Les vendanges ont commencé au Domaine du Champ de Soeurs, sur la commune audoise de Fitou. La petite équipe -la famille Maynadier accompagnée par 6 salariés- récolte les raisins à la main. Entretien avec Laurent Maynadier.
Quand avez-vous démarré les vendanges cette année?
On a commencé les vendanges lundi 25 juillet. Je pensais qu’on attaquerait plus tôt. Avec la chaleur la plante s’est bloquée et donc on a attaqué « que » le 25 juillet.
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Vous avez eu un blocage au niveau des maturités?
Léger mais on commençait à le sentir… pour moi la plante était capable d’aller beaucoup plus vite. Il n’y a pas eu vraiment de blocage de maturité, mais on sent qu’elle touche ses limites. On n’a pas d’eau depuis 4 mois ici.
Comment se passe cette phase de vendanges jusqu’à présent?
Pour le moment ça se passe bien. On est sur les premières journées, pour nous en plus, on n’est pas sur un milieu familial mais presque, parce qu’on n’a que 6 salariés avec nous, le noyau ce sont des personnes qui viennent au printemps, qui travaillent avec nous. Donc le premier jour on cueille, on mange ensemble, le second jour il y a aussi différents médias qui sont là, il y a un côté un peu festif. Tout le monde est content de se retrouver.
C’est un peu tôt, quand même, le 25 juillet?
Le fait qu’on cueille au 25 juillet ou au 5 août, bon, ça fait un peu parler mais ça n’est pas très très grave en soi. Par contre, on ressent bien que cette avancée est réelle. Depuis 10 ans, on vendange de plus en plus tôt. Sur 10 ans, on a vendangé trois fois en juillet. Et c’est en train de s’accélérer, à chaque fois. un coup on a vendangé dès le 29 juillet, le coup d’après le 27 et là on est au 25.
Est-ce que c’est aussi le cas de vos voisins?
Pareil. Même si nous on est sur un profil de vins un peu particulier, sur cette gamme, c’est du muscat à petits grains, un cépage aromatique. Les muscats à petits grains étaient historiquement destinés dans notre zone à faire des muscats de Rivesaltes, vin doux naturel. Le marché a explosé il y a quelques années, on en produit très peu. On est généralement sur des arômes variétaux, et si on le récolte assez tôt, c’est très léger comme vin. Il y a ce côté « bourgeon de cassis », qu’on appelle aussi « pipi de chat ». ça se boit facilement, c’est reconnaissable. Et en récoltant tôt ces muscats, on n’est pas sur le bourgeon de cassis, on est sur des arômes agrumes et litchi, plutôt agréables, faciles à boire. Quand on le met sur la table, on le voit, ce sont les bouteilles qui partent très vite à l’apéritif. On est donc partis sur une idée d’un vin et on est sur un vin un peu particulier. Donc les copains commencent à récolter de plus en plus tôt, parce qu’ils ont bien compris qu’il y a un intérêt. Mais on est, c’est vrai, très peu à le faire encore.
Ce sont donc des choix que vous avez fait en termes de vinification?
Oui. Nous sommes en plus sur des vins avec très peu de sulfites, sur les levures indigènes, donc sur le process de la cave, récolter les raisins avec des petits degrés en alcool, ça permet aux levures indigènes de coloniser la cave, de ne pas avoir de problèmes après sur les autres vins, qui arrivent ensuite, eux beaucoup plus trapus, chaleureux. C’est un mouvement progressif. Là on récolte des raisins qui sont entre 11,5 et 12°. On va récolter des rosés qui seront à peu près pareil et un premier rouge entre 12 et 12,5°. Tout doucement on arrivera sur des raisons entre 13,5 et 14°. Pour finir avec des raisins à 15° d’alcool. Cette succession de raisins nous permet à la fois d’avoir de rester sur des levures indigènes mais qui petit à petit colonisent la cave, et petit à petit d’autres colonisent des raisins plus riches.
Vous prenez donc en compte la contrainte climatique dans votre stratégie de cave?
Oui, mais seulement jusqu’à un certain point. Nous sommes dans un processus de diversification, avec des plantations d’Aloe Vera et de Figuiers de Barbarie (récit dans l’édition de décembre de 2021, dans le dossier « Changements climatiques: êtes-vous prêts?). Et nous avons d’autres idées pour après.