Avec le dernier épisode de gel printanier, et la sécheresse, beaucoup d’agriculteurs français vivent à nouveau ce constat cruel: ils sont à la fois victimes et acteurs du changement climatique, sur lequel le dernier rapport du Giec vient d’être publié. Et ce n’est pas fini: ces épisodes de gel (tout comme les sécheresse, feux, inondations… dont les fréquences s’intensifient) sont aujourd’hui directement corrélés au changement climatique qui va encore s’amplifier.
A lire sur le site de l’IPCC: Changement climatique, il est temps d’agir. (en anglais)
Le message du dernier volet du rapport du GIEC (Groupement international d’experts pour le climat) est clair: si on veut un monde vivable dans les décennies à venir, il n’y a plus de temps à perdre. Agriculteurs et consommateurs sont sommés d’agir très vite.
Un message qui pourrait commencer à être entendus par les décideurs, puisque le coût de l’inaction climatique monte. Et que ne pas agir va clairement coûter plus cher que d’agir, selon les nombreux calculs effectués par le panel d’experts.
Les grands principes du rapport du GIEC
Voici donc les grands principes énoncés dans ce dernier volet du rapport du GIEC, en relation avec l’usage des terres.
Pour les experts du GIEC, « l’intensification durable [des pratiques agricoles, ndlr], le changement de régime alimentaire et la réduction du gaspillage pourraient améliorer l’efficacité et réduire le besoin de terres agricoles, et sont à ce titre critiques pour mettre en place des actions de reforestation, de restauration des écosystèmes. »
Ce que cela signifie? Le maintien et la restauration des écosystèmes « puits » est la mesure la plus efficace pour stocker les gaz à effet de serre. On parle là des forêts, milieux humides, bords de rivière, écosystèmes côtiers, prairies. Mais aussi savanes et mangroves sous d’autres latitudes. Les agriculteurs, en tant qu’acteurs territoriaux, gèrent une grande partie de ces espaces naturels riches, dotés d’un potentiel de stockage du CO2 majeur.
Après la préservation des milieux naturels, le changement de pratiques en agriculture constitue le second plus gros potentiel d’atténuation du changement climatique.
Dernier volet, là encore immédiatement mobilisable mais cette fois du côté « demande »: changer d’alimentation, pour aller vers davantage de protéines végétales, moins de viande et de produits laitiers.
Dans le détail
Dans le détail, le rapport met l’accent sur quelques mesures dont on connaît l’efficacité pour ce qui concerne le secteur agricole.
Si ces préconisations étaient respectées, et orientaient les décisions des pouvoirs publics à l’avenir, cela donnerait les évolutions suivantes:
- La sanctuarisation de certains écosystèmes: forêts, milieux humides, écosystèmes côtiers, prairies… qui restent, on l’a compris, l’arme numéro un pour stocker du carbone.
- Un virage alimentaire rapide vers beaucoup plus de protéines végétales, moins de viande et de produits laitiers.
- Une « intensification durable ». C’est à dire des restrictions au niveau des intrants et le recours aux nouvelles technologies (décarbonées, robotiques, biologiques et biotechnologiques) pour continuer à assurer des rendements élevés.
- Un fort développement de la production d’énergies renouvelables allant de pair avec une électrification des usages.
- Le contrôle accru des pratiques émettrices de méthane (élevage de ruminants soumis à absorption d’inhibiteurs de méthane par exemple) et de protoxyde d’azote (épandages, apports d’engrais azotés…).
Une bonne et une mauvaise nouvelle
La bonne nouvelle du rapport du GIEC, c’est donc que tout le monde a déjà toutes les cartes en main. La mauvaise nouvelle, c’est qu’il n’y aura pas de technologie magique pour sauver le monde.
Le dernier volet du rapport enfonce donc le clou:
Oui, l’agriculture est un secteur clé puisqu’elle émet et stocke du CO2.
Oui, l’agriculture est aussi le secteur le plus émetteur en méthane et No2.
Et oui, les agriculteurs ont un rôle clé sur le territoire, ce qui en fait des acteurs de premier choix dans la lutte contre le changement climatique. Au côté des consommateurs.
Le degré d’attention dont bénéficient aujourd’hui les pratiques des agriculteurs n’est donc pas prêt de diminuer.
Enfin, à lire sur cette thématique:
Résilients au changement climatique.
S’adapter au changement climatique sans compromettre sa rentabilité.