La météo annonce un été chaud, ce qui n’est pas de bon augure pour moissonner et presser sans stress. L’année 2019 a été dramatique en matière de feux de récoltes et de chaumes.
Sans oublier qu’à côté des champs, sont exposés des bâtiments, des antennes relais ou des éoliennes dont la destruction peut s’avérer très lourde en terme de dommages humains ou matériels. Il y a pourtant des précautions à prendre pour réduire les risques.
Chez Krone, notre interlocuteur observe que «les matériels sont de plus en plus performants, alors qu’auparavant on aurait attendu le soir. On peut aujourd’hui presser en pleine chaleur, en prenant plus de risques». Le matériel éloigne également la réalité, nous dit-on chez Claas. Bien au frais dans une cabine climatisée, on perd la perception de la grosse chaleur.
Inspection hivernale
Le constructeur explique que la prévention commence en hiver. «La révision complète, réalisée en atelier durant la morte saison, est une occasion pour inspecter tous les organes en rotation. Pour vérifier l’état des roulements comme des systèmes de graissage déportés ou automatiques.» Une canalisation pincée et le lubrifiant n’arrive plus à destination. Un rouleau ou un rotor détérioré, c’est aussi une source de vibrations et donc de risque futur pour les roulements. «C’est là aussi qu’on peut détecter les enroulements de lin ou de chanvre qui créeront des échauffements.»
Cet examen visuel demande seulement un peu de temps Il est l’occasion, comme le rappelles les spécialistes interrogés chez Claas, de reprendre les réglages de la machine (pick-up, batteur, etc.).
Le réseau électrique peut aussi être une cause d’incendie, prévient Groupama dans ses pages Conseils, surtout quand il a été attaqué par des rongeurs. La chasse aux souris sur les matériels remisé est importante à ce titre, de même que «le contrôle des voyants de température et d’échauffement».
Beaucoup d’air
Ensuite, en saison, le discours qu’on tient chez New Holland rejoint celui de ses confrères: «Il faut savoir prendre quelques minutes pour nettoyer régulièrement son matériel. Ce, afin d’éliminer les dépôts de débris secs susceptibles de s’enflammer, c’est la règle de base. Et mieux le chauffeur connaît sa machine, mieux il a déjà repéré où peuvent se produire des échauffements.»
Chez Claas, les experts ont par exemple identifié dans des compartiments moteur des poussières qui peuvent se révéler particulièrement collantes à cause de certains traitements reçus par la culture. «Elles se consument sans flammes et causent un feu difficile à repérer au départ.» La vidange périodique du bac à pierres de la moissonneuse est également nécessaire.
Le soir et en journée
Sur une moissonneuse récente ou un tracteur avec freins pneumatiques, on peut trouver un compresseur et une réserve d’air qui permet d’alimenter une soufflette. De quoi donner un petit coup en cours de journée à quelques endroits sensibles. Et nettoyer au passage les prises de raccordement de la coupe.
Toutefois, les constructeurs consultés en conviennent, pour le nettoyage du soir, rien ne vaut un compresseur de chantier, avec du débit d’air. Certains agriculteurs utilisent un souffleur de feuilles portatif, une autre solution intéressante pour brasser beaucoup d’air.
Au travail avec une presse, la présence d’un rotor à couteaux doit inciter à surveiller de plus près la machine, prévient-on chez Krone, surtout dans les terrains siliceux. Et on n’oublie pas bien entendu les broyeurs sous flèche, encore plus sensibles.
Sauver sa peau
Si malgré toutes ces précautions un feu se déclare, la prudence veut qu’on sauve d’abord sa peau. Les agriculteurs ayant vécu un incendie disent tous que la situation peut très vite tourner à la catastrophe.
S’il s’agit vraiment d’un départ de feu, un extincteur peut en venir à bout. Groupama préconise un extincteur à eau pour intervenir sur des incendies de paille. Certains le complètent sur les chantiers de pressage par une réserve d’eau et une pompe embarquée à l’avant du tracteur. De l’eau peut également être amenée en bord de parcelle à titre préventif, dans une citerne ou dans un pulvérisateur équipé d’une lance. Après, c’est l’affaire des pompiers.
Le fait de disposer dans la parcelle d’un tracteur avec un outil de travail du sol attelé dessus est précieux, comme l’explique Groupama, afin de «tourner autour du foyer pour limiter la propagation du feu en attendant l’arrivée des pompiers».
Peut-on dételer la presse qui brûle pour sauver le tracteur? A condition d’être dans le bon sens du vent, on peut essayer, mais les fumées toxiques et la chaleur peuvent vite se révéler un obstacle. Sur ce point, les attelages traditionnels avec anneau et broche gardent un avantage sur les nouvelles boules K80, plus longues à dételer.
Il existe aussi une flèche à décrochage rapide commandé en cabine, chez Scharmüller, malheureusement assez chère. Enfin, il faut savoir que traverser un feu en tracteur est plus risqué qu’avant. Chez Claas, on prévient: «Les nombreux capteurs qui équipent les tracteurs récents sont sensibles aux flammes. Ils peuvent les interpréter comme un défaut et vous immobiliser sur place.»
Etat d’alerte dans l’Oise
Le Bassin parisien a été durement touché par les feux de champs en 2019, avec notamment un agriculteur décédé dans son tracteur. Les organisations agricoles, OS, pompiers et préfectures ont mis en place un dispositif particulier pour 2020.
Ainsi, dans l’Oise, les agriculteurs sont invités à signaler les incendies via une application conçue au départ pour les zones propices aux feux de forêt: Prévention Incendie. Elle géolocalise l’appel afin de permettre aux pompier d’aller directement au bon endroit.
Météo France va éditer des bulletins d’alerte dédiés. Au niveau «orange», il faudra prévoir un matériel de déchaumage ou une réserve d’eau dans la parcelle. Au niveau «rouge», les agriculteurs et entrepreneurs recevront une alerte par SMS et le battage sera interdit en pleine journée, il faudra attendre la nuit. De leur côté, les pompiers vont pré-positionner des véhicules et des réserves d’eau sur le territoire. Ils disposeront d’un avion bombardier d’eau. Au total, un dispositif très sérieux et multi-acteurs.
Toutes les précautions déployées par les agriculteurs ne suffiront malheureusement pas. Le feu peut aussi venir de l’extérieur, notamment par la circulation routière.
En complément