facile à pratiquer de façon opportuniste. Mais il ne faut pas que la bande de sol non travaillée soit compactée, sinon l’enracinement sera pénalisé. D’autre part, notre interlocuteur précise qu’il est nécessaire de prendre en compte le type de dent du strip-till. « Certaines fissurent simplement le sol sans trop le bouleverser, alors que d’autres ont tendance à remonter plus de terre, forcément un peu humide. » Quelques heures d’attente peuvent alors s’avérer nécessaires avant d’enchaîner avec le semis.
Enfin, qui dit sol humide au moment des préparations de sol dit risques de compaction. Attention au poids des matériels et à la monte de pneumatiques.
Lire à ce sujet cet article d’Arvalis : bit.ly/SOLhumide.
En agriculture de conservation, c’est différent
En ACS (agriculture de conservation des sols), le comportement des sols vis-à-vis de l’eau diffère, explique l’APAD dans une fiche technique. « Le fait d’avoir un sol toujours couvert et jamais travaillé va permettre d’obtenir une bien meilleure infiltration de l’eau. Cette eau privilégie d’abord la circulation via la microporosité du sol. En cas de forte pluie, elle passe alors dans la macroporosité (comme les galeries de vers de terre) où elle est rapidement évacuée en profondeur. » Concernant la réserve utile, l’APAD cite des agriculteurs « qui disent qu’après une dizaine d’années en ACS, ils apportent un à deux tours d’eau de moins qu’auparavant pour des rendements équivalents voire supérieurs. »
Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com.