« L’autre jour, j’ai eu 34 demandes », raconte ce sourcier de 66 ans, installé à Tournon-Saint-Pierre (Indre-et-Loire), dont le téléphone ne cesse de sonner.
Avec ou sans baguette, Henri Van Ingen parcourt des milliers de kilomètres en France pour trouver les nappes aquifères et les rivières souterraines où agriculteurs, particuliers et collectivités trouveront ce qui leur manque.
Dénicher l’eau ? « C’est une réceptivité ancestrale qu’on a tous mais qui est plus ou moins développée chez certaines personnes », explique ce fils d’un paysan hollandais qui s’est installé en 1963 dans le sud de l’Indre-et-Loire. « Chez les chrétiens on va dire que c’est un don », ajoute-t-il dans son salon décoré d’images pieuses. « Je fais ça pour rendre service », insiste-t-il.
Son fils a repris son entreprise de forage et emploie plusieurs dizaines de personnes avec sept foreuses qui peuvent aller jusqu’à 425 m. Mais le sourcier ne manque pas pour autant d’activité: il a une vingtaine de rendez-vous par semaine et parcourt 90.000 km par an.
La fameuse baguette à deux branches, qu’elle soit en ormeau, en genêt, en saule ou en noisetier, « n’est qu’une antenne, ça ne fait qu’amplifier ce que je perçois, je suis le poste de radio » explique-t-il. La sienne, dont il se sert à l’occasion, est fabriquée avec des lames de scie à métaux. « C’est souple et ça ne casse pas ».
La première détection, tentée à 17 ans, après la venue d’un sourcier dans la ferme de son père, a « été un flash, ça me faisait mal dans tout le corps » raconte-t-il. La douleur s’est atténuée mais ces impressions se sont amplifiées à force de faire des recherches et de travailler. Henri Van Ingen détermine aussi les points d’eau à partir de cartes ou de photos et estime en avoir trouvé environ 17.000. Mais, précise-t-il, « il ne faut pas croire un sourcier qui dit ne s’être jamais gouré ».
« Mon ennemie, c’est l’argile »
Parfois, il lui arrive de travailler avec les cartes satellitaires qu’utilise la Communauté européenne pour gérer la politique agricole commune. Il reçoit même des photos d’Afrique, du Burkina ou du Bénin, où l’association toulousaine Cap Solidaire international a creusé 62 puits.
« Dans les zones dites de transition, où les autres ne trouvent rien, il ressent d’après photos des couloirs d’eau, leurs profondeurs et leurs débits », assure Xavier Besançon, l’un des responsables de l’association pour laquelle le sourcier a trouvé dix puits avec « 100% de réussite ».
Seules certaines régions résistent à Henri Van Ingen comme la Creuse ou entre Chartres et Dreux. « Là, ça me travaille » dit-il, en accusant le silex qui émettrait des ondes négatives. « Quand il rentre, il est fatigué », dit son épouse.
« Si je n’avais pas eu mon forage cet été, j’explosais le compteur d’eau », a expliqué à l’AFP Fabrice Nonet, agriculteur à Barrou (Indre-et-Loire) qui en a besoin pour abreuver ses vaches. A Abilly, également en Touraine, Laurent Gérard avait besoin d’eau pour ses arbres. Le sourcier « se tordait dans tous les sens » raconte-t-il, mais il y avait de l’eau là où il l’a dit et à la profondeur qu’il avait annoncée. »
Une recherche, si elle n’est pas trop complexe, est facturée entre 100 et 200 euros. « Mon ennemie, c’est l’argile, c’est indétectable » dit-il. Aussi donne t-il parfois des fourchettes : « entre 10 et 12 m de profondeur et entre 3 et 5 m3 par seconde ».
Selon le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), les niveaux des nappes phréatiques en France sont « généralement très inférieurs » à ceux de 2018 et devraient continuer de baisser jusqu’à l’arrivée de pluies plus abondantes entre mi-octobre et fin novembre.