Vous le voyez venir le hic ? Dans la région, l’âge moyen des 32 600 chefs d’exploitation est de 49 ans. Autre statistique, quasiment un tiers de l’effectif a déjà soufflé ses 55 bougies. Face à cela, l’âge moyen de départ à la retraite d’un agriculteur français est de 63 ans plus un trimestre. Ainsi les statistiques résument que l’agriculture régionale devra préparer 10 000 pots de départ sur les neuf années qui viennent, et cela sans compter ni les départs de salariés ni les autres causes de sortie du métier. Or ces dernières ne sont pas non plus négligeables. D’après les prévisions de l’Observatoire régional installation transmission, depuis 2015, chaque année environ 2 000 agriculteurs cessent leur activité, et bien que le rythme doive décroître à partir de cette année, 10 000 agriculteurs d’aujourd’hui ne seront plus agriculteurs en 2029.
La priorité des priorités agricoles
Autant dire qu’il existe un important enjeu de renouvellement, car « on peut mettre en place ce que l’on veut, s’il n’y a personne en face pour le mettre en œuvre, ça ne servira à rien », rappelle l’élue de la région Pays de la Loire, Lydie Bernard. Une lapalissade, certes, mais en réalité « pour n’importe quel secteur économique, le renouvellement des générations est toujours la première question à se poser ». Ainsi l’installation transmission est la priorité de la politique agricole du conseil régional.
Actuellement, le taux de renouvellement des agriculteurs dans la région s’établit à 55 %. Et même si les Pays de la Loire est « la région qui [installe] le plus », la présidente de la commission agriculture du conseil régional défend l’ambition de faire mieux. L’objectif, « raisonnable », serait déjà de passer à « 60 % ». L’élue pointe également des disparités entre les filières. Elle se dit surtout inquiète pour l’élevage : « En viande bovine, le renouvellement n’est que de 30 %. Même des élevages en bonne santé s’arrêtent sans reprise derrière. »
Pour bonifier l’indicateur de transmission, la Région mise déjà sur ses territoires. S’y lancent en effet des expérimentations grandeur nature sur dix intercommunalités. En chaque endroit, la démarche copilotée par l’intercommunalité, la chambre d’agriculture et les Jeunes Agriculteurs doit faire émerger des actions innovantes, concrètes et adaptées.
Les cuma sont concernées par le renouvellement des générations
« Tester de nouvelles formules de périodes d’observation pour les jeunes dans les exploitations, coacher individuellement les cédants afin d’anticiper mieux leur transmission… », le communiqué de présentation du dispositif précise également que la démarche devra être partagée et animée avec les différentes structures de développement agricole. « Dès qu’un acteur peut enrichir le dossier, s’impliquer, soutenir des porteurs de projet, c’est positif », encourage Lydie Bernard. Pour elle, le défi sera relevé à coup sûr si tout le monde, élus, citoyens, agriculteurs, s’implique sur son territoire.
Les cuma font partie de ces forces vives concernées par l’enjeu. Elles s’en emparent et veulent « apporter leur pierre » à l’édifice. Derrière l’objectif affirmé que l’agriculture se pratiquera demain « avec pas moins d’agriculteurs qu’aujourd’hui », le projet politique de l’Union des cuma pose la dynamique de territoire et l’installation comme l’une des trois grandes priorités de la période en cours. Celle-ci ira au moins jusqu’en 2026. « Nous souhaitons emmener les cuma sur ce champ de l’installation, qu’à leur échelle, elles en soient actrices, insiste le président de la structure fédérative Laurent Lesage. Nous avons des choses à imaginer pour que la cuma soit porteuse d’un projet sur un territoire et que le groupe se retrousse les manches. »
Le président de l’Union des cuma des Pays de la Loire reconnaît néanmoins toute la difficulté d’enclencher la mécanique. « Le sujet de l’installation reste plutôt tabou dans les groupes », et révèlent d’autres sujets sensibles tels que les questions foncières. « Ce n’est pas évident, il faut déjà partager des choses communes sur le projet d’installation », ajoute Laurent Lesage.
De la diversité à cultiver
Le représentant des coopératives locales invite aussi à « changer le regard sur les installations ». En parallèle, des transmissions classiques qui inscrivent l’entreprise agricole dans la continuité, « il y a aussi des projets qui changent les codes ». Des agriculteurs non issus du monde agricole (Nima) qui se lancent en maraîchage comme en élevage – avec des chèvres, des brebis ou même des bovins – et qui, aux formes sociétaires, préfèrent plutôt des structures individuelles de taille modeste, il y en a de plus en plus.
« Cela fera aussi partie des paysages de demain. Et je pense que nous avons le devoir de nous intéresser à toutes les formes d’installation et de les accueillir. Les cuma ont besoin de tout le monde », assène Laurent Lesage, sans nier que tous les agriculteurs, comme aujourd’hui, n’aspireront pas obligatoirement à prendre part à de telles aventures collectives. L’idée consisterait plutôt à faire en sorte que tous ceux qui considèrent que la cuma pourrait faciliter leur projet d’installation puissent y accéder facilement.
La nécessité de cultiver ainsi la diversité et le changement résonne particulièrement dans les propos de Lydie Bernard : « Les structures qui considèrent que, dans la mesure où tout fonctionne pour elles aujourd’hui, ça fonctionnera demain, sont sûres de se tromper. » Selon la vice-présidente du conseil régional, il y a pourtant des choses qui changent relativement peu : « Le jeune qui s’installe avec l’état d’esprit de s’inscrire dans un collectif accédera aux atouts sur les charges de mécanisation et sur le partage humain et d’expériences. » Des richesses présentes depuis toujours dans les cuma.
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