Très active dans les années 70, la cuma de Fos ne regroupait plus que cinq adhérents avant l’arrivée d’une nouvelle génération et une véritable renaissance en 1995. Ils sont aujourd’hui 29, répartis sur pas moins de 25 communes, du Comminges et Luchonnais, de la Barousse à la frontière espagnole. Un vaste territoire dont le caractère extensif s’explique en partie par une déprise agricole particulièrement sensible en zone montagne. Une déprise qui se traduit par un autre effet, clairement visible dans le paysage, et spectaculaire sur les photos d’un même site prises à un siècle d’intervalle: la progression des friches agricoles. Une progression qui affecte essentiellement les zones de transition, entre les villages et les estives.
Mais elle touche aussi souvent ces dernières. Et qui ne va pas sans poser de sérieux problèmes explique Jean-François Delvallez, président de la cuma. «Du fait de l’enfrichement, on assiste à une fermeture du territoire, particulièrement préjudiciable sur le plan agricole, en limitant les surfaces disponibles pour le pâturage et l’accès aux estives, mais aussi pour la fréquentation touristique.» Une stérilisation de l’espace et une limitation de son potentiel qui représente par ailleurs un frein supplémentaire à d’éventuelles nouvelles installations. Sans compter les risques d’incendie accidentel. D’autant, ajoute Jean-François Delvallez, «que dès que les friches agricoles progressent, il devient irréversible et la forêt s’étend.»
Fiches agricoles : Une gestion foncière problématique
Entre autres causes de ce phénomène, la maîtrise du foncier demeure un élément majeur, souligne Frédéric Artigue, vice-président de la cuma. Avec les groupements pastoraux et les associations foncières pastorales (Afp), la loi pastorale de 1972 visait à instaurer pour la montagne une gestion foncière de type «bien commun». En fédérant les divers acteurs, collectivités, propriétaires privés, dans une démarche homogène, le texte vise clairement à favoriser l’usage agricole de l’espace montagnard.
«Le problème réside justement dans le fait que cela exige, notamment pour les associations foncières, l’adhésion des propriétaires concernés, ce qui ne va pas de soi.» Si l’application de l’obligation de débroussaillage par les collectivités peut s’avérer plus facile, sa mise en œuvre par les propriétaires privés est d’autant moins évidente qu’il existe une multiplicité de propriétaires. Contre lesquels les communes peuvent hésiter à prendre des mesures coercitives. «Il faut aussi prendre en compte le fait que les jeunes générations, qui cherchent souvent à se débarrasser, pour des raisons fiscales, d’un foncier dont elles n’ont pas toujours l’usage, ne sont pas particulièrement motivées pour en assurer l’entretien…»
Robot broyeur : Un matériel adapté au terrain
La lutte contre les friches agricoles est ainsi devenue pour la cuma de Fos une question récurrente. En témoigne l’investissement sur des outils dédiés: trois broyeurs, dont un associé à une mini-pelle destinée à travailler dans les pentes. «Mais son utilisation demeure difficile si la pente est trop importante.» La recherche d’un matériel plus adapté est donc désormais à l’ordre du jour. Pour Cécile Ruau, responsable du secteur Comminges de la direction de l’agro-écologie du Conseil départemental, celui-ci peut prendre la forme d’un robot-broyeur télécommandé.
«La mission de mon service concerne l’accompagnement des agriculteurs, notamment pour la transition agro-écologique. L’entretien de l’espace, avec la réouverture des milieux embroussaillés, représente un thème fort de notre action, et les cuma sont des partenaires naturels de celle-ci.» Au terme de démonstrations de différents matériels, il apparaît qu’un robot s’avère le plus adapté. «La capacité d’intervenir sur de fortes pentes, avec une commande à distance assurant une parfaite sécurité pour le pilote, une faculté d’hélitreuillage, la possibilité d’un travail précis préservant les zones naturelles protégées et les enjeux cynégétiques permet de valider ce choix.»
Restait à trouver une structure susceptible d’accueillir cet équipement, après une étude de faisabilité réalisée par la fdcuma, fortement impliquée sur ce dossier aux côtés du Conseil départemental. La cuma de Fos, au cœur de la zone montagne, pouvait représenter un bon candidat. Mais le potentiel d’engagement restant insuffisant, compte-tenu d’un optimum de 150ha, la cuma de Saint-Gaudens s’est au final portée volontaire. Son périmètre départemental permettra d’associer des agriculteurs de tout le territoire, ainsi que les collectivités. «Nous n’excluons pas d’adhérer au groupe créé par celle-ci dans cette perspective, soit au titre de la cuma, soit à titre individuel», affirme Jean-François Delvallez.
Premiers chantiers au printemps/été 2020
Après une première réunion pour l’organisation pratique et la définition des modes de fonctionnement d’une section entretien de l’espace au sein de la cuma de Saint-Gaudens, une rencontre des partenaires associés au projet doit permettre de formaliser la gouvernance de celui-ci et le rôle de chaque partenaire. Un chantier de démonstration est prévu pour janvier 2020, afin de tester les différentes marques et modèles de robot. La création d’une section robot-broyeur au sein de la cuma de Saint-Gaudens devrait intervenir au premier trimestre 2020, avec l’acquisition d’un matériel (un investissement d’environ 60.000 à 70.000€) dans la perspective des premiers chantiers dès le printemps ou l’été prochain.
«Il s’agit d’un projet structurant d’envergure, qui doit permettre de maintenir une pression de pâturage suffisante, en adéquation avec les besoins fourragers et la dynamique de la végétation. Nos conseillers agro-environnement seront mobilisés pour accompagner les demandeurs et utilisateurs de cet outil», indique Cécile Ruau. Une réflexion pourrait être engagée avec la chambre d’agriculture pour le montage d’une Maec (mesure agro-environnementale et climatique) ‘ouverture et maintien de l’ouverture des milieux’, afin de soutenir les acteurs engagés dans cette démarche.
Article extrait du numéro spécial Entraid’ Haute-Garonne/Ariège – décembre 2019.