Le prix pousse à mieux acheter et, surtout, à mieux utiliser

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Le prix pousse à mieux acheter et, surtout, à mieux utiliser

Maximiser les temps de fonctionnement du matériel doit être un axe de travail.

Le prix du tracteur agricole, en particulier, a bien renchéri. Cette évolution nécessite d’adapter les méthodes d’acquisition mais il existe aussi de puissants leviers de maîtrise des coûts quant à l’utilisation.

La hausse des prix est flagrante et l’analyse des investissements de cuma pose un chiffre : + 23 %. C’est la différence entre le prix moyen des 57 nouveaux tracteurs des cuma dans les Pays de la Loire sur 2023 et la moyenne des 64 investissements en 2022. Par comparaison, l’évolution entre 2021 et 2022 représentait par exemple 5 %, cela correspondant au niveau régulièrement constaté auparavant. Dans le détail, les tranches de puissances qui concentrent le plus grand nombre d’acquisitions par les cuma sont les tracteurs de 150 à 179 ch et de 180 à 249 ch : 44 achats au total sur 2022 et 41 sur 2023. Pour les premiers, le tarif ramené à la puissance passe d’une moyenne de 716 €/ch en 2022 à 874 €/ch en 2023. C’est donc une hausse constatée de + 22,1 % pour cette catégorie. Les nouveaux tracteurs de 180 à 249 ch quant à eux se sont achetés + 9,3 % plus cher dans la région. La moyenne des tarifs passant de 703 €/ch en 2022 à 768 €/ch en 2023 pour cette gamme de puissance.

Bernard Gonnet, consultant qui s’appuie sur une carrière dans l’univers du camion routier, intervient auprès de la centrale d’achats Camacuma. Il constate : « Aujourd’hui le marché chute. En conséquence d’une forte diminution des volumes de vente de tracteurs, on peut s’attendre à voir une stabilisation des prix sur les 3 ou 4 ans qui viennent. Voire des baisses. »

S’organiser pour négocier

En attendant, les hausses du passé sont des signaux qui doivent pousser les utilisateurs de machines à l’adaptation. Stéphane Chapuis, responsable du service Agroécotech de la fncuma, confirmait au printemps dernier (Entraid n° 474 – avril 2024) : Au niveau national, « nous constatons une hausse du prix d’achat des tracteurs par les cuma de 32 % en l’espace de deux ans ». Bernard Gonnet compare les ordres de grandeur d’autres secteurs : « Pendant ce temps, l’augmentation dans le secteur des travaux publics n’a peut-être été que de 20 % et de seulement 15 % dans le transport routier. Tous les fournisseurs ont cherché à passer des hausses ces dernières années. La différence se joue sur le fait que les vendeurs ont plus ou moins de marge de manœuvre pour que le client les accepte. En agriculture, les achats se font au détail, à un concessionnaire local. Dans le BTP, il y a de grands groupes qui n’acceptent pas les hausses, tandis que les petites structures louent leurs matériels plus souvent qu’elles ne les achètent. »

L’agriculture aurait donc « tout un système à changer ». À commencer par le lieu d’achat : « Si les cuma veulent réduire leurs prix d’achat de façon significative, il est évident qu’elles doivent négocier avec les constructeurs, directement. » Et d’après l’observateur, avec le millier de tracteurs qu’elles signent annuellement, elles ont à portée de main un levier avec lequel elles pourraient générer une réelle rupture. « À condition d’agir ensemble », précise-t-il.

Le consultant dresse des parallèles entre l’agriculture et le transport. « Dans les deux cas, nous avons un engin qui a des roues, un moteur, un poste de conduite, etc. On y retrouve des technologies similaires et qui évoluent avec l’électronique. » Au-delà des similitudes de leurs tracteurs, Bernard Gonnet se souvient : « En remontant suffisamment loin dans l’histoire, les transporteurs étaient un peu comme les agriculteurs aujourd’hui. Il s’agissait d’acteurs qui s’équipaient tous indépendamment les uns des autres. Désormais, ce sont les achats des grandes flottes de transport internationales qui font le marché, il n’y a pratiquement plus de petits artisans transporteurs. Les achats se font par grosses quantités aux fabricants, avec des contrats-cadres. Tout cela a un impact fort sur le prix d’achat, comme sur les coûts d’entretien. »

Un investissement se valorise

Pour autant, la négociation lors de l’investissement n’est pas le seul paramètre à travailler pour maîtriser les coûts. Adapter les réglages, optimiser la consommation ou encore organiser une maintenance prédictive efficace… « sont des leviers de maîtrise des coûts d’utilisation ». L’expert indique que : « Pour atteindre 30 % de réduction, il faut tous les actionner en même temps. Or les outils nécessaires existent aujourd’hui pour cela. »

Doubler l’utilisation du tracteur

Reste enfin le paramètre essentiel de l’intensité d’utilisation. « Il faut à tout prix utiliser plus les tracteurs qu’ils ne le sont aujourd’hui », insiste Bernard Gonnet. Certes, la saisonnalité et d’autres contraintes rendent utopique l’espoir d’atteindre la cadence du tracteur routier « qui travaille de l’ordre de 2 200 h à 2 500 h/an. Au lieu de 700 h actuellement, il faudrait au moins que le repère d’utilisation du tracteur agricole passe à 1 000 ou 1 500 h/an. En cela l’offre location d’usage de Camacuma est très instructive. Sa grille met particulièrement en avant le fait que plus le matériel fait des heures, moins il coûte aux adhérents. » C’est aussi tout l’objet des cuma, « une spécificité française très intéressante », grâce à laquelle les adhérents « mutualisent leurs coûts tout en gardant la dimension humaine des structures », souligne Bernard Gonnet.

Le tracteur de cuma était présent à la porte ouverte

Bien qu’il délègue une grande part des travaux nécessaires aux cultures, Quentin Béasse présente un coût de mécanisation très inférieur aux références (©Benoît Bruchet).

Quand le choix de délégation à la cuma est plus que rentable

En février dernier, un adhérent de la cuma de Ballots (53) organisait une porte ouverte pour présenter son équipement en robot de traite et repousse fourrage. « Nous en avons profité pour faire un focus sur sa mécanisation », se souvient Benoît Bruchet, directeur de la fédération des cuma de la Mayenne. Car l’exploitation laitière familiale reprise en 2021 affiche un coût de mécanisation bien inférieur aux standards : 73 €/1 000 l quand les références moyennes sont à 121 €/1 000 l. « Ce qui fait une différence, c’est le très faible investissement en matériels sur l’exploitation. Quentin privilégie l’amélioration de ses conditions de travail sur l’atelier laitier avec la robotisation », retient Benoît Bruchet. De plus, la cuma propose ses matériels, dont des tracteurs, avec des chauffeurs. Quentin Béasse délègue ainsi chaque année 150 heures. « Cela représente 70 % des travaux de son exploitation. » L’animateur conclut : « Il est un éleveur pleinement épanoui dans son métier, prêt à témoigner du rôle que peuvent avoir les cuma dans l’accompagnement des installations. »

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