Au Canada comme en France, les études le montrent : a contrario des systèmes conventionnels qui minéralisent rapidement une faible quantité de biomasse, les systèmes sous couvert permanent minéralisent lentement une grande quantité biomasse, avec à la clé une production d’humus plus importante. Rappelons que pour augmenter le taux de matières organiques dans un sol, il est nécessaire d’apporter au sol plus de biomasse que celle qui a été minéralisée. Toutes les cultures de couverts végétaux n’auront donc pas le même intérêt selon les rotations en place.
Couverts végétaux : intéressants économiquement
Les objectifs liés aux couverts végétaux sont agronomiques, mais aussi économiques et sanitaires. In fine, l’intégration des cultures de couverture dans la rotation doit être intéressante économiquement, d’une part en augmentant la productivité des sols grâce à un meilleur taux de matières organiques, et d’autre part en réduisant les coûts de production via des économies sur les intrants (fertilisants, herbicides, fongicides et insecticides).
Quelle légumineuse choisir pour ses couverts végétaux?
Commençons par la famille des légumineuses et les trèfles. A réserver aux sols argileux, car tolérant bien l’humidité mais étant sensible à la sécheresse, le trèfle rouge peut être semé dans les céréales à 5 kg/ha (semis simultanée avec la céréale) ou au stade tallage à 10-12 kg/ha. L’inconvénient du trèfle rouge réside dans sa relative lenteur de développement, qui laisse une chance aux adventices d’occuper l’espace. Deux alternatives existent : le trèfle blanc qui tolère bien la sécheresse et est résistant au piétinement (à semer à 3 kg/ha), ainsi que le trèfle incarnat qui contribue à la fertilisation azotée de la culture suivante à hauteur de 60 à 70 kgN/ha (à semer à 12-15 kg/ ha en simultanée d’une céréale de printemps ou au printemps dans une céréale d’automne en post-levée après traitement en herbicide).
Autre légumineuse intéressante, la vesce, qui présente l’avantage de bien se développer à l’automne quand les autres plantes ont déjà stoppé leur croissance et de redémarrer vite au printemps. En revanche, la vesce n’est pas très compétitive au début de sa croissance. Une solution peut donc être de l’associer au printemps avec un seigle ou une avoine (60 kg/ ha). Attention, la vesce velue craint l’humidité et ne survit donc pas dans les cuvettes.
Le seigle, un allié de choix
Parmi les graminées, le seigle d’automne est très utilisé au Canada. Il ne craint ni les sols humides et acides, ni les conditions froides. Un couvert qui peut, au besoin, être utilisé en couverture et détruit au printemps (il est notamment un excellent contrôleur du développement des adventices), ou être utilisé en fourrage en le récoltant avant épiaison, ou encore être récolté comme une céréale avec en plus une production abondante de paille. De l’autre côté de l’Atlantique, le seigle est vendu entre 240 et 280 €/t.
Selon Action Semis Direct, le seigle « est la seule espèce qu’on peut envisager de semer après une récolte de maïs et en précédent au soja. » La même source met cependant en garde : « Le semis de maïs dans un couvert de seigle est risqué puisque la décomposition des résidus de seigle exige beaucoup d’azote et risque de créer une carence dans le maïs. » Autre ombre au tableau : le seigle risque de transmettre le piétin au blé suivant.
Tout comme les Etats-Unis, le Canada autorise l’usage des OGM ‘Round-up ready’, ce qui permet de détruire le seigle chimiquement juste après le semis ou après la levée si la culture est tolérante au glyphosate. « Il n’est pas recommandé de détruire le seigle dans les jours précédant le semis de la culture, car il va s’écraser et garder l’humidité au sol. »
A retenir : le pic de libération d’azote est obtenu deux mois et demi après le brûlage.
Autre graminée intéressante pour les couverts végétaux : le ray-grass, un couvert qui supporte bien la compétition avec le maïs. Il peut donc être semé à la volée (15 kg/ ha) entre les rangs de maïs (stade 6 à 8 feuilles). Son principal intérêt est d’ordre pédologique : il représente une bonne protection contre l’érosion et améliore la portance à la récolte. En revanche, s’il est mal contrôlé, il peut devenir une mauvaise herbe. Un risque à prendre en compte en sachant qu’il est difficile à détruire chimiquement.
Radis et/ou moutarde ?
Dans la famille des crucifères (de bonnes cultures de couverture à introduire avant l’avoine ou le blé), le radis fourrager est lui aussi largement utilisé au Canada. La variété ‘Tillage Radish’ est plébiscitée pour sa racine pivotante droite et longue, capable de descendre jusqu’à 75 cm. Deux intérêts pour les fermes locales : la libération d’un herbicide naturel lors de sa décomposition qui détruit les adventices autour de lui, et « l’effet chasse d’eau au printemps : l’eau de fonte des neiges s’écoule très rapidement à travers les trous que laissent ses grosses racines lorsqu’elles se décomposent, permettant au sol de se réchauffer plus rapidement. »
Le radis fourrager est efficace contre les nématodes, facilite la lutte contre les adventices annuelles hivernales et améliore le rendement de la culture suivante grâce à une importante libération d’azote au printemps.
De son côté, la moutarde facilite le semis direct en laissant peu de résidus au sol. Elle est peu coûteuse, étouffe les légumineuses et est efficace contre les nématodes à condition d’être broyée et enfouie. Il est recommandé de prévoir un apport de fumier pour son bon développement. « Incorporée dans la rotation après un blé et avant une culture de pommes de terre, la moutarde blanche réduit, par son effet fongicide, les problèmes de verticilliose dans la pomme de terre », précise Action Semis Direct.
Le sarrasin : la lutte contre les adventices
Passons aux polygonacées, avec le sarrasin : une culture adaptée aux sols pauvres, mais qui n’appréciera pas les sols compactés ou trop secs ou trop humides. Son intérêt est son action structurante des sols via son important réseau de racines. Le sarrasin est par ailleurs un bon contrôleur des adventices et est capable d’assimiler du phosphore que les autres plantes ne peuvent pas et le restitue par la suite.
Enfin, appartenant à la famille des hydrophylacées, la phacélie est utilisée en plante fourragère, et préconisée par Action Semis Direct en intercalaire dans le maïs grain ou en dérobée après les céréales. Ses atouts : la phacélie est capable d’améliorer la structure des sols via son système racinaire, d’absorber le potassium du sol pour le restituer à la culture suivante et est efficace contre les nématodes. Concernant son action sur les adventices, la phacélie est une culture qui démarre lentement, donc sensible à la compétition à ses débuts. En revanche, une fois en place, son important feuillage est capable de contenir même le chiendent. Si elle peut être semée en association avec du sarrasin (à raison de 8 kg/ ha de phacélie et 40 kg/ ha de sarrasin), il est préconisé d’utiliser un semoir car les semences sont photosensibles et ne germent pas à la lumière. A noter : il est possible d’utiliser la phacélie en couvert hivernal dans les vignes et les vergers.
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