Moduler l’irrigation en fonction de la réserve utile de ses sols

Partager sur
Abonnés

Moduler l’irrigation en fonction de la réserve utile de ses sols

Pour maximiser la rentabilité de son exploitation, Ghislain de La Forge teste la modulation des doses d'eau sous ses pivots.

Connaître son sol pour assurer une meilleure gestion de l’eau. C’est tout l’objet des expérimentations menées dans le Loiret dans le cadre du projet Carg’eau, avec le concours de la chambre d’agriculture. D’importantes économies d’eau sont possibles grâce au déclenchement des irrigations en fonction de la réserve utile des sols via un pivot équipé de la VRI (irrigation par asperseur à débit variable).

30 à 40 % d’économies d’eau en modulant l’irrigation de manière intraparcellaire, en fonction de la réserve utile du sol. C’est le résultat de deux essais menés en 2023 dans deux exploitations agricoles du Loiret récemment équipées d’un pivot disposant de la VRI (Variable Rate Irrigation), un système de modulation de l’ouverture des buses et de la vitesse d’avancement. Découvrez-en plus sur les essais effectués pour moduler l’irrigation dans la Beauce.

Cartographier avant tout

Si mettre la bonne dose au bon endroit est désormais bien intégré dans le domaine de la fertilisation, irriguer la bonne quantité d’eau en fonction de la réserve utile de son sol est une pratique novatrice. Or, dans un secteur géographique comme la Beauce, maîtriser l’efficience de l’irrigation est plus que jamais nécessaire. Les prélèvements en nappe sont très encadrés. Ils font l’objet chaque année d’une révision du coefficient fixant les quotas d’eau utilisables par les agriculteurs.

Sur les deux sites où la modulation de l’irrigation intraparcellaire par VRI sur pivot a été testée, un travail de cartographie du réservoir utile en eau des sols a été réalisé en amont.

« Ici, plus de 50 prélèvements ont été effectués avec une tarière, ce qui a permis de compléter les données de taux de matière organique et d’altimétrie déjà collectées », chiffre Ghislain de La Forge, l’un des deux agriculteurs ayant participé aux essais et installé sur la commune de Marseauceux.

Moduler l’irrigation : 23 000 m³ d’eau économisés

Des informations essentielles pour parvenir à l’objectif fixé : utiliser au maximum l’eau déjà présente dans le sol et en fonction des spécificités intraparcellaires.

Un intérêt d’autant plus grand dans une parcelle hétérogène comme celle de Ghislain de La Forge, qui fait un peu plus de 30 hectares, avec des zones allant d’une réserve utile de 48 mm à 155 mm et des types de sols allant de l’argilo-calcaire très superficiel au limon argileux profond.

Techniquement parlant, il s’agit de recourir à un pivot équipé de la VRI. Il doit être capable de moduler l’irrigation en arrosant plus gracieusement les zones les plus limitantes, en faisant varier le débit de chaque buse. Pour y parvenir, le recours à l’outil d’aide à la décision Net-irrig permet de modéliser les doses à apporter sur chaque zone de réserve utile, en fonction de la culture, à savoir du maïs en 2023.

Un surcoût compensé par les économies ?

Les résultats obtenus sont au rendez-vous. En 2023, ce sont 23 000 m³ d’eau irriguée qui ont été économisés sur la parcelle de 34 ha. Cela représente 40 % par rapport à une irrigation au canon monté sur enrouleur. D’un point de vue économique, l’objectif de Ghislain de La Forge, « ne pas dépenser une goutte d’eau qui ne sert à rien » selon ses propres dires, est atteint. En effet, les économies générées sur les 34 ha en 2023 ont été estimées à 6 930 €, en prenant en compte un coût de l’eau hors amortissement à 3 €/mm.

Ce premier bilan permet de fixer une durée d’amortissement prévisionnel de minimum quatre ans pour la VRI. Cela représente un surcoût de 19 650 € par rapport à l’investissement total du pivot de marque Lindsay Zimmatic, soit 105 300 €, subventionné par FranceAgriMer à hauteur de 16 000 €.

