La concentration du foncier agricole est une réalité pour 63% des 300 agriculteurs de Nouvelle-Aquitaine questionnés par la SAFER de cette région. Cependant, cette concentration n’est pas jugée «excessive» pour la moitié des répondants! Dans le même esprit, 35% des sondés répondent «non» à l’idée de renforcer la régulation du foncier agricole.
Les JA «pour» la régulation
Par contre, les jeunes agriculteurs (moins de 30 ans) sont franchement «pour» à près de 80%. Les 30-50 ans plutôt pour à 60%. A l’inverse, cette hypothèse est peu soutenue par les plus de 60 ans, généralement en phase de transmission de leur propre exploitation… Parallèlement, les agriculteurs interrogés ayant de grandes exploitations (plus de 200 ha) sont un peu moins sensibles à la nécessité de renforcer le contrôle des structures…
Jouer sur la fiscalité
Les moyens plébiscités pour renforcer la régulation foncière concerne d’abord la fiscalité. Ce levier (réduction des droits de mutation, dégrèvement d’impôt foncier sur les baux à long terme…) pourrait être activé pour faciliter la transmission des exploitations à des jeunes agriculteurs, au lieu qu’elles aillent à l’agrandissement. Rappelons que les cessions d’exploitations représentent en enjeu considérable. En Nouvelle-Aquitaine, on évalue à 3.000 le nombre d’exploitations agricoles qui devraient changer de main dans les prochaines années en raison des départs à la retraite.
Impact sur les coops
Tous les acteurs du monde agricole sont interpellés par la question foncière. Ainsi, la coopérative céréalière de la Tricherie en Vienne (300 adhérents avec 180 ha de moyenne) redoute que les stratégies de filières qu’elle développe sur des marchés de niches, soient mises en péril suite aux nombreuses cessions d’exploitations qui se profilent. Notons que cette coopérative réfléchit aussi à l’accompagnement des exploitations en fin de carrière qui rencontrent des difficultés technico-économiques. Une des pistes serait de recourir contractuellement à des ETA susceptibles de prendre en charge la partie suivi et traitement des cultures. Objectif: retrouver de la performance sur ces exploitations.
Prise de contrôle par des actionnaires
Par contre, les participants à la conférence de la SAFER ont déploré la prise de contrôle d’exploitations par des actionnaires qui ne participeraient plus aux travaux agricoles mais délégueraient ceux-ci à des prestataires extérieurs. Ce phénomène se diffuse pourtant dans certaines zones comme dans l’Oise où désormais, 20% des surfaces agricoles feraient l’objet de travail à façon. Ces pratiques alimentent la concurrence actuelle sur les marchés fonciers des terres libres et de la location.
Nouvelle loi foncière et nouvelle PAC
La future loi foncière en préparation pour 2019 devra colmater quelques brèches actuelles dans le droit foncier si le législateur souhaite vraiment contrecarrer l’accaparement des terres. Cela concerne en particulier les transactions de parts sociales de sociétés d’exploitations, qui échappent en partie au droit de préemption des SAFER. Jusqu’ici, la France est peu dominée par des superstructures comme en Slovaquie où 20% de fermes exploitent 95% de la SAU totale! «En France, ce ratio est de 60% et est relativement stable», selon Laurent Piet de l’INRA. Grâce en particulier aux SAFER qui freinent l’augmentation des inégalités de tailles grâce au contrôle des structures. La nouvelle PAC actuellement en réflexion pourrait infléchir également les velléités de concentration foncière dans l’hypothèse où dorénavant, l’attribution des aides PAC reposerait davantage sur le nombre d’agriculteurs actifs que sur les surfaces…
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