Angoisse robotique : « sans tracteur, ne me restera-t-il que la paperasse? »

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Angoisse robotique : « sans tracteur, ne me restera-t-il que la paperasse? »

Pierre Compère a animé un atelier à Innov'Agri sur la robotique agricole en productions végétales. Avec comme objectif de lever les freins.

L'expert Pierre Compère animait pour RobAgri* un atelier à Innov'agri, pour identifier avec les participants les freins à l'arrivée des robots agricoles dans les exploitations. 

La robotique agricole en France se fraie un chemin sur les exploitations agricoles. À Innov’Agri, des étudiants, leurs enseignants et des agriculteurs, sans expérience robotique « de terrain », ont exprimé leur ressenti sur la question face à Pierre Compère, qui animait pour RobAgri* un atelier sur le sujet.

Quel public avez-vous accueilli sur l’atelier ?

Principalement des étudiants de seconde du lycée agricole d’Auzeville (en Haute-Garonne) qui démarrent leur année par cette visite d’InnovAgri. On leur a proposé de participer à cet atelier. C’était particulièrement intéressant d’avoir de futurs acteurs du monde agricole, futurs salariés ou exploitants agricoles.

Ils ont bien joué le jeu et on était une cinquantaine, une soixantaine avec leurs enseignants. L’objectif était d’identifier tous les questionnements qu’ils pouvaient avoir, et qui facilitent, ou freinent, légitimement ou pas, leur vision de la robotique agricole en France. Je précise que nous avons limité le sujet à la robotique en productions végétales. En élevage, la robotique est déjà très présente.

Avez-vous identifié les freins à l’arrivée de la robotique agricole en France dans les exploitations ?

Il faut souligner qu’aucun n’avait réellement pris un robot en main auparavant. Ils ont formulé des idées reçues, mais aussi beaucoup de questions tout à fait légitimes. À l’instar du monde agricole en général, ils ont exprimé une confiance pas complètement consolidée dans les technologies robotiques.

Parce qu’il n’y a pas encore beaucoup de références techniques et technico-économiques largement partagées sur les robots. Ce en dépit des mises en marché et de leur présence effective dans les parcelles. Très vite également, la question des prix et de la rentabilité a émergé. Mais aussi, tout simplement, la question des capacités et des fonctionnalités : est-ce que concrètement les robots savent faire le job qu’on leur demande ? Et beaucoup de questions autour de la capacité à maîtriser la machine.

Du type : « suis-je assez compétent ? », « Puis-je réparer la machine ? »… mais aussi « mon environnement l’est-il ? » C’est-à-dire le distributeur, le technicien, le voisin… Ensuite sont venues les questions liées à l’environnement physique, les parcelles en dévers, accidentées, petites, irrégulières…

Et enfin, et c’est peut-être le thème qui est arrivé en premier chez ces jeunes, je retiens l’intervention d’un jeune qui a dit : « vous m’enlevez le tracteur, il ne me reste plus que la paperasse ».

On parle de plaisir ou de présence dans les parcelles ?

Les deux. Certains ont l’impression que l’on va remplacer les tracteurs par des robots, et que l’on va en conséquence les amputer d’une partie de leur métier. Là, pour le coup, je pense que c’est l’un a priori les plus discutables.

Parce que rien n’empêche un agriculteur, au contraire, de confier une tâche à un robot et de passer plus de temps à faire de l’observation.  À réfléchir à l’agronomie, à sa stratégie. Finalement, ce n’est pas parce qu’on enlève un tracteur qu’il ne reste que l’administratif. Si j’étais « marketeur », je travaillerais sur cet aspect : comment faire valoir le plaisir qu’il peut y avoir à gérer un robot, à le piloter, le réparer.

Au-delà du manque de références, ce plaisir n’est pas encore perçu. On est sur des ressorts psychosociaux. Le tracteur reste un fort marqueur social dans les champs, sur les routes et dans les rues. Et j’y reviens, on a des références. Pour acheter un tracteur ou une moiss’ batt’, on sait quels critères vérifier. Entraid propose des références comme les Rayons X qui servent à ça. Aujourd’hui, les robots ne bénéficient pas de la même confiance et c’est un des objets du Grand défi robotique mené par RobAgri*, de générer ces références.

*RobAgri, Association qui regroupe 90 acteurs du monde industriel, scientifique et agricole engagés dans le développement de la filière de la robotique agricole en France. RobAgri met en œuvre le Grand Défi de la Robotique Agricole. Lequel a pour vocation de rassembler tous les acteurs de la robotique, de l’amont à l’aval, fabricants d’agroéquipements et de robots, enseignants, chercheurs, les acteurs du développement et du conseil et les agriculteurs autour d’un même objectif : déployer des outils robotiques opérationnels dans les exploitations agricoles.

Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com

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