Les répercussions économiques du conflit armée en Ukraine déclenché par l’invasion russe sont bien palpables. L’envolée des prix des matières premières et l’inflation qui en découlent font aujourd’hui partie de notre quotidien. À l’échelle agricole française, les agriculteurs composent depuis plus d’un an avec des cours en dent de scie et toujours peu de visibilité.
Résultat économique positif
Pourtant, une fois n’est pas coutume, globalement, la conjoncture a été favorable à l’agriculture française. « Pour la première fois depuis de nombreuses années, les prix des produits agricoles sont en hausse, annonce Thierry Pouch, économiste à la Chambre d’agriculture France lors d’un point organisé le 14 février. La valeur ajoutée est en hausse de 1,4 % et le résultat de la branche agricole de 19,7 % par rapport à la moyenne annuelle. » L’année 2023 nous dira si cette rupture va se poursuivre dans la durée.
Une croissance en trompe-l’œil
« Cette revalorisation des produits agricoles est une vraie bouffée d’air pour les agriculteurs français, se réjouit Sébastien Windsor, président des chambres d’agriculture de France. Derrière ces chiffres qui semblent plutôt positifs pour les agriculteurs français, il faut être prudent. Il y a une véritable décroissance. »
Notamment dans la filière animale, « on assiste encore plus à une décapitalisation des cheptels français malgré des prix en hausse, indique Marine Raffray économiste également. Les prix des aliments et de l’énergie même s’ils finissent par se compenser ne suffisent plus à encourager les éleveurs français. Ni à les rassurer face à leurs incertitudes. »
Fait marquant, cette année, pour la première fois, la France a importé plus de la moitié de la volaille qu’elle consomme. Résultat des conséquences de la grippe aviaire, sûrement. Mais la tendance est bien là. Cette même tendance est à constater pour les fruits, les légumes et la viande bovine.
En grandes cultures, les agriculteurs ont dû faire face au changement climatique qui a impacté les volumes de céréales produites. Si les exportations sont à la hausse, c’est en valeur monétaires. Les deux experts le répètent, les volumes ont manqué. La France n’a pas compensé les volumes non produits en Ukraine.
Perte de débouchés
Pour cette année, il est encore difficile de prédire le résultat des exportations françaises mais certaines composantes sont déterminantes. La reconduction du corridor d’exportation des céréales ukrainiennes aura t-elle bien lieu ?
La Chine qui est de nouveau aux affaires risque-t-elle d’impacter les marchés grâce à sa reprise d’activité ? Et surtout les agriculteurs ne vont-ils pas subir une dégradation des prix des intrants sans profiter de prix de vente élevés ? « L’incertitude reste totale », tient à ajouter Thierry Pouch.
Sécurité et souveraineté alimentaire
Car face à l’inflation, les français réalisent des arbitrages et notamment sur leur nourriture. « Certains se tournent vers d’autres enseignes plus orientées vers le hard discount, d’autres choisissent de réduire leurs achats ou d’acheter moins chers, explique Marine Raffray. Avec une consommation moindre, les débouchés risquent de se réduire dans la même veine. »
Avec des États-Unis en plein déficit commercial de denrées alimentaires, la France a un rôle à jouer sur la scène internationale. « Elle doit être capable de maintenir la sécurité alimentaire dans le monde, tout assurant sa souveraineté alimentaire, lance Sébastien Windsor, le président des chambres d’agriculture de France. Sur ces deux points, j’ai un doute. La politique menée actuellement est une politique de contraintes et non de récompenses. Sur ce point, je suis choqué de l’absence de réaction de la Commission européenne. »
Si le flou persiste pour le monde agricole français et européen, il faut espérer que les planètes soient bien alignées cette année pour que la France tire sont épingle du jeu. Les filières agricoles et alimentaires auront-elles appris de cette année pleine de turbulences ?
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