L’œuf est en passe de devenir un produit de luxe pour les américains. En effet, aux États-Unis, depuis un an, le prix de l’œuf a doublé. Une accélération depuis décembre 2024 avec une progression de plus de 15 %, passant la barre des 20 $/30 œufs. À titre de comparaison, en France, la même quantité nous coute entre 5,75 € et 12,50 € selon le type d’élevage. « On s’attend encore à une progression des prix outre-Atlantique, estimée à plus de 20 % sur toute l’année 2025 », annonce Alice Richard, directrice du CNPO, l’interprofession des élevages de poules pondeuses. Symptôme d’une pénurie d’œufs que subissent les États-Unis.
Vers une pénurie d’œufs aux États-Unis
Mais pourquoi de tels niveaux de prix ? Tout d’abord, parce qu’il y a beau avoir un océan entre l’Europe et les États-Unis, le pays fait également face à une épidémie de grippe aviaire. Mais à une toute autre échelle. Là-bas, l’épidémie touche également les cheptels de bovins lait. Quelques cas humains ont également été recensés.
Cependant, c’est la filière des poules pondeuses qui en pâtit le plus. « Il y a la taille des élevages qui ne facilite en rien les conséquences de l’épidémie, ajoute la directrice. En moyenne, un élevage représente environ un million de poules, contre 16 000 en France. Dès qu’il y a un cas, c’est tout l’élevage qui trinque. »
On a vite fait de perdre quelques millions de poules en quelques jours. Il suffit donc de quelques cas pour déstabiliser tout un marché. Depuis le début de l’épidémie, 21 millions de poules ont été abattues (soit la moitié du cheptel français).
Sans vaccin
C’est également le résultat d’un choix stratégie sanitaire. Celui de ne pas vacciner les animaux. Le but étant de favoriser les exportations d’œufs et de poulets de chair. « En France, nous avons choisi de vacciner les canards, car lorsqu’ils sont porteurs du virus, ils sont asymptomatiques, explique la directrice. Ils propagent donc facilement la maladie. Mais cela nous a valu de faire beaucoup de pédagogies pour pouvoir exporter notre volaille, parce que vaccinée, elle ne peut être vendue à l’étranger. » Risque que n’a pas voulu prendre les États-Unis, deuxième exportateur de poulets de chair dans le monde.
La pénurie d’œufs se fait donc sentir. Et les Américains ne sont pas les derniers consommateurs. Chaque année, un habitant mange 277 œufs alors qu’un français 224. « Outre les prix exorbitants, c’est bien un manque de marchandise qui se fait sentir dans les magasins, poursuit Alice Richard. Les achats sont rationnés. Dans les fast-foods spécialisés dans les petits déjeuners qui proposent les œufs, ils sont en suppléments. »
Marché tendu
Pour tenter de combler le manque, les États-Unis ont importé 15 000 tonnes d’œufs de Turquie. Mais il faut l’avouer, avec une telle demande, de la part d’un gros pays consommateur, tend forcément le marché. Augmentant ainsi les prix et rendant rare la marchandise.
Sur ce point, la France aura du mal à tirer son épingle du jeu. « Notre marché intérieur est en pleine croissance. Nous sommes à peine autosuffisants en œufs, fait remarquer la directrice du CNPO. D’autant que nos éleveurs bénéficient de contrats qui leur assurent un revenu, mais laisse peu de marge de manœuvre pour faire varier les volumes. »
Une situation passagère ? Pas vraiment, s’alarment les experts. Car même si le pays envisage de se tourner vers la vaccination, il faudra attendre plus de six mois avant de pouvoir retrouver des œufs dans les élevages décimés. « On estime qu’il faut cinq à six mois avant qu’un élevage revienne en production », précise Alice Richard.
L’avenir des œufs reste brouillé en Amérique.
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