La réussite d’une stratégie de maîtrise de la pression des adventices par des interventions mécaniques se joue sur la globalité du système. Avant le semis, les interventions préparatoires apportent par exemple un effet faux-semis. Même les décisions du chef de culture, et ce dès les choix de rotation, actionnent des leviers qui favoriseront la réussite d’une stratégie de désherbage mécanique.
«Il est primordial d’alterner les périodes de travail du sol», explique Aurélien Dupont (chambre d’agriculture de Bretagne), qui réalise des essais sur le sujet à la station expérimentale de Kerguéhennec (56).
«On va utiliser des périodes où le couvert est dense, avec du sarazin, ou des densités de semis importantes». Puis, ce sera le temps des faux-semis. L’idée générale est de limiter le phénomène de sélection d’un type d’adventices.
Alternance est un maître-mot
Sur 2020, la chambre régionale a suivi plus de 250 parcelles où des interventions de désherbage mécanique ont eu lieu. D’après les observations du ce réseau, «la présence de cultures pluri-annuelles (prairies) est un atout», note Soazig Perche, conseillère de l’organisme consulaire. À l’inverse, des stratégies en TCS compliquent cette gestion de la flore.
Enfin, la relation à la technique semble aussi avoir son incidence. «On voit que le coût des itinéraires de désherbage mécanique est plus élevé en bio», note la conseillère. Cela souligne qu’en bio, «nous n’avons pas de plan B. On ne se pose pas la question de faire l’impasse d’un passage», tandis que la production conventionnelle autorise une plus grande souplesse sur ce plan.
Dans les deux cas, la satisfaction des agriculteurs de ce réseau est bonne. Les notations moyennes dans les parcelles désherbées mécaniquement s’établissent autour de 7 sur 10, avec toutefois une plus grande variabilité en production conventionnelle.
Les détails qui comptent
«Rien que la question des réglages est importante en matière de désherbage mécanique. On voit qu’il y a vraiment un besoin d’échanger et de confronter nos expériences». Laurent Guernion, président de la frcuma Ouest est aussi agriculteur pratiquant dans les Côtes-d’Armor. Il souligne ainsi tout l’enjeu de cette journée Désherb’innov proposée le 10 juin pour la première fois.
Plusieurs agriculteurs adhérents du Ceta 35 y partageaient également leur expérience du désherbage mixte. Erwan Colin, leur conseiller au sein de la structure identifie deux stratégies payantes, en termes d’IFT, comme en termes de coût de production. Face à une référence de coût total du désherbage de 100€/ha pour un maïs (géré en 100% chimique), «une stratégie impliquant un binage après un traitement chimique revient à 90€/ha. On la privilégie en itinéraires sans labour ou lorsqu’il y a une problématique de résistance des graminées».
Le binage terrasse même les graminées résistantes
Pour des conditions plus favorables, la seconde stratégie mixte présentée repose sur un passage mécanique précoce en plein (houe ou herse étrille). «Le chimique intervient en rattrapage à 5 feuilles. Il faut regarder la flore», et choisir le bon cocktaïl en fonction. Le conseiller insiste: «Si l’on ne maîtrise pas ça et qu’on réalise la même bouillie qu’en ‘tout chimique’, on ne réduit pas le coût du traitement. On perd alors tout l’intérêt». Bien géré, ce programme propose un coût global de 60€/ha.
La puissance du groupe, le slogan vaut aussi pour les outils. En effet, un passage de bineuse (même la meilleure du monde) seul ne réussira pas à dompter de manière satisfaisante la flore spontanée. «Il n’existe pas d’outil universel», martèle Hervé Masserot, animateur cuma en Mayenne. «Avec la bineuse, on travaille l’inter-rang. Pour tout ce qui est sûr le rang, c’est trop tard, il faut l’avoir géré avant», explique-t-il sur un atelier technique dédié aux matériels.
Agriculture de précision dans les décisions
La parcelle utilisée pour la démonstration illustrait cette importance de réaliser une succession des passages. Elle démontrait aussi toute la finesse requise dans le pilotage des itinéraires. Les premiers outils mis en action le 10 juin étaient les herses et les houes. «Aujourd’hui, nous n’aurons pas l’efficacité optimale sur ces passages en plein», prévenait d’emblée David Roy, référent Agrobio 35. «Le stade d’intervention idéal est dépassé. Nous sommes en retard de trois jours».
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