Fondée à Lannion (Côtes-d’Armor) en 1900, la distillerie familiale est longtemps restée cantonnée à la fabrication d’une liqueur de plantes, l’Élixir d’Armorique. Ce n’est qu’en 1983 qu’elle devient la première distillerie de whisky en France, sous l’impulsion de son dirigeant, Gilles Leizour. « A l’époque, il fallait sauver la distillerie », raconte son gendre, David Roussier, directeur général depuis 2009.
Les premières bouteilles de WB-Whisky Breton sont commercialisées en 1987, en supermarché. « C’était un équivalent du Clan Campbell, un blend (assemblage, ndlr) d’entrée de gamme, très bien à mélanger avec du coca », raconte David Roussier. « Au début, on s’est complètement adapté au marché », concède-t-il.
Trente plus tard, Warenghem reste numéro 1 du whisky en Bretagne et en France. Elle a doublé sa production depuis 2015 pour atteindre 150.000 litres d’alcool pur par an, soit environ 500.000 bouteilles.
« On vend toujours 250.000 bouteilles mais on en produit 500.000 », souligne David Roussier. « On essaie de produire beaucoup pour anticiper l’augmentation des ventes. Et même si les ventes ne doublent pas, je pourrais valoriser mon stock en le vieillissant ». « Le nerf de la guerre dans le whisky, c’est le vieillissement », pointe-t-il.
Implantée dans de grands hangars blancs à l’entrée de Lannion, la distillerie a inauguré cet été un vaste nouveau chai pour stocker ses 4.500 fûts. « Les bâtiments font industriels mais ça reste très artisanal », assure M. Roussier, qui est à la tête d’une PME de 18 salariés.
Indication géographique
Initialement vieilli en fûts de Bourbon ou de Xérès, comme en Écosse, les whiskys Warenghem reposent depuis quelques années dans des fûts de Sauternes, de Pineau-des-Charentes ou dans des fûts fabriqués par un tonnelier du Finistère. « Maintenant que les gens ont intégré qu’on pouvait faire du whisky en Bretagne, on peut se permettre d’être plus originaux », explique David Roussier.
La distillerie est aussi montée en gamme avec la commercialisation d’une large palette de single malts, dont le premier a été embouteillée en 1998. Un single malt 10 ans d’âge est vendu depuis septembre.
« Ce que les gens cherchent dans le whisky, c’est une certaine forme d’authenticité. Ils veulent qu’on leur parle d’un terroir. En Bretagne pour ça, on est plutôt bien outillé », raconte David Roussier.
Un aspect conforté par la mise en place, en 2015, d’une Indication Géographique (IG) « Whisky de Bretagne » ou « Whisky Breton ». L’événement avait toutefois été terni par une polémique avec la distillerie Glann ar Mor de Pleubian (Côtes-d’Armor) qui avait accusé la nouvelle IG de la contraindre à la fermeture, ce qui n’est finalement pas arrivé. Contactés par l’AFP, ses fondateurs n’ont pas donné suite. « Je reste convaincu que Glenn ar Mor aurait pu rejoindre l’IG », regrette David Roussier. « C’est dommage car les gens sont restés sur cette histoire. »
Pourtant, l’IG est « un cadre simple à respecter. Ça permet de hisser tout le monde vers le haut », estime Lenaïck Lemaître, assembleur et distillateur chez Naguelann à Languenan (Côtes-d’Armor). « C’est aussi un argument commercial parce que les gens aiment la Bretagne », ajoute-t-il.
Aujourd’hui, six distilleries ont rejoint l’IG, produisant 370.000 bouteilles par an, un chiffre en hausse de 12% sur trois ans. Parmi les plus grosses, la distillerie des Menhirs conçoit le « seul whisky de blé noir au monde », selon son site internet.