Dans les cinq prochaines années, 50 % des exploitants agricoles seront en âge de partir à la retraite. Le recours à la main-d’œuvre embauchée pour recruter un employé agricole apparaît comme une solution face à l’augmentation de la charge de travail sur les exploitations. Cependant, ce n’est pas la seule option.
Étape 1. Ai-je besoin d’embaucher ?
Voici un court questionnaire pour évaluer la réalité de vos attentes et de vos besoins en main-d’œuvre. Car mener un diagnostic sur les ressources humaines est le préalable à toute embauche.
Étape 2. Avant de recruter un employé agricole, il faut se préparer, se former et se renseigner
Les agriculteurs franchissent le pas de se former dans la fonction d’employeur moins spontanément que pour d’autres compétences. Pourtant, les organismes de formation s’emparent du sujet. Ils accompagnent les exploitants comme les salariés vers une gestion professionnelle des ressources humaines (RH). « Compte tenu de la complexification du droit social, les agriculteurs employeurs de main-d’œuvre délèguent aujourd’hui la rédaction des contrats de travail ou l’établissement des fiches de paie à des prestataires spécialisés, » analyse Béatrice Dingli, directrice générale de Vivéa, fonds d’assurance formation des chefs d’entreprise agricole.
« Les formations se concentrent désormais sur le diagnostic des besoins en ressources humaines et l’accompagnement dans la gestion des collaborateurs salariés ou associés des exploitations et entreprises agricoles, » complète-t-elle. Un point d’entrée majeur pour les formations porte sur la gestion concrète de la relation de travail dans l’entreprise :
- Faciliter le dialogue entre les salariés et/ou les associés ;
- Planifier le travail individuel ;
- Prévoir des temps collectifs ;
- Savoir gérer les conflits ou des situations délicates.
« La formation doit donner confiance au chef d’entreprise mais aussi à son équipe. Les salariés agricoles ont souvent connu une expérience dans un autre secteur économique que celui de l’agriculture. Ils peuvent être habitués à des pratiques de gestion professionnelle et attendent une équivalence ou une ressemblance de modalités auprès de leur nouvel employeur agricole. Cette gestion professionnelle contribuera également à la fidélisation des salariés. Toute formation est un investissement pour l’entreprise : au même titre qu’un matériel agricole, le chef d’entreprise doit pouvoir y trouver un retour sur investissement ».
Où s’adresser pour une formation ?
Vivéa et Ocapiat sont deux organismes agréés par l’État pour le financement et le développement de la formation professionnelle des actifs agricoles. Ocapiat couvre le champ des salariés : l’opérateur de compétences (OPCO) pour la coopération agricole, l’agriculture, la pêche, l’industrie agroalimentaire et les territoires. C’est un interlocuteur incontournable avant toute action de formation et de recrutement. Il conseille et accompagne les structures agricoles à l’aide d’outils de diagnostic, d’évaluation des pratiques RH ou encore d’ingénierie de formation pour le transfert des savoir-faire au sein des entreprises et pour la prévention des risques professionnels. Vivéa couvre le champ des non-salariés (chefs d’entreprise, conjoints collaborateurs, aides familiaux et cotisants de solidarité).
Les deux organismes offrent aux entreprises de leur périmètre d’action un accès à des financements de formations de qualité en veillant à une bonne couverture territoriale. Ainsi, Vivéa et Ocapiat conseillent et accompagnent les entreprises : outils de diagnostic, d’évaluation des pratiques RH ou encore d’ingénierie de formation pour le transfert des savoir-faire au sein des entreprises et pour la prévention des risques professionnels. De même, les Conseils régionaux, dans le cadre de leurs compétences en matière de développement économique et de formation professionnelle, proposent une offre de services ressources humaines à destination des entreprises.
Comment trouver la bonne posture pour recruter un employé agricole ?
Yves Le Guay est ingénieur en agriculture, consultant et formateur en relations humaines. Il a exercé 50 ans dans le monde agricole. Son livre, 10 clés pour recruter et manager sereinement des salariés agricoles, co-écrit avec Émilie Callot, dispense des conseils pratiques pour réussir dans sa fonction d’employeur.
Le monde agricole a beaucoup de progrès à faire en matière de recrutement !
