Le Crédit agricole tient les comptes d’une grande majorité des exploitations agricoles. Il exerce par ce biais un rôle de vigie sur le paysage financier agricole. Un paysage fortement bousculé par une succession d’aléas. Les contreperformances de certaines filières, notamment en céréales, et le manque de confiance dans l’avenir ont des conséquences directes sur les montants des prêts accordés par l’organisme bancaire : 4 886,6 milliard d’euros de prêts agricoles ont été réalisés au premier semestre 2023. Contre 4,185 pour les 6 premiers mois de 2024. Quelle conjoncture agricole pour fin 2024 ?
Sombres perspectives sombres pour les céréales
Tout d’abord, les fermes céréalières investissent moins que l’an passé. Les emprunts contractés auprès du Crédit agricole par les agriculteurs, au premier semestre 2024, baissent par rapport au premier semestre 2023. En particulier pour :
- Le foncier : -95 millions d’euros.
- Les bâtiments : -65 millions d’euros.
- Et surtout le matériel : -338 millions d’euros.
Jean-Christophe Roubin, directeur du marché de l’agriculture au Crédit agricole SA, ne promet pas des lendemains enchantés pour les céréaliers. En cause : les perspectives de production dans plusieurs bassins de production comme la Russie, « avec des volumes bien meilleurs qu’attendus ». Idem pour les Etats-Unis. Parallèlement, les flux d’achats sont au ralenti. « Cela pourrait entraîner des conséquences baissières sur les prix », indique l’analyste du Crédit agricole.
Conjoncture agricole favorable pour les produits laitiers pour fin 2024
« Les perspectives pour 2024 sont plutôt bonnes, avec un retour de la consommation de l’ensemble des produits laitiers. Ce qui devrait compenser l’absence d’augmentation tarifaire cette année » indique Jean-Christophe Roubin.
Le souci à plus long terme est le renouvellement des générations : « La filière a besoin de pérenniser la ressource laitière sur tout le territoire afin d’alimenter les outils industriels et maintenir la production nationale. »
Des cours du porc bien orientés
« Si le déséquilibre actuel tend à laisser penser que les prix des porcs devraient rester élevés, il convient de s’interroger sur la capacité de l’Espagne à réaliser ses exportations à destination des pays tiers, et notamment la Chine, de moins en moins acheteuse. Dans ce cas, le report d’une partie de ces exportations vers les autres pays de l’UE, notamment la France, viendraient perturber les marchés », observe Jean-Christophe Roubin.
L’analyse agricole demeure cependant assez optimiste : « Il nous semble très probable que les prix restent assez élevés. » Un contexte qui devrait inciter l’ensemble de la filière à continuer d’investir dans l’environnement, le bien-être animal ou la restructuration des abattoirs…
Hausse de la consommation de poulets de chair…
Les perspectives sont bonnes également pour la consommation de volaille de chair en France, selon le Crédit agricole. Les raisons ? « La volaille bénéficie d’atouts structurels importants tels que son prix, son image de produit sain, facile à cuisiner, neutre en goût et en texture, sans interdit religieux. » On s’attend à une hausse de la consommation française de près de 2% par an. Cependant, compte tenu de la concurrence, la pression sur les prix de vente est vive. Aujourd’hui, la moitié de la consommation française de poulets est importée. Alors que les volailles Label et Bio sont négativement impactées par leur coût de production et leur prix élevés.
…et de la consommation d’œufs
La hausse concerne aussi la consommation en œufs et d’ovo-produits. Une question taraude cependant les acteurs de cette filière : « Si les engagements de tous les distributeurs vers les hors cage en 2025 ne semblent pas remis en cause, une question se pose sur la capacité de la filière française à tenir ces engagements. Le départ potentiel d’éleveurs de poules en cage en 2026 pourrait générer une baisse importante de production et déclencher le recours aux importations », analyse Jean-Christophe Roubin. « Sur long terme, nous attendons le développement des œufs alternatifs (issus de poules au sol), qui sera le prochain standard et du plein air hors label rouge. » En revanche, les œufs label rouge et surtout bio, jugés chers, n’auront pas la même dynamique, prévient-il.
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