Le ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, a exprimé un avis défavorable aux amendements adoptés par les sénateurs par 321 voix contre 19 (LREM), tout en reconnaissant avoir lui-même défendu, lorsqu’il était sénateur, ce dispositif d’exonération.
La suppression de ce dispositif spécifique d’exonérations « condamnerait les exploitations », ont clamé les sénateurs sur tous les bancs, reprochant au nouveau ministre son « franchissement du Rubicon ».
« La France rurale grogne. Faites qu’elle ne gronde pas ! », avait exhorté mardi Nathalie Delattre (RDSE à majorité radicale) à l’adresse du gouvernement.
Le projet de budget 2019 de la Sécurité sociale prévoyait initialement de supprimer ce dispositif spécifique TO/DE (travailleurs occasionnels, demandeurs d’emplois), au profit d’allègements généraux de cotisations sur les bas salaires.
Arguant des difficultés des producteurs de fruits et légumes, les députés avaient voté une « sortie progressive » du TO/DE, avec une exonération totale maintenue jusqu’à 1,15 Smic en 2019, puis jusqu’à 1,10 Smic pour 2020, contre 1,25 Smic actuellement.
Au Sénat, le rapporteur général pour le budget de la Sécu a proposé de relever les seuils, pour les porter respectivement à 1,25 puis 1,15.
Mais, pour les sénateurs, « le compte n’y était toujours pas », selon les termes de Nadine Grelet-Certenais (PS).
Après s’être longuement exprimé pour défendre chacun leur territoire agricole, ils ont ainsi adopté deux amendements identiques de Laurent Duplomb (LR) et Henri Cabanel (LR), pérennisant le dispositif actuel d’exonération jusqu’à 1,25 Smic.
« Soit on décide de ne plus manger un seul fruit français à l’avenir, soit on arrête cette politique destructrice », a lancé M. Duplomb, soulignant que « les agriculteurs « ont besoin de clarté et d’une certaine pérennité dans les dispositifs ».
« On ne parle pas de budget », « on parle des territoires », a appuyé Sophie Primas, présidente LR de la Commission des Affaires économiques.
« Le Sénat va laisser à l’Assemblée nationale le dernier mot », a averti Didier Guillaume.
Le Sénat a adopté l’article du budget de la Sécu plus généralement consacré à la transformation du CICE (crédit d’impôt compétitivité emploi) en baisse de cotisations patronales pérennes, malgré l’opposition de la gauche, qui a dénoncé « des cadeaux de Noël » faits aux entreprises.
Des modifications à la marge ont été apportées. Plusieurs amendements identiques visant à faire bénéficier les Chambres consulaires de ces allégements ont ainsi été adoptés. De même qu’un amendement LREM permettant aux Associations intermédiaires (qui oeuvrent pour l’insertion des personnes éloignées de l’emploi) d’y être plus facilement éligibles, ou encore un amendement centriste en faveur de l’activité de portage de presse.