« En dehors des emplois saisonniers, l’agriculture présente de multiples occasions d’embaucher des employés agricole : salariés sur les fermes, embauche collective en cuma, groupements d’employeurs ou magasins de producteurs, dans des organisations professionnelles agricoles, etc. Les agriculteurs ont un métier très complexe qui demande des compétences multiples. Ils se retrouvent souvent employeurs sans s’être formés à cette fonction et c’est là que le bât blesse.
Le monde agricole a beaucoup de progrès à faire en matière de recrutement ! Il s’agit de savoir déjà qui je suis en tant qu’entrepreneur et de quoi j’ai besoin sur ma ferme. Embaucher ne se fait pas à l’instinct : je dois lister ce que j’attends de mon futur salarié dont le poste doit être rentable. On peut attendre qu’il soit capable de faire les mêmes choses que moi, afin de pouvoir me remplacer. Dans tous les cas, il ne peut être ni mon clone en plus compétent, ni le mouton à 5 pattes qui n’existe pas.
Pour bâtir une relation saine, la meilleure option est d’établir une relation contractuelle explicite entre êtres libres. Cela passe par la communication quotidienne et l’écoute réciproque. Un manager qui est obligé d’élever la voix ou de dire « C’est moi le chef » démontre qu’il n’a pas d’autorité.
On confond souvent ordonner une tâche et déléguer une mission. Dans le premier cas, j’explique au salarié ce qu’il doit faire, dans le détail si nécessaire, et il n’a qu’à suivre les consignes. Dans le deuxième cas, je confie une mission au salarié, qui, s’il l’accepte, va se sentir honoré et grandi. En tant qu’employeur, je m’assure que l’employé a les compétences et les moyens pour réussir sa mission. On se met d’accord sur les moyens nécessaires et les conditions d’évaluation de sa mission et je lui apporte l’aide dont il peut avoir besoin. À partir de là, c’est le salarié qui organise les ressources pour assurer la mission. C’est le contrat de délégation, écrit ou oral.
Etape 3. Offre d’emploi, pour ne plus se planter lorsqu’on recrute un employé agricole
Le réseau cuma dispose de modèles d’offres d’emploi. N’hésitez pas à vous adresser à votre fédération de cuma de proximité pour vous les procurer. Voici à quoi ils ressemblent.
Par ailleurs, les animateurs des cuma de l’Ouest ont identifié plusieurs points à ne pas oublier lors de la rédaction des offres, que voici :
- Formuler le titre en inclusif (pour les hommes et pour les femmes) ;
- Présenter la structure (la cuma) ;
- Préciser le contexte du recrutement ;
- Indiquer s’il s’agit de travail dans une équipe ;
- Mentionner la date de prise de poste et si une période de tuilage est envisagée ;
- Spécifier l’expérience souhaitée (et pas exigée) ;
- Marquer les coordonnées téléphone et mail (pour plus d’informations) ;
- Donner le salaire en taux horaire et les avantages du poste ;
- Préciser le degré d’autonomie.
Faut-il parler de salaire dans les offres d’emploi ?
Oui, pour Cristina Tolentino, responsable des ressources humaines pour la fncuma. Elle indique : « Dans un marché du travail assez fluide tel qu’il l’est en ce moment, les candidats sont plutôt en position de force. C’est à l’employeur d’être attractif, de mettre en avant ses atouts. »
« Je conseille donc d’être le plus transparent possible sur la rémunération et ce, dès l’offre d’emploi. On voit encore beaucoup d’offres avec la mention ‘Rémunération selon expérience’. L’absence de chiffre précis fait que les candidats ne se positionnent pas. C’est aussi un gain de temps, à la fois du côté du candidat, qui sait à quoi s’en tenir, et de l’employeur, qui ne recevra que des candidatures qui correspondent au salaire proposé.
Où poster son offre d’emploi ?
Selon le programme européen Cowform, l’embauche de salarié est trop peu fréquente du fait de la difficulté à trouver le ‘bon candidat’. Première étape : faire connaître le plus largement possible que l’on cherche un salarié : dans son entourage bien sûr (famille, voisins, élus locaux, petites annonces dans les commerces locaux…) mais aussi via les professionnels auprès desquels se tournent les demandeurs d’emploi (voir encadré).
