Constructeurs et distributeurs de matériel, les liens qui impactent les agriculteurs

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Constructeurs et distributeurs de matériel, les liens qui impactent les agriculteurs

Entre constructeurs et concessionnaires agricoles, les liens tendent à se rapprocher avec des conséquences pour l'agriculteur et le marché.

Lors de l'assemblée générale de la frcuma Bourgogne Franche-Comté, Sylvain Brunier et Samuel Pinaud, sociologue et historien ont présenté une étude sur les liens qu'entretiennent les constructeurs de machines agricoles avec les concessionnaires. Leur évolution impactent directement l'agriculteur et les prix d'achat.

Depuis l’arrivée de la mécanisation dans les fermes, la technologie, mais aussi les modes de distribution des machines agricoles ont bien évolué. Pour cela, Samuel Pinaud et Sylvain Brunier, sociologue et historien, ont présenté leur étude lors de l’AG de la frcuma Bourgogne Franche-Comté. Ils ont ainsi étudié les évolutions des relations entre les constructeurs et les concessionnaires agricoles et leurs impacts sur la dynamique de marché.

Constructeurs et concessionnaires agricoles, un lien très étroit

Les agriculteurs évoluent dans un marché mature et voient donc le réseau de distribution se concentrer. « L’après-guerre et la mécanisation des exploitations a engendré une croissance exponentielle de la production et des ventes de matériel agricoles, rappelle Samuel Pinot. Jusque dans les années 70, où on remarque une saturation du marché. Il devient mature. » Si le nombre de matériels n’évolue plus, les puissances et tailles de matériel ne cessent de s’accroitre depuis.

Alors forcément, la configuration a bien évolué. Ces dernières décennies, on assiste à un resserrement des liens, voire une intégration de la filière. « Les marchands et réparateurs n’existent plus, tout matériel agricole neuf est mis en concession, ajoute le chercheur. Et les marges comme les stratégies sont pilotées par les constructeurs et leur service marketing. »

Crédits intégrés

Ainsi, un concessionnaire agricole augmentera sa marge s’il vend les matériels préconisés par le constructeur. Qui lui est équipé d’outils de suivi de marchés et il propose des services additionnels numériques ou financiers. « Alors qu’avant, le matériel était financé par des entreprises extérieures, principalement des banques. Aujourd’hui, on offre à l’acheteur des crédits intégrés ou des leasing, explique Sylvain Brunier. Ainsi, au même endroit, l’agriculteur peut acheter son matériel et son crédit. »

Forcément, les rapports de force changent dans ce type de relation commerciale. « Avec des financements souscrits par les distributeurs, les constructeurs connaissent encore mieux leurs clients ainsi que leurs envies, poursuit-il. C’est très utile pour eux. Cela leur évite de ne faire que des ventes ponctuelles, mais plutôt de proposer des renouvellements, des contrats de maintenance… »  Tout devient prévisible. Distributeurs comme constructeurs préfèrent échanger leur remise commerciale contre un financement compétitif.

Un environnement sain avec les constructeurs et les concessionnaires agricoles ?

Par ailleurs, si le décideur est bien conscient du mécanisme commercial qu’il subit, les décisions d’investissement restent parfois peu rationnelles. « Elles dépendent de trois grands ensembles, poursuit Sylvain Brunier. Il y a les normes et règles, mais aussi les expériences et les interactions avec l’environnement de l’agriculteur. » Or depuis plus de 40 ans, l’expertise tend à se diriger vers ceux qui vendent.

« À cela s’ajoute une fiscalité qui oriente les agriculteurs vers certaines décisions, ajoute Samuel Pinaud. L’agriculture dispose d’une fiscalité bien spécifique, mais qui incite aux investissements individuels. L’objectif de ces dispositifs est clairement d’orienter l’agriculteur vers une posture de chef d’entreprise. L’instrumentalisation de la fiscalité joue un rôle dans les stratégies commerciales. » À l’image de l’exonération des plus-values pour l’impôt sur le revenu et les cotisations sociales.

Des choix pas toujours rationnels

Des propos qui ont suscité de nombreuses réactions dans l’assemblée. Entre besoins de fiabilité, de robustesse et de confort en matière d’équipements, les investissements, si économiquement ne sont pas toujours réalistes, répondent aux problématiques du terrain.

Tous ont cependant déploré la hausse des prix. « On subit oui, mais notre premier conseiller est le commercial, lance Yves-Mary Houdmont, responsable de Camacuma. Est-ce qu’on fait confiance à Edouard Leclerc quand on fait nos courses ? » Une matinée qui aura fait réfléchir les agriculteurs sur les liens qu’entretiennent les constructeurs avec leurs concessionnaires agricoles.

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