Je crois à l’avenir de l’agriculture française », a lancé le maire de Bordeaux. En dépit des difficultés, voire de la « désespérance » du monde agricole, « je pense que l’agriculture est une chance formidable pour la France. Nous avons été la première puissance agricole d’Europe, nous devons le redevenir« , a-t-il ajouté. Arrivé au salon en fin de matinée et accompagné de Pierre Méhaignerie, maire (UDI) de Vitré, Alain Juppé n’a cessé durant quatre heures de répéter son mantra: simplifier et moderniser. « Il faut alléger les charges (…), il faut simplifier, simplifier, simplifier, nos paysans sont asphyxiés par la complexité. Je pense au compte pénibilité par exemple – il faudrait inventer autre chose – ou à d’autres normes encore qui sont souvent françaises et pas européennes. Ensuite, il faut rétablir un meilleur équilibre entre producteurs et distributeurs, que la valeur ajoutée soit mieux partagée ». « Il faut accompagner la modernisation de l’agriculture », a encore dit l’ancien Premier ministre, « mobiliser les fonds (…) pour aider les jeunes qui s’installent. Il y a beaucoup de candidats. » Durant une heure, le vétéran des candidats à la primaire des Républicains a arpenté les allées du salon, clairement à la recherche de jeunes agriculteurs, auprès desquels il a multiplié les selfies. Il a voulu discuter avec une demi-douzaine d’étudiantes, chapeautées de Stetson en paille rouge: « Vous avez envie de vous installer? » La réponse n’est guère enthousiaste: « Vous savez, avec ce qu’on voit dans les médias, on n’a pas très envie… » Qu’à cela ne tienne, Alain Juppé, lui, veut y croire et les encourage : « Continuez vos études et installez-vous! »
Plus loin, Virgile, 18 ans, et Robin, 19 ans, l’alpaguent: « Faites quelque chose pour la crise agricole! » Le maire de Bordeaux s’approche, tente de les rassurer: « Il faut que les jeunes s’installent ». Robin est sceptique: « Depuis 2014, on n’en voit pas le bout. Je ne voudrais pas attendre 2020, moi » pour que ça change… Attablée au stand de la FNSEA, une agricultrice lui parle de ses enfants, « dont deux (sont) installés »: avant « on travaillait pour transmettre notre patrimoine » explique-t-elle, mais aujourd’hui c’est différent. « Ils me disent qu’ils changeront peut-être de métier s’ils travaillent juste pour travailler et ne gagnent pas leur vie », explique-t-elle. Alain Juppé dit avoir la solution : « Il faut mettre au point un mécanisme pour garantir les revenus, même quand les prix font des yoyos. » Sur le parcours, l’élu est accueilli en règle générale avec le sourire, et beaucoup le voient comme « un homme d’expérience ». Même les producteurs laitiers, pourtant au bord du gouffre pour certains, lui parlent avec sympathie. « Quand je vous écoute, lui lance Cyril, 42 ans, producteur laitier dans la Manche, ça a l’air très simple, mais c’est beaucoup plus compliqué ». « On veut un juste prix sur nos produits. (…) C’est quand même pas normal qu’un agriculteur qui travaille 70 heures par semaine ne se paie pas de salaire… » Alain Juppé acquiesce, avant de regagner sa voiture. Dans sa main, une petite vache « anti-stress » en caoutchouc noire et blanche qu’on lui a remise. Il en aura besoin pour un autre genre de campagne, lui souffle-t-on: celle des primaires.
Rennes, 15 sept 2016 (AFP)