Pays-Bas, retour sur une crise qui dure

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Pays-Bas, retour sur une crise qui dure

L'agriculture néerlandaise est depuis cinq ans en crise. La raison, une injonction de réduire de moitié leurs émissions d'azote d'ici 2030.

Depuis 2019, les agriculteurs néerlandais ne savent plus à quel saint se vouer. Leur gouvernement, qui a changé depuis, les incite à réduire drastiquement leurs émissions d’azote. Un réel défit pour ce pays très peuplé, deuxième exportateur mondial et doté d’une agriculture très intensive.

Ça a débuté en 2019. Lorsque le gouvernement néerlandais a eu pour ambition de réduire de moitié les émissions d’azote d’ici 2030. Les agriculteurs du pays se sont alors enfoncés dans une vraie crise agricole qui reste durable. « C’est vraiment cette politique qui a mis le feu aux poudres, estime Daan Boezeman chercheur au PBL, Netherland environmental assessment agency. Ce ne sont ni les revenus, ni la PAC. C’est bien l’ambition écologique du gouvernement qui en est la principale responsable de ce mal-être. »

Des élevages à vendre

Il faut dire que les agriculteurs néerlandais ont du mal à avaler la pilule. Dans ce deuxième pays exportateur mondial après les Etats-Unis, les injonctions du gouvernement ne passent pas, créant de la frustration et du mal-être chez nos voisins. Compréhensible, d’autant plus que de nombreux efforts ont déjà été réalisés pendant les décennies précédentes. Depuis de nombreuses années, les Pays-Bas battent des records en matière d’émissions d’azote. « Nous sommes dans le pays le plus peuplé de l’Union Européenne, les élevages sont très denses et l’agriculture côtoie la nature de très près, illustre le néerlandais. Les risques sont très accrus sur la qualité de l’eau et de l’air. Les pics de pollutions sont courants. »

Ainsi, avec la plus grande concentration de bovins à l’hectare, l’agriculture néerlandaise émet 46 kg d’azote/ha, contre 11,2 en moyenne dans l’Europe. La France étant dans cette moyenne. Fort de ce constat, le gouvernement a lancé un plan drastique en tentant de racheter plus de 3 000 élevages et en incitant les éleveurs à réduire leur production.

Pas de consensus

Mais c’est un changement d’esprit qui demande de nouvelles compétences. Alors que les Hollandais avaient pour mission de produire en quantité, les voici réquisitionnés à produire de la qualité pour stopper les exportations de viande.

Toutefois, les politiques européennes tentent d’en tirer des leçons, face à ces deux constats. « Les exploitations européennes continuent de croître afin de produire à moindre coût, explique Henk Westhoek, chercheur également au PBL. Par ailleurs, il y a une ambivalence avec la PAC qui, elle, octroie des paiements pour produire. » On est donc très loin d’un consensus général.

Toute l’économie

D’où l’importance d’améliorer la résilience du secteur agricole et d’améliorer sa durabilité si l’Europe veut atteindre des objectifs de développement durable sans abîmer la compétitivité des exploitations. « Il est primordial que toute la filière alimentaire se retrouve pour mener ensemble un plan d’action, estime Henk Westhoek. Ce serait injuste de ne demander des efforts qu’aux agriculteurs. Les demandes écologiques doivent, pour qu’elles soient recevables, venir de toute la société, entreprises privées publiques, restauration, distributeurs, consommateurs, etc. Le seul choix doit être le choix de la durabilité. » Au risque que ses ambitions ne soient que de faux espoirs et dénuées d’actions.

Peu de moyens pour les Néerlandais

Avec une politique néerlandaise aussi ambitieuse, il faut avouer que les agriculteurs ont peu de moyens pour répondre à l’injonction de son gouvernement, entre réduire la production ou vendre leur exploitation. « Toutefois, ils ne doivent pas être seuls à porter cette ambition, rappelle Dann Boezeman. Les autres secteurs que sont l’industrie et les transports doivent également mettre la main à la pâte. » D’autant que les autres pays membres ajoutent de la pression sur les épaules des agriculteurs.

Pourquoi on en parle ?

Depuis 2019, l’agriculture Néerlandaise est dans une crise durable. Très émettrice d’azote, le gouvernement a demandé aux agriculteurs de réduire leurs émissions de moitié. Une injonction déconnectée du terrain et qui oblige les agriculteurs à vendre tout ou partie de leurs élevages. Les pays européens ne sont pas à l’abri de se retrouver un jour dans une telle conjoncture. Inimaginable donc de passer sous silence cette situation extrême.

Traduction : stikstofcrisis, crise de l’azote

Le chiffre : 46 kg d’azote/ha, contre 11,2 en moyenne dans l’Europe

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