Les chiffres claquent : Claudine Murat travaille pour le service références de la Chambre d’agriculture de l’Aveyron. Son intervention repose sur les données qu’elle recueille auprès d’agriculteurs qu’elle suit de près, notamment via l’outil « bilan travail », et c’est édifiant. « Sans prendre les extrêmes, en bovin viande on a des temps de travail qui s’étalent de 20 à 80h/UGB, tout comme en ovin lait. En bovin viande, ça va de 15 à 45. En ovin viande, on a toute la gamme. »
Organisation et temps de travail
Claudine Murat interroge le « collectif de travail », qui regroupe le chef d’exploitation ou les associés, les bénévoles (encore nombreux en Aveyron) et les éventuels salariés, remplaçants… «Quand on regarde des systèmes qui fonctionnent bien, on s’aperçoit que le travail d’astreinte représente 55% du temps de travail, le travail de saison environ 10% et le temps disponible calculé (le reste) représente environ un tiers. C’est donc bien sur l’astreinte qu’il faut gagner du temps», analyse la conseillère.
« D’où viennent les écarts ? Pour partie des équipements, mais pour grosse partie de l’organisation et de la volonté d’organisation des personnes. C’est déjà là qu’on peut remettre en cause les habitudes. Gagner 10h/UGB, c’est 2h par jour de travail d’astreinte pour une cinquantaine de laitières. Deux heures par jour! De même, chez les bovins viande, gagner 5h / UGB, ça paraît raisonnable. C’est une heure par jour de gagnée. »
« Lors une précédente journée organisée par le réseau départemental des Cuma, nous avions évoqué ce sujet : et nous étions arrivés à la conclusion qu’un quart d’heure de traite de moins par jour, ou alimenter une fois par jour au lieu de deux, c’est gagner 180h /an. On avait comparé ça à acheter un andaineur un peu plus grand ; c’est gagner 6 heures par an. A méditer ! » insiste-t-elle en souriant.
Bilan travail
Ce type d’évaluation, assez simple et rapide, selon la conseillère, est appliqué à l’ensemble des personnes qui travaillent sur une exploitation. « Il permet déjà de se questionner sur le temps que l’on passe à faire tel type de tâche. C’est une anecdote, mais il arrive que des personnes arrivent en retard lorsque nous faisons ces bilans. Et à chaque fois elles rectifient : « je fais beaucoup plus que ça ! » Nous sous-estimons toujours ce que font les autres. »
L’évaluation permet ensuite de se comparer à des repères. Avec des moteurs un peu différents les uns des autres, car, rappelle la conseillère, « le travail recouvre aussi une dimension d’identité personnelle et professionnelle », chacun ayant sa vision et ses motivations. »
« Dans une étude financée par le Casdar, plusieurs profils d’éleveurs ont été retrouvés. C’est volontairement caricatural », indique Claudine Murat :
- les méticuleux : ne comptent pas leur temps, volonté de tout maîtriser, visent l’excellence)
- les organisés : recherche de temps libre, apprécient de travailler à plusieurs.
- les simplificateurs : objectifs? temps libre et d’efficacité technico économique
- les Gestionnaires : qui s’appuient plus sur l’efficacité par l’équipement, sont à l’affût de l’évolution
- les entrepreneurs: qui s’appuient plus sur du salariat, sont dans l’optimisation maximale du travail.
« Les cuma, qui amènent de la dynamique, de la stimulation, différents services aussi, lorsqu’elles portent un projet de salarié en commun, doivent prendre en compte la diversité de ces profils : pour les « méticuleux », la sécurité sera le moteur dans ce projet. Pour les « organisés », ce sera de travailler avec quelqu’un d’autre. Pour les « simplificateur », ce sera d’aller faire autre chose. »
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