Rebâtir une souveraineté alimentaire en France

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Rebâtir une souveraineté alimentaire en France

L'épidémie de Covid-19 aura montré les faiblesses de la souveraineté alimentaire de la France.

Surproductions, gaspillage, pénuries... la crise pandémique a mis à rude épreuve la chaîne alimentaire et montré une dépendance croissante de la France à certains produits importés: sept piliers du monde agricole, coopératives, banques, agriculteurs, assurances et sécurité sociale, se sont dits prêts à "rebâtir une souveraineté alimentaire" pour le pays.

« L’histoire retiendra de la crise du Covid-19 qu’elle fut un révélateur de la grande fragilité de nos sociétés face à l’aléa sanitaire, à la difficulté de bâtir une réponse internationale forte et concertée et à une mondialisation ayant conduit à déléguer à des tiers la production de certains biens, même lorsqu’ils étaient de première nécessité », indique une tribune commune publiée mercredi dans le quotidien L’Opinion.

« Rebâtir une souveraineté alimentaire sera le chantier d’une génération », affirment en s’y déclarant « prêts » les syndicats FNSEA et Jeunes agriculteurs (JA), la Confédération nationale de la mutualité, la coopération et du crédit agricoles (CNMCCA), la Coopération agricole, la Fédération nationale du Crédit agricole (FNCA), Groupama assurances mutuelles, la Mutualité sociale agricole (MSA) et l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA).

Les sept organisations proposent un « pacte de confiance » avec la société pour développer la production alimentaire, tout en respectant les objectifs climatiques et environnementaux.

Elles citent Emmanuel Macron qui affirmait le 13 avril le besoin de « rebâtir une indépendance agricole, sanitaire, industrielle et technologique française ».

Elles soulignent aussi les « fragilités structurelles » qui « menacent notre indépendance alimentaire »: depuis vingt ans, la production agricole « stagne » alors que la population a augmenté de 11% et que le nombre d’agriculteurs a baissé de près de 15% en dix ans.

Pendant le confinement, la France, pays exportateur de blé, a manqué de farine dans ses supermarchés à cause essentiellement de son manque de compétitivité industrielle et de problèmes logistiques, la fabrication des sachets ayant souvent lieu en Allemagne ou en Italie, plus compétitives.

Parmi les freins à la compétitivité, la FNSEA cite la taille des exploitations agricoles, plus petites qu’en Allemagne, la fiscalité, et les distorsions de concurrence avec les pays voisins (différences de taux d’irrigation, de coût du travail, d’utilisation de produits phytosanitaires).

Investir dans des vergers et des serres

Sous l’effet des aléas climatiques, les rendements des récoltes sont « de plus en plus incertains » alors que les importations de produits alimentaires « low cost » augmentent « plus vite que nos exportations », ajoute le texte.

Les signataires jugent « indispensable » de « développer et, lorsque cela est nécessaire, relocaliser nos filières de production » en « investissant dans les outils de production et de transformation, mais aussi en assurant la transparence sur l’origine des produits ».

Tout en pariant sur la future politique agricole commune européenne pour mettre ces objectifs en musique, la FNSEA estime qu’il « faudra un volet agricole au moment du grand plan d’investissement du gouvernement », a dit sa présidente Christiane Lambert lors d’un point presse vidéo.

« En fruits et légumes, notre taux de dépendance aux importations est de 46%! Il va falloir investir dans des plantations, des serres et des vergers ainsi que dans des outils de transformation », a souligné Sébastien Windsor, président de l’APCA au cours d’un entretien téléphonique, « car on en manque ».

Dans l’immédiat, face à la mise à l’arrêt de commerces, restaurants, cantines, les chambres d’agriculture et la FNSEA citent une douzaine de secteurs agricoles en grande difficulté qui ont besoin de soutien immédiat: les fleurs et plantes, le tourisme à la ferme, l’élevage équin, la viticulture et cidrerie, les fromages AOP, le lin, les filières veaux, canards, pigeons, sucre (éthanol), et celle des pommes de terre. Cette dernière est très affectée par la fermeture des fast-food, qui a laminé la consommation de frites dans le pays.

Le PDG de Danone Emmanuel Faber a de son côté jugé mercredi devant la commission économique du Sénat que l’agriculture allait « nécessairement vers des réarbitrages ».

« Entre les subventions qui ont été données, les programmes qui ont poussé à une certaine forme d’agriculture et la spirale vers le bas des prix, nous avons habitué les Français à une alimentation qui est de qualité, mais qui ne permet pas de faire vivre sur le long terme la filière qui les approvisionne », a-t-il souligné.

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