L’évolution n’étonnera personne ! Au 1ᵉʳ janvier 2026, une limitation de certains usages considérés comme trop émetteurs d’azote ammoniacal sera effective. Sur le terrain, un signe indique que les acteurs s’emparent progressivement de la question. Nombre de renouvellements de tonnes à lisier se réalisent en prenant en compte la perspective de restrictions à l’encontre de la palette. L’intérêt pour le rétrofit de tonne grandit !
La réglementation et les prix poussent l’intérêt du rétrofit de tonne à lisier
« Nous souhaitions anticiper le changement de réglementation », indiquait à Entraid une cuma en Mayenne lors de son investissement dans une tonne pendillards, en février 2021. « C’est une façon de sauter le pas et de répondre aussi aux attentes environnementales », expliquait une autre, de Savoie, déjà en 2020.
Deux ans plus tôt, lors d’une assemblée de fédération au titre provocateur « Epandage à la buse ? T’abuses ? », Hervé Masserot évoquait déjà la certaine évolution réglementaire. L’animateur machinisme, expert de l’épandage, indique aujourd’hui aux propriétaires de ces appareils : « Il faut au moins étudier les possibilités » de se doter d’un équipement plus vertueux au regard des émissions d’azote ammoniacal.
L’adaptation est en marche
« Pour les groupes disposant d’un parc de plusieurs tonnes, ce sera plus facile, poursuit-il. On commencera par le proposer à ses adhérents sur un matériel », en conservant le reste du parc en buse. Dans le cas d’un groupe avec une activité moindre, relativement hétérogène en termes de besoins, et avec un matériel d’épandage unique, il faudra peut-être s’ouvrir au travail avec d’autres collectifs pour trouver une solution.
Quoi qu’il en soit, « il y aura une question financière », introduit l’expert. Car la tonne à lisier coûte cher. Néanmoins, différentes alternatives s’offrent à l’investisseur. Le retrofit compte parmi elles.
Le rétrofit de tonne à lisier s’étudie au cas par cas
Frédéric Lavalou, animateur machinisme en Normandie et référent épandage, définit : « Le rétrofit est un moyen de moderniser un équipement déjà en service. Un objectif fréquent est de le rendre compatible avec les normes, ou d’adopter des améliorations technologiques. En même temps que l’on maintient une valeur marchande de son matériel, ce dernier gagne un potentiel technique permettant d’améliorer le service qu’il rend. »
La cuma de la Vallée de la Sienne, dans la Manche, lance une réflexion d’amélioration de sa tonne de 22,7 m³. Le témoignage de son président, Christophe Orvain, confirme l’analyse. « La valeur de reprise de notre tonne serait pénalisée par le fait qu’elle est en buse. En effet, le concessionnaire qui la prendrait voudra l’équiper. Cela signifie qu’il aura des frais… »
Ainsi un renouvellement complet nécessiterait une soulte un peu supérieure à 100 000 € selon l’estimation du responsable. En comparaison, pour un montant du même ordre d’idée, une cuma de Bretagne avait ainsi fait équiper en rétrofit trois de ses tonnes en 2022.
Limiter l’impact sur le coût de chantier grâce à la valorisation de l’existant
« Au vu des investissements de plus en plus conséquents dans une tonne à lisier, le choix d’un rétrofit peut s’avérer comme un levier intéressant pour contenir le prix de la facturation aux adhérents à des niveaux concurrentiels, conforte Nassim Hamiti, de la fncuma. Pour une cuma ayant déjà des tonnes en buse palette en capacité de recevoir un équipement moins émissif, il est donc judicieux d’étudier cette option. »
Gauthier Savalle, animateur en Seine-Maritime et Eure, ajoute une condition : « Cette rénovation s’envisage sur une tonne qui en vaut le coup. » La cuma de la Vallée de la Sienne est sans aucun doute dans cette situation.
Frédéric Lavalou relate : « C’est une tonne bien entretenue, dont les pneumatiques ou le compresseur par exemple ont déjà été changés. » Christophe Orvain complète : « Elle est bien équipée, pour exemple avec son bras tourelle. Le constructeur nous l’a confirmé : nous trouverions difficilement une tonne à lisier d’aussi bon niveau sur le marché du neuf. »
Rétrofit de tonne : solliciter le constructeur
Les experts épandage soulignent en revanche toute la complexité potentielle de l’opération. Il faudra peut-être souder, percer, rester vigilent à propos de la répartition des poids ou de la disponibilité des distributeurs hydrauliques, et se soucier de l’ergonomie du système de commandes, etc.
« Le rétrofit de ces matériels sera vraiment une étude au cas par cas, résume Frédéric Lavalou. Le point principal à retenir sur des projets pendillards de grandes largeurs ou d’enfouisseurs à disques est de faire valider votre projet par le constructeur de la tonne. »
Le 13 novembre, la tonne à lisier de la Voie romaine réalisait une démonstration, après le rétrofit réalisé au printemps dernier. Damien Schmit, inspecteur commercial Stécomat, met en avant la simplicité de la pose du dispositif qu’il importe. Ce dernier se fixe au niveau de la porte arrière de la cuve. « Pour une version de 9,20 m comme ici, le poids n’est que de 500 kg. »
L’installation sur le matériel de la cuma avait demandé quatre heures, tandis qu’une étude estimait que le coût supplémentaire pour l’adhérent représenterait environ 0,20 € par mètre cube épandu (pour 900 voyages par an et 10 ans d’amortissement).
L’investissement pour la qualité d’épandage doit se valoriser
Quelle que soit la méthode d’adoption, ces équipements qui limitent les pertes ont un coût.
Frédéric Lavalou résume : « Si l’on investit dans ce genre de dispositif, c’est pour faire évoluer ces pratiques. Sans piloter mieux ces cultures, en réalisant des reliquats, en réduisant ses achats de minéraux, le surcoût à l’épandage sera alors une charge en plus. »
Cohérence globale des caractéristiques
Hervé Masserot soulève un dernier point. « Il faut également évaluer la cohérence globale de la tonne par rapport à l’utilisation que l’on veut en faire. » Il donne un exemple : Si le groupe souhaite passer des produits épais, un système hybride sera sans doute nécessaire pour approvisionner convenablement une rampe et limiter les risques de bouchage.
La cuma de la Vallée de la Sienne témoigne : « il y a quinze ans, nous étions en enfouisseur. » La problématique avait justifié un retour en arrière. « Aujourd’hui le matériel a évolué et on doit pouvoir trouver quelque chose qui ne bouche pas avec nos lisiers de bovins pailleux. En tout cas c’est notre grande question à ce stade du projet », souligne Christophe Orvain.
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