« Ces économies d’eau et la durée d’amortissement concernent les grandes cultures d’été à fort pouvoir d’exploitation racinaire, permettant d’exploiter au maximum les zones à forte réserve utile, comme les maïs ou les betteraves à sucre », nuance Thierry Bordin, chargé de mission au sein de la Chambre d’agriculture Centre Val de Loire, qui a suivi les essais. Les économies générées sont donc moindres pour des légumes, haricots ou oignons, dont le potentiel d’enracinement est plus limité. Cet équipement pourra, avec un doseur en complément, permettre de tester la ferti-irrigation.

« La modulation appliquée à toutes pratiques culturales »

« Depuis que je me suis installé sur la ferme familiale sur 188 ha il y a quatre ans, je me suis fixé comme objectif non pas de m’agrandir, mais de maximiser la rentabilité. C’est donc dans cette optique que je me suis intéressé à la modulation de l’irrigation par pivot VRI afin de couvrir au plus près les besoins en eau des cultures en fonction de la réserve utile du sol, et éviter les excès d’eau qui occasionnent des tassements.

Je prends en compte la vie de mes sols en optant pour certaines techniques culturales. Je n’effectue pas de labour systématique et pratique dans la mesure du possible au semis direct. Pour cela, j’ai modifié moi-même plusieurs semoirs de plus de 15 ans afin qu’ils s’adaptent à différentes situations et cultures. Je sème des couverts végétaux sur 100 à 120 ha, à partir de mélanges que je produis.

Cette pratique a un effet sur le pilotage de la fertilisation. Depuis que je me suis installé, j’ai pu économiser 30 à 40 unités d’azote par hectare. Sachant que l’exploitation est située dans un bassin d’alimentation de captage en eau potable, chaque kilo d’azote apporté ne doit pas se retrouver dans la nappe. Je souhaite appliquer les principes de la modulation à toutes les pratiques culturales.

Au niveau de l’irrigation, la VRI représente un intérêt en termes d’économies d’eau. Les limites que j’identifie sont le risque de panne pour les 92 électrovannes. Il y a aussi la nécessité d’avoir un variateur pour pouvoir techniquement au niveau de la pompe couvrir les besoins en débit de zones plus petites. »

modulation eau pivot

Ghislain de La Forge, agriculteur dans la Beauce, estime avoir réalisé 23 000 m³ d’économie d’eau grâce à la modulation.

Moduler l’irrigation : deux essais menés dans le Loiret

Où ?Une parcelle de 34 ha chez Ghislain de La Forge.Une parcelle de 52 ha à Férolles.
ModalitéTester les possibilités de modulation d’irrigation en fonction de la cartographie des réserves utiles intraparcellaire en grande parcelle.Étudier la modulation d'irrigation selon les réserves utiles cartographiées dans les grandes parcelles.
Matériels- Pivot LINDSAY Zimmatic VRI de 436 mètres de longueur ;
- 96 jets ;
- Asperseur 3,5 m de rayon.
Pivot Valley 8120 avec VRI.
Outils supplémentaires- Cartographie du réservoir utile en eau des sols de la parcelle ;
- Pilotage des irrigations par l’OAD Net-Irrig par Seabex.
- Cartographie du réservoir utile en eau des sols de la parcelle ;
- Pilotage des irrigations par l’OAD Net-Irrig par Seabex.
Culture supportMaïs itinéraire cultural : 2 variétés semées le 21 avril, fertilisation 194 N, 45 P2O5, 60 K2O, fractionnement de l’azote en trois apports (semis, 3-4 feuilles ; 9-10 feuilles), rendement moyen de 131 quintaux/ha.Maïs itinéraire cultural : semis le 25 avril, fertilisation 200 N, 60 P2O5, 60 K2O.
Économies d’eau40 % d’économies d’eau, soit 23 000 m³ sur l’essai de 34 ha.30 % d’économies d’eau générée, soit 24 000 m³ sur l’essai de 52 ha.

Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :

Sélectionner deux matériels de la même famille pour les comparer