«Les éleveurs parlent aux éleveurs»: tel était le titre des casse-croûtes/débats qui se sont déroulés deux jours consécutifs au SPACE. Le thème programmé le 12 septembre était consacré à la valeur ajoutée. «Comment les éleveurs la récoltent?» était la question posée par les organisateurs de la Frgeda Bretagne et Trame.
Le choix du sujet fait clairement écho au manque de perspectives économiques des éleveurs. Un «clair-obscur» qui les incite à explorer différentes voies pour préserver la santé économique des exploitations.
Clément Boivent
«On a monté un atelier de transformation et de vente directe. Aujourd’hui, nos 200 vaches laitières font vivre 10 emplois, avec encore des perspectives de développement.»
GAEC du Lait des champs, Ille-et-Vilaine, 1.250.000 litres en agriculture biologique, dont 250.000 transformés.
Joël Tromeur
« On gagne plus vite à dépenser moins, qu’à vendre plus cher. Avec mon système herbager et sans labour, ça pousse tous seul et les vaches font le reste.»
Eleveur laitier, Côtes-d’Armor, et trésorier de la cuma Vent d’Ouest, en techniques «sans labour».
Produit 320.000 l (sur un quota de 400.000 litres de lait), avec une meilleure résilience aux crises de 2009 et 2015, voir l’article sur le site de la Fédération des cuma Ille-Armor .
Mickaël Tregouet
« Avec les veaux Bretanins, je valorise un tiers de mon lait. Le travail est mieux rémunéré et je suis fier de valoriser mon lait de cette manière.»
Eleveur laitier et producteur de veaux, Côtes-d’Armor.
Les veaux Bretanins, sont élevés au lait entier et commercialisés sous label rouge auprès d’artisans bouchers.
Jean-Luc Jicquel
« On a fait le pari de valoriser notre production via le projet Laitik. Avec le projet Terres de Sources sur le bassin de Rennes, on va plus loin.»
Eleveur laitier, Morbihan, membre de la Sica Lait’sprit D’ethique. Quarante-sept producteurs depuis 2017 transforment et commercialisent leur lait (12 millions de litres).
Six d’entre eux, situés sur un périmètre de captage, font évoluer leurs pratiques et bénéficient désormais de l’appellation « Terres de Sources » pour leur lait, vendu au sein de leur marque « Laitik« .
Pascal Helgouet
«Après un travail sur la réduction des charges, on cherche à récupérer encore plus de valeur ajoutée par la vente directe et la montée en gamme de nos produits.»
Eleveur porcin et laitier, en GAEC à 4, Finistère.
Recherche de valeur ajoutée via l’autonomie sur l’exploitation (arrêt de l’insémination et du contrôle laitier, fabrication d’aliment à la ferme…), l’évolution des techniques (arrêt du labour, …) et la vente directe de viande de bœuf et de porc.
Henry De Kerdanet et Nelly Aubry
« Le projet Modala, c’est un projet collectif porté par 70 producteurs laitiers pour renouer avec les consommateurs et les collectivités locales et retrouver une valorisation équitables de nos produits sur les territoires.»
Eleveurs laitiers, Ille-et-Vilaine, membres du projet Modala.
Au travers de cette association indépendante, ils s’investissent humainement pour reprendre en main leur filière et assurer la durabilité des fermes.
Jean- Michel Yvard
«Il faut redonner la parole aux éleveurs et penser l’avenir dans un esprit filière. On a besoin d’être en collectif pour mieux négocier avec les industriels. L’OP est un outil.»
Eleveur laitier, Mayenne, président de L’Organisation des Producteurs Lactalis Grand Ouest (4 associations de producteurs adhérentes) mandatée pour négocier prix, volumes… avec l’entreprise.
Sébastien Bellier
« Avec l’agriculture de conservation des sols, je produis des bienfaits pour l’environnement. Avec les PSE (paiements pour services environnementaux), je cherche à valoriser ces services.»
Sébastien Bellier, producteur de céréales en Mayenne.
Explore les retours financiers possibles auprès de la société civile ou des collectivités locales, correspondant aux aménités positives de son système de production sur l’environnement.
Foison d’expériences nouvelles
Les initiatives présentées, souvent menées par des collectifs d’agriculteurs, ne sont pas exemptes de difficultés et même de chausse-trappes: besoins d’appropriation de nouvelles techniques de production ou de savoir-faire commercial, travail chronophage de documentation et d’information, création nécessaire d’un réseau de partenaires, réorganisation du travail sur l’exploitation, prise de risques financiers…
Ces expériences sont rarement reproductibles telles quelles. Toutes demandent à chaque fois beaucoup d’énergie et de discernement. Les agriculteurs témoins n’ont pas tu d’ailleurs les difficultés qu’ils ont pu rencontrer dans leur démarche. Certaines peuvent même conduire à des rapports de force avec d’autres acteurs économiques bien établis… Autant d’obstacles à surmonter pour se réapproprier pleinement son destin professionnel et espérer un juste retour économique.