Mais, quand les employeurs cherchent leur futur salarié par bouche-à-oreille ou petites annonces, les salariés consultent Pôle emploi et les réseaux sociaux. Alors, où poster son annonce, et où chercher des candidats pour trouver la perle rare ?
Quand vous souhaitez recruter un employé agricole, sachez qu’il existe de nombreux organismes et sites pour poster votre annonce. Cela permet également de faire connaître votre besoin de main-d’œuvre. Voici les principaux partenaires de l’emploi agricole :
- les cuma locales et la fdcuma
- l’Apecita
- les Chambres d’agriculture
- l’Anefa
- Pôle emploi
- la presse agricole
- les sites Internet spécialisés (jobagri.com, lagriculture-recrute.org, agriaffaires.com, indeed.com, Le bon coin)
- Sans oublier les réseaux sociaux : Facebook, LinkedIn (réseau professionnel) ou Instagram (pour une cible de jeunes salariés)
Étape 4 . Chercher des « personnalités » plutôt que des candidats
Les résultats du programme franco-belge (et européen) CowForme indiquent également que la méconnaissance des métiers agricoles et leur prétendu manque d’attractivité seraient pour beaucoup dans la difficulté à « trouver le bon candidat ».
Dès lors, rien de tel que le test grandeur nature. Ainsi, pour « rapprocher demandeurs d’emploi et éleveurs/futurs employeurs », il est nécessaire d’agir au niveau de la formation en développant l’alternance et les stages en fermes, avec une « période de découverte professionnelle » en amont pour tester sa motivation et conforter ou non le binôme employeur/salarié.
Les éleveurs belges l’ont bien compris en cherchant d’abord des personnalités (« soigneux envers le matériel », « attentifs aux animaux », « respectueux des horaires ») plutôt que des futurs salariés déjà formés techniquement. La formation spécifique intervient dans un second temps, auprès des personnes intéressées et motivées.
Étape 5 . Recruter un employé agricole : et pourquoi pas un stage ou un apprenti?
Accueillir un stagiaire dans son entreprise?
Cela peut être un bon moyen de valoriser son image auprès des jeunes comme des moins jeunes. Le stage en entreprise ne se résume pas qu’au stage d’observation en milieu professionnel ! Moins connu, le stage peut être effectué pendant les vacances scolaires par tout jeune dès la classe de 4e jusqu’en classe de terminale. Il peut aussi être fait par les étudiants de l’enseignement supérieur. Ces périodes d’observation en entreprise d’une durée maximale d’une semaine sont possibles grâce à l’appui apporté par les chambres d’agriculture.
Si la signature d’une convention n’est pas obligatoire dans ce cadre, Yasmina Azmy, chargée de mission orientation professionnelle – formation – métiers, à la chambre régionale d’agriculture Occitanie, la recommande vivement : « La convention de stage constitue le document indispensable permettant de définir le cadre et la nature des activités que le stagiaire sera amené à réaliser pendant son stage et, par conséquent, de clarifier les responsabilités respectives de l’entreprise d’accueil et du stagiaire. Sans ce document, des litiges pourraient survenir en cas d’accident. » Une convention type spécifique à ces stages a été établie en partenariat entre le ministère du Travail, le ministère de l’Education nationale, les représentants des chambres consulaires et les représentants des assureurs, et est disponible en libre accès sur Internt.
Certaines formations, diplômantes ou non, prévoient également une période de stage en entreprise. Les exploitants souhaitant accueillir des stagiaires peuvent se faire connaître auprès de leur chambre d’agriculture et inscrire leurs offres de stage sur des sites internet dédiés comme par exemple www.stage-agricole.com.
L’apprentissage, pour transmettre son savoir-faire
Pour les employeurs, l’apprentissage est le moyen de transmettre sa passion et son métier à un jeune, de l’accompagner dans son projet professionnel. Il permet également de préparer l’avenir de son entreprise en formant son futur salarié ou associé potentiel. Les apprentis sont ainsi un vivier de futurs salariés. À court terme, l’employeur peut bénéficier de conditions avantageuses pour embaucher un apprenti. À plus long terme, l’agriculteur forme celui ou celle qui sera directement opérationnel dans son entreprise.
Pour plus d’informations, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :