Les trois associés du Gaec Cap’Avenir, qui travaillent beaucoup sur leur qualité de vie d’éleveurs, ont expliqué leur méthode lors d’une journée « Trucs & astuces en élevage » organisée par le GIE occitanien Travail en élevage en avril.
Claire Saby, du groupement GIE Elevage en Occitanie, a remis la journée dans son contexte. « La question du travail reste délicate pour les conseillers et les éleveurs », a-t-elle rappelé.
« L’objectif de cette réunion, et des autres organisées dans son sillage, est d’identifier des solutions via le témoignages d’éleveurs. Puis évaluer si elles sont réplicables, s’interroger et surtout créer du lien entre les éleveurs pour parler de ces sujets. »
Mission accomplie ce jour-là puisque une douzaine d’éleveurs avaient fait le déplacement à Moyrazès. Ils ont écouté les témoignages de Gilles et Marie-Claire Aussibal, de Frédéric et Guilaine Carrière et de leur salariée Virginie.
Des choix raisonnés pour la qualité de vie
Tout a commencé par un incendie, qui a poussé les deux couples à réfléchir à la création d’un Gaec en commun, sur deux sites distants de quelques kilomètres.
Non sans pression, puisque la future exploitation devait, dès le départ, permettre de générer 5 salaires (4 associés + une salariée), « sans montée en puissance, mais directement », a souligné Frédéric Carrière.
Les futurs associés visitent de gros élevages de chèvres en Vendée et dans les Charentes. Ce qui leur confirment la faisabilité du projet mais aussi leur permettent de réfléchir à adapter certains équipements à leur territoire et leur climat. Le constat est clair: ils rayent de la liste l’hypothèse de la transformation, pour conserver leur spécialité: la production de lait de chèvre.
« Nous voulions rester centrés sur notre métier, mais profiter de cette opportunité pour réfléchir à retravailler l’organisation de notre rythme de travail, » a souligné Frédéric Carrière. En bref, la qualité de vie.
La qualité de vie au cœur du projet
Les deux exploitations avaient déjà de bonnes bases: « Les bâtiments existants restaient fonctionnels, et nous travaillions déjà avec 8 cuma: nos cuma locales et des groupes plus spécialisés, » a expliqué Gilles Aussibal. « Nous avons souhaité conserver nos engagements respectifs », notamment à la cuma de désilage, qui assure avec des salariés la tournée de distribution d’aliments.
Le petit collectif de travail se répartit les missions, en essayant de conserver un équilibre: pas trop de déplacements entre les sites, mais sortir aussi de chez soi pour « voir du monde », pas plus de 7 traites par semaine et par personne, et pas plus de trois d’affilée; et essayer de concentrer certaines tâches le matin pour libérer les parents de jeunes enfants au plus tôt…
Amortir sur 1000 animaux permet aux associés d’améliorer sensiblement leurs conditions de travail: ils investissent dès le départ dans l’aménagement de bâtiments en couloir, pour pouvoir faire des lots d’animaux et s’adapter si besoin à une éventuellement modification du système alimentaire.
Ils font construire une aire d’attente sur caillebotis, investissent dans de bons cornadis et des dispositifs d’automatisation (comme un robot de distribution des concentrés, ou une petite automotrice de paillage) ou encore une « golfette » électrique, silencieuse, qui s’avère bien utile lors des mises bas.
Elle permet de pulvériser les larvicides avec un petit pulvérisateur attelé. « On va trois fois plus vite, et on ne porte pas de poids », a souligné Guilaine Carrière.
Des mises bas bien pensées
Le pic des travail des mises bas a été bien écrêté, même si la période reste chargée, soulignent les associés. Virginie (salariée du Gaec), résume:
« Je suis moins fatiguée aujourd’hui avec 1000 chèvres qu’avec deux fois 300 auparavant. »
Leur équipement leur permet, en trois minutes, de peser, désinfecter le cordon, administrer un repas de colostrum à un lot d’agneaux nouveaux-nés. « Cela représente 10% de leur poids, ils sont calés pour 24h et sur l’immunité, on voit le bénéfice », soulignent-ils. « Ces modifications-là nous ont bien changé la vie. L’objectif maintenant, c’est de développer des lactations longues pour faire de petits lots de mises bas de 350 à 400 chèvres. »
Première mise à l’épreuve du système construit par les associés du Gaec Cap’Avenir: le départ en retraite de l’une d’entre eux, Marie-Claire Aussibal.
Test réussi, comme le décrit son mari, Gilles Aussibal. « Nous faisons travailler un auto-entrepreneur un jour par semaine et un week-end sur deux. Virginie fait quelques heures supplémentaires, Frédéric travaille davantage avec les chevrettes et Guilaine fait un peu plus de traite. »
À la recherche d’un(e) associé(e)
Pour l’heure, les associés sont encore en capacité d’assumer l’absence de l’un ou de l’autre en cas de pépin. Ils s’interrogent par contre sur le prochain départ en retraite de Gilles. « Nous avons entamé une recherche d’associés qui n’a pas encore abouti ».
Principale difficulté soulignée à la fois par les participants à la journée et les associés: intégrer un collectif déjà constitué qui fonctionne sur des valeurs communes. Autrement dit: une technicité élevée dans la production de lait de chèvre, la volonté de rationaliser le temps et les conditions de travail, une appréciation forte du travail en équipe.
Les participants à la journée, éleveurs, étudiants et conseillers agricoles ont planché sur le sujet. Ils ont fait ressortir quelques pistes intéressantes. Comme la délégation de certaines tâches aux salariés de cuma, comme la partie administrative actuellement assumée Gilles Aussibal. Ou encore faire exprimer au collectif les valeurs implicites sur lesquelles il repose.
Le Gaec est donc toujours à la recherche d’un ou de plusieurs associés. « Nous savons qu’il est souvent motivant de monter son propre projet. Nous ne sommes fermés à rien », soulignait Frédéric Carrière. « Dans notre idée, nous cherchons juste quelqu’un de passionné par l’élevage. »
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