Agé de 59 ans, M. Guillaume a présidé le groupe socialiste au Sénat d’avril 2014 à janvier 2018. Il avait alors annoncé son départ de la vie politique, pour prendre la tête du comité d’organisation chargé de piloter la Coupe du monde 2023 de rugby, avant de renoncer et de revenir au Sénat, au sein du groupe du Rassemblement démocratique et social européen. « Il a démissionné du groupe et du parti. Cela fait des mois et des mois qu’il donnait des signes à Emmanuel Macron », raconte un sénateur PS.
Conseiller de son lointain prédécesseur, Jean Glavany, de 1998 à 2002, M. Guillaume est un élu de terrain. Il a longtemps présidé le conseil général de la Drôme (2004-2015), un département rural. Il a été co-rapporteur du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt au Sénat en 2014.
Son nom avait été évoqué à plusieurs reprises lors du précédent quinquennat pour occuper cette fonction. Fidèle de François Hollande, M. Guillaume est élu sénateur de la Drôme en 2008. Premier vice-président du Sénat à partir de 2011, il fait l’unanimité au sein de ses collègues, avant de prendre la présidence du groupe socialiste en avril 2014.
Courant 2016, ce chantre d’une gauche « réformiste » se rapproche du Premier ministre, Manuel Valls, et devient son directeur de campagne pour la primaire socialiste. Il est l’un des rares « hollandais » à faire ce choix, dans une période marquée par une grande tension entre les deux têtes de l’exécutif.
« Opportuniste »
« Il rêvait d’être ministre. La rupture avec François Hollande vient de là. Il pensait entrer au gouvernement. Il a poussé très fort Manuel Valls, a commencé à dire dans les cercles politiques que François Hollande ne pouvait plus être candidat », raconte un sénateur PS.
Las, Manuel Valls échoue au second tour face à Benoît Hamon, au terme d’une campagne brouillonne marquée notamment par la proposition de supprimer le 49-3, dont l’ancien chef de gouvernement n’avait pas hésité à faire usage. « Didier Guillaume a dit: si tu annonces ça en matinale, on gagne la primaire », se souvient avec amertume un ancien conseiller de M. Valls.
« C’est un opportuniste nul. Il n’a fait faire que des erreurs à Valls », grince un autre. « Son problème est qu’il ne vit que pour être ministre, persuadé que son tour aurait dû venir plus tôt (…) Sur le fond, sincèrement, je ne l’ai jamais entendu formuler des propositions fraîches et innovantes où qu’il soit », déplore un troisième.
Bien avant le premier tour de la présidentielle, Didier Guillaume se prononce clairement pour une participation des socialistes à la majorité derrière M. Macron, ce qui ne l’empêche pas d’être réélu à la tête du groupe des sénateurs PS fin septembre 2017.
En janvier 2018, il annonce qu’il quitte la vie politique, alors qu’il est fortement pressenti pour prendre la présidence du GIP (Groupement d’intérêt public) de la Coupe du monde de rugby. Mais il y renonce finalement. Les statuts du GIP ne prévoient pas de rémunération pour ce poste et ne l’autorisent pas à rester sénateur.
L’épisode a laissé des traces localement. « Il s’est abîmé. Des gens se sont dits: il arrête la politique, il était socialiste et, maintenant, il veut aller chez Macron ? » Ami de M. Guillaume même s’il ne partage plus ses orientations politiques, cette source salue un « élu de terrain » qui a une « grande force de travail ». Passionné de rugby, M. Guillaume en a la carrure et le style. « C’est quelqu’un qui a forgé son identité politique sur un côté grande gueule. Il a un mode politique très loyal, parfois un peu brutal. C’est quelqu’un d’entier », décrit ce socialiste.
Dans un tweet, Manuel Valls s’est dit « heureux et fier de (la) nomination de (son) ami ». « Je n’oublierai jamais sa solidité politique et sa loyauté », a-t-il assuré.
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