«C’est bien un effet alcalinisant que l’on peut attribuer aux lisiers.» Dans une publication en ligne de mars, Didier Deleau (Arvalis) bat en brèche une idée reçue concernant les apports de lisier sur prairie. Idée qu’il juge même «trop souvent répandue.» Car une fertilisation équilibrée qui valorise les effluents animaux abaisse moins le pH que d’autres stratégies d’apports. «De nombreuses références» confirment ce phénomène.
Par exemple cette étude entre 1996 et 2005 à la station de la Jaillère (44). La prairie fertilisée avec un apport annuel de lisier de bovins et d’ammonitrate y a vu son pH gagner un demi-point. De le même temps, la stratégie avec fumier et ammonitrate s’était soldée par un effet neutre sur ce critère. Au cours des neuf campagnes en revanche le pH avait perdu 0,8 points sous la modalité en fertilisation uniquement minérale.
Plus d’apports basiques sont nécessaires sans valorisation des effluents
Certes, la nitrification qui transforme en nitrate l’azote ammoniacal des effluents libère les ions H+. Or ces éléments sont les responsables de l’acidification. Mais des anions organiques (OH–, HCO3–…) sont également présents dans le lisier. Ces derniers «jouent un rôle analogue à celui des oxydes et des carbonates… des amendements minéraux basiques.»
Ainsi, «l’apport régulier d’engrais de ferme permet de limiter significativement le recours aux amendements basiques.» De plus, ce serait particulièrement vrai avec le lisier. L’expert y pose cependant une condition. Il conseille avant tout de contrôler régulièrement le pH de son sol. Mais «quand il faut de l’ordre de 200 à 300kg/ha/an d’équivalent CaO» pour compenser l’acidité introduite dans le sol avec des apports uniquement minéraux, «un chaulage d’entretien de moins de 100 à 150kg/ha/an est suffisant lorsque la parcelle reçoit des apports réguliers d’effluents d’élevage.»
Apports de lisier sur prairie: des équilibres
Didier Deleau va plus loin. «Lors de l’épandage, une partie de l’azote ammoniacal est volatilisée», sous forme d’ammoniac (NH3). La réaction part des ions ammonium (NH4+) présents dans l’effluent. «Cela génère des pertes et contribue à l’acidification du sol» par la libération d’ions H+.
Ainsi les bonnes pratiques d’épandage qui contribuent à valoriser l’azote organique, limiter les émissions d’ammoniac, luttent en même temps contre l’acidification du sol de la parcelle.
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