Ces propositions sont le « fruit d’un choc violent, le mien et celui de millions de français, qui ont vus les vidéos de l’association L214« , laquelle a ainsi joué son rôle de lanceur d’alerte, a rappelé le président de la commission, le député Olivier Falorni (Radicaux de gauche). Ces vidéos choquantes d’animaux mal étourdis, accrochés vivants sur la chaine de découpe avaient mis en lumière « l’omerta qui régnait sur les abattoirs », a-t-il ajouté. La commission d’enquête a planché six mois sur le traitement des animaux de boucherie dans les abattoirs français et, pour que de tels scandales ne se reproduisent pas, elle a établi comme priorité d’accroître les contrôles et la transparence. Les députés proposent ainsi de rendre obligatoire l’installation de caméras « dans toutes les zones des abattoirs dans lesquelles des animaux vivants sont manipulés », avec une aide financière pour l’équipement des petites structures. Cette disposition, contestée dans la profession fera l’objet d’une proposition de loi car « ce contrôle vidéo doit être encadré par la loi afin d’en délimiter strictement les finalités et éviter qu’il devienne un outil de surveillance des salariés », selon la commission. Les députés préconisent également « d’augmenter le recrutement de vétérinaires et de techniciens supérieurs du ministère de l’Agriculture », en vue de rendre obligatoire dans les abattoirs de plus de 50 salariés « la présence permanente d’un agent des services vétérinaires aux postes d’étourdissement et de mise à mort ». Les députés demandant en outre que la formation des personnels soit renforcée et complétée par « une réelle formation pratique ».
Un comité d’éthique
Pour le rapporteur Jean-Yves Caullet (PS), l’acte fondateur de ce plan sera la mise en place d’un comité national d’éthique des abattoirs. La création de ce comité sera la preuve de « l’acceptation institutionnelle qu’il y a un regard à partager sur ce qui se passe dans les abattoirs », a-t-il souligné. Ce dispositif devra être complété par des comités locaux de suivi de chaque abattoir. Ils réuniraient « les élus locaux, les exploitants d’abattoirs, les éleveurs, les services vétérinaires, les bouchers, les associations de protection animale et de consommateurs, ainsi que les représentants religieux dans la mesure où il est pratiqué un abattage rituel ». Concernant justement l’abattage rituel, auquel la commission a consacré une part importante de ses travaux, les parlementaires proposent de modifier le code rural, dans sa partie réglementaire, afin de préciser que « l’étourdissement réversible » est possible en cas d’abattage rituel, ce qui encouragerait une telle pratique. « Ce que nous essayons de faire c’est d’ouvrir le champ des possibles », a expliqué M. Falorni, car « l’abattage sans étourdissement ne nous satisfait pas et nous souhaitons des évolutions qui sont possibles », en favorisant la discussion avec les représentants des cultes juifs et musulmans. De toute façon, M. Caullet a expliqué qu’interdire l’abattage sans étourdissement ne serait « pas efficace » car « une telle interdiction serait contestée » en justice. Mais la commission préconise toutefois de « prévoir, sous le contrôle de l’Etat, une formation pratique des « sacrificateurs » (les tueurs agréés par les cultes religieux) et subordonner l’agrément religieux à la détention établie de cette compétence technique ».
L’association L214 a justement lancé mardi une pétition demandant au gouvernement « d’interdire l’abattage des animaux sans étourdissement préalable », et annoncé son intention de porter plainte contre un abattoir de la Vienne pour des « infractions » commises selon elle durant l’abattage rituel de moutons pour la fête musulmane de l’Aïd. De leur côté, la SPA et la Fondation Bardot ont réagi de manière très contrastée aux recommandations. « La SPA est heureuse de constater que son point de vue est désormais partagé par les députés », et « seules les caméras de surveillance permettront de prévenir les violences et les brutalités contre les animaux », a déclaré sa présidente Natacha Harry dans un communiqué. La Fondation Brigitte Bardot estime pour sa part que « les pistes dévoilées ne vont pas assez loin », les qualifiant de « mesurettes » et jugeant « impératif d’interdire l’égorgement des animaux sans étourdissement préalable ».
Paris, 20 sept 2016 (AFP)