Incendies ou inondations : des risques aggravés par les friches
En cas de montées des eaux, la situation n’est pas meilleure : les fossés non entretenus et les parcelles sales freinent l’écoulement normal et l’évacuation des eaux. Enfin, au niveau agricole, elles ont aussi de gros impacts négatifs. Une fois “fermées”, embroussaillées, ces surfaces constituent des réservoirs à ravageurs pour les parcelles agricoles contiguës, d’où une recrudescence de la flavescence dorée par exemple.
Jacques Serres, président de la Fédération départementale de défense contre les organismes nuisibles (Fedon) déplore que “ces autoroutes de friches” amènent également les sangliers directement aux abords des villages. Et plus généralement, le sentiment d’abandon qui se dégage de ce paysage pose aussi un souci en termes d’image. En outre, les touristes commencent à l’exprimer.
À l’origine de l’abandon de ces parcelles viticoles et agricoles (qui va croissant), il y a les suites des campagnes d’arrachage des vignes de 2008 notamment. Mais également le vieillissement et la baisse de la population agricole, qui transmet ces parcelles à des héritiers peu concernés, parfois loin.
En cause aussi, la plus grande difficulté à rentabiliser une exploitation. Lorsque l’une d’elles “part” à l’agrandissement, les surfaces les moins fertiles, les plus difficilement accessibles, n’intéressent finalement personne. “Il n’y a pas d’intérêt financier à les cultiver”, résume Pierre Escande, président de la cuma de Villalier.
Baisse de production sensible
D’où un “mitage” progressif de la surface agricole audoise, et même un début de baisse de la production, sensible jusque dans les cuma. “Depuis quelque temps, nous le mesurons sur nos semis et nos récoltes, nos surfaces diminuent,” indique Pierre Escande.
Il estime également que les solutions reposent sur les activités traditionnelles, “vigne, élevage ovin, fruits secs ou oliviers, maraîchage à la marge, à condition d’aller chercher la rentabilité : il s’agit davantage de consolider l’existant. Et je suis persuadé que le levier le plus puissant reste le remembrement”, la rationalisation des parcellaires. »
Friches : un projet pilote pour penser “solutions”
La fédération départementale des cuma fait partie des interlocuteurs mobilisés par la Préfecture au sein d’un Comité de Pilotage, dédié à ces friches, pour plusieurs raisons.
Les responsables de cuma sont en capacité d’identifier les parcelles et surtout leurs propriétaires. Certaines cuma du département possèdent les matériels et la main-d’œuvre nécessaire à même de défricher et entretenir ces surfaces avec un coût compétitif.
La fédération a donc porté un projet pilote dont l’objectif était de remettre en culture des parcelles le plus rapidement possible, en fournissant des perspectives aux propriétaires.
Certaines de ces surfaces, rationalisées en îlots, pourraient aussi servir à fournir le foncier dont manquent les nouveaux agriculteurs pour s’installer, ou bien les Caves coopératives en manque de volume.
Dans les Corbières et le Minervois, des résultats
L’équipe de la fédération des cuma a identifié deux zones où ce type de friches se multiplient, à proximité de cuma bien pourvues en matériels. La première autour de Villalier et Villeneuve-Minervois, dans le périmètre de la cuma de Villalier. Et la seconde à Ferrals et Fontcouverte dans les Corbières, où travaille la cuma des 6 Terroirs.
En Minervois, l’équipe est parvenue à des contrats de remise en pâturage et à la mise à disposition de parcelles en culture de vigne.
Et dans les Corbières, sur les 26 propriétaires identifiés, 17 ont accepté d’être accompagnés. Des repreneurs ont aussi identifié parmi lesquels une éleveuse, un vigneron et la foncière d’installation Terre de Liens.
Pierre Escande, président de la cuma de Villalier, pose deux chiffres qui résument l’enjeu de l’entretien de ces friches.
- 60 à 90 €/ha : c’est le coût de l’entretien annuel d’une parcelle lorsqu’il est fait régulièrement
- 1500-2000€/ha : c’est le coût de la remise en culture d’une parcelle embroussaillée
Ces chiffres sont des données générales (issue de la cuma de Villalier et de CoPil de la Préfecture) qui demandent à être affinées en fonction du développement de la friche. “Il y a des surprises du côté des propriétaires”, confirme le président de la cuma, quand il s’agit de remettre une parcelle en état.” A prendre en compte aussi : “une parcelle propre intéresse toute de suite davantage les acheteurs potentiels.”