Il faut ouvrir le débat sur un système d’assurance obligatoire » pour les agriculteurs, a déclaré le président de la FNSEA Xavier Beulin, en marge d’un meeting organisé jeudi, à Lamotte-Beuvron (Loir-et-Cher), par la FNSEA et les JA, où la question de la protection contre les aléas des marchés, sanitaires ou climatiques, a été omniprésente. Car les aléas, l’agriculture française en a eu sa part ces deux dernières années. D’abord ce sont les cours mondiaux du lait et des viandes bovine et porcine qui se sont effondrés en 2015, ensuite une épizootie de fièvre catarrhale ovine a éclaté dans le centre de la France, suivie d’une épizootie de grippe aviaire dans le sud-ouest. Puis c’est la météo qui a fait des siennes: un hiver trop doux suivi d’un printemps froid et pluvieux et d’orages de grêles ont mis à genoux les filières végétales, notamment les céréales et la viticulture. Et à cette occasion, on s’est aperçu que seuls 20% des viticulteurs et 30% des producteurs de céréales ont une assurance récolte. Les raisons de ce faible taux de couverture sont variées, mais le prix d’une assurance privée et le taux de franchise élevé dominent. Et les agriculteurs veulent pouvoir se prémunir contre d’autres risques, comme la chute des cours mondiaux.
Pour Florent Leprêtre, président de la FDSEA du Loir-et-Cher, une solution serait de créer « un crédit d’impôt sur les cotisations d’assurance », car « l’incitation fiscale voire sociale pourrait permettre d’augmenter le nombre et la typologie des assurés ». « Nous avons dépassé les 300 millions d’euros » versés au titre de l’assurance récolte pour Groupama cette année, indique le président de Groupama Paris Val de Loire, Daniel Colay. L’assureur rappelle qu’on « a souvent reproché le taux de franchise de 30% » des contrats, mais il estime que l’Europe pourrait intervenir sur cette question.
seuil des 30%
Xavier Beulin, souligne que c’est auprès de l’OMC qu’il faut agir pour ramener ce seuil en-dessous des 30%. C’est également à l’échelon européen que FNSEA et JA espèrent voir mis sur pied des outils de gestion de risque efficaces pour faire face aux aléas climatiques et sanitaires et à la volatilité des prix. L’Union européenne, qui a supprimé les quotas laitiers en 2015, a instauré début 2016 un système d’intervention afin de sortir du marché l’excédent de lait et de porc, et a fini par accepter une incitation à la baisse de la production laitière. « Avec l’Europe, on a un dispositif qui se met en place, mais trop tard. Cela fait deux ans qu’on demande un contrôle de la production », relève le secrétaire général de la Fédération des producteurs de lait (FNPL) André Bonnard. Aujourd’hui les éleveurs laitiers demandent de « l’inscrire dans le futur pour que le dispositif soit pérenne et permette de gérer les crises avant qu’elles ne soient trop dures », assure-t-il. Mais si la Commission européenne a consenti à cette aide conjoncturelle, et qu’un consensus se dégage pour mettre en place des outils de stabilisation des revenus des agriculteurs, certains pays comme l’Allemagne et le Luxembourg restent violemment opposés à toute mesure pérenne de limitation de la production.
Les négociations de la prochaine PAC s’annoncent donc longues et compliquées. « Si on veut une assurance efficace, il faudra y consacrer un certain nombre de moyens. Le débat va être féroce », a commenté M. Beulin. En attendant, le président des JA, Jérémy Decerle a proposé la mise en place d’outils à combiner pour se prémunir de la volatilité et autres catastrophes: épargne de précaution, assurances privés et fonds de péréquation. « Je suis convaincu (…) qu’on ne peut plus tout attendre des politiques, que les leviers majeurs sont entre nos mains. A nous, et c’est notre responsabilité, de les activer », a-t-il assuré.