« Nous modifierons la loi pour inverser la formation du prix qui partira du coût de production » afin d’améliorer le revenu agricole, a déclaré le chef de l’Etat, à mi-parcours des Etats généraux de l’alimentation lancés en juillet. L’ambition du président est de trouver les moyens de mettre un terme à la paupérisation de la profession agricole, tout en répondant à la forte nécessité de transformation du secteur pour répondre aux attentes sociétales et environnementales des Français.
« Nous devons repenser collectivement une nouvelle France agricole » a lancé M. Macron aux agriculteurs, industriels, distributeurs et élus réunis sur le marché de gros de Rungis (Val-de-Marne). La loi devrait être présentée et adoptée via des ordonnances « au premier semestre 2018 » a dit M. Macron, en souhaitant une « transformation profonde » du secteur qui devra monter en gamme, et en exigeant que chaque filière de production agricole (lait, viande, céréales, etc..) lui présente « d’ici la fin de l’année » sa « stratégie ».
« Nous ne devons pas avoir une approche uniforme », il continuera d’y avoir une « pluralité productive », et des « dynamiques régionales » qui doivent rester fortes, a-t-il ajouté en citant le bio, les labels, les régions. « Je souhaite que la distribution et les industriels participent » à ce travail. Les « contrats de filière » ainsi bouclés serviront aussi de base à la position de la France pour bâtir la future Politique agricole commune (PAC), qui doit voir le jour après 2020, a-t-il dit.
« Arrêt » de certaines productions
Sur le délicat sujet des relations commerciales avec les distributeurs, la décision de relever le seuil de revente à perte (SRP) de la grande distribution, très attendue par les agriculteurs, dépendra de chaque filière. Et ne devrait concerner que les produits alimentaires. Le seuil de revente à perte est le prix minimum en dessous duquel les distributeurs n’ont pas le droit de vendre.
Le président a réaffirmé son engagement de campagne d’atteindre « 50% de produits bio ou locaux d’ici 2022 en restauration collective », un objectif qui va permettre de modeler, selon lui, les schémas de production en France et relancer l’agriculture et l’agroalimentaire. « Vous devez vous organiser dans les territoires pour changer les modèles productifs », a-t-il dit.
Ce changement de paradigme passe par un « arrêt » de certaines productions, qui ne correspondent plus au goût des consommateurs et ne s’inscrivent pas dans la concurrence internationale. Emmanuel Macron s’est engagé à clarifier le droit à la concurrence, les agriculteurs étant tétanisés par le risque d’être accusés d’entente commerciale comme c’est arrivé par exemple pour « le cartel des endives ».
À l’adresse des associations de consommateurs, il a affirmé que le Ceta, l’accord de libre échange conclu entre l’UE et le Canada et entré provisoirement en application le 21 septembre, respectera les normes européennes de santé et d’environnement. Sur l’herbicide controversé glyphosate, il s’est engagé à ne pas laisser les agriculteurs « sans solution », mais a réaffirmé l’objectif de « transformer le modèle agricole dans lequel nous nous sommes enferrés » et qui « n’est pas durable ».
Suite aux annonces du président
La présidente du premier syndicat agricole FNSEA, Christiane Lambert, a salué des « avancées », en particulier le choix du recours à des « ordonnances » pour « aller plus vite », mais elle a eu du mal à encaisser les « leçons » du président sur les productions « qui ne marchent pas », en jugeant M. Macron « approximatif, voire caricatural » sur le sujet. Michel Edouard Leclerc, conspué par la FNSEA, s’est pour sa part déclaré « soulagé » que le président soit favorable au relèvement du seuil de revente à perte sur les seuls produits alimentaires.
La Commission européenne, « réjouie » par ce discours, a indiqué qu’elle présenterait fin novembre ses orientations pour simplifier et moderniser la PAC.
Pascal Canfin, directeur général France de l’ONG WWF, a lui salué les « contrats de filière » et le changement des règles du jeu sur la fixation des prix à partir des coûts, mais « reste clairement sur (notre) faim sur la question de la transition » et « l’invention d’un nouveau modèle agricole ».
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