Les contrôles des exploitations sont parfois très mal vécus par les agriculteurs. Ils se sentent accablés par des normes qui s’accumulent dans plusieurs registres : PAC, contrôle sanitaire, droit du travail… Ces opérations de contrôles se déroulent parfois selon des procédures accusatoires et intrusives. » Cela peut être une source de mal-être pour les agriculteurs », regrettent Anne-Laure Blin et Éric Martineau, les deux députés auteurs d’un rapport sur le sujet. Ils proposent lors des contrôles des exploitations, l’accompagnement systématique d’un tiers. Ce qui contribuerait à atténuer la pression sur les agriculteurs. D’après les chiffres relatés dans ce rapport, chaque année près de 20 000 contrôles sont effectués en matière d’aides PAC. Sur ce registre, le code rural prévoit un taux de contrôle minimum annuel d’au moins 5 % des demandes d’aide.
Instabilité et inflation normative
Les rapporteurs demandent de mettre fin à l’instabilité et à l’inflation normative. Ce normatif créé en effet « un véritable sentiment d’insécurité pour les exploitants, qui va de pair avec l’alourdissement considérable d’obligations et de contraintes déclaratives », selon les rapporteurs. Alors que les gouvernements ont régulièrement fait de la simplification administrative leur cheval de bataille, on est encore très loin du compte en agriculture.
Parallèlement, la dématérialisation des procédures et une certaine automatisation des contrôles administratifs, sèment le trouble. De plus en plus de supports électroniques sont utilisés. Or, beaucoup d’agriculteurs ne maîtrisent pas cette technicité croissante des procédures. De surcroît, ces contrôles sont parfois inopinés ou s’effectuent sur dénonciation. Une judiciarisation qui inquiète la députée, principalement lorsqu’il s’agit de droit de l’environnement. Dans certaines circonstances, l’arsenal pénal s’applique dans toute sa rigueur. Par exemple avec des auditions en gendarmerie, des prises d’empreintes, etc.
Contrôles des exploitations et droit à l’erreur
Les députés suggèrent de renforcer le droit à l’erreur au bénéfice des agriculteurs, dont une grande majorité sont de bonne foi.
« Lors de nos auditions et visites de terrain, les agriculteurs nous ont confié leurs difficultés engendrées par les contrôles administratifs souvent sans concession pour les pratiques agricoles. Ils pointent une méconnaissance du milieu rural, l’absence de pédagogie, de rapports humains et de compréhension. » On craint l’avènement d’une technocratie triomphante.
Même si le principe du contrôle est parfaitement légitime dès l’instant où il est question d’argent public, de préservation de l’environnement ou de qualité d’alimentation. Ces contrôles sont toutefois sources de complexité car ils renvoient à de multiples textes issus de plusieurs administrations.
De multiples administrations…
De multiples administration peuvent déclencher en effet des contrôles :
- Mutualité sociale agricole (MSA) : déclaration et recouvrement des cotisations.
- Inspection du travail, lutte contre le travail illégal et dissimulé.
- Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI).
- Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
- Agence des services de paiement (ASP) pour le contrôle des aides relatives PAC et le contrôle des BCAE.
- FranceAgriMer pour les aides des OCM « Viticulture » et « Fruits et légumes ».
- Les DDTM/DDPP et les directions régionales de l’environnement ou l’Office français de la biodiversité (OFB) pour la police de l’eau ; la protection des espèces et des habitats ; les installations classées ICPE pour les élevages.
… et de multiples justificatifs pour les contrôles des exploitations
En filigrane, les exploitants sont tenus de présenter moult pièces justificatives mentionnent Anne-Laure Blin et Éric Martineau : « des cartes d’identification des animaux, des documents relatifs au système électrique de l’installation pour les ICPE ; le suivi sanitaire de l’élevage pour les contrôles sur la pharmacie vétérinaire ; le plan de fumure pour le contrôle de la « directive Nitrates » ou encore le cahier d’épandage du lisier.
Pour les contrôles portant sur des aspects plus administratifs, les pièces exigibles peuvent comprendre également les livres comptables, les registres, des notes, des pièces justificatives diverses. Sans oublier, la correspondance relative à l’activité professionnelle ou encore les contrats de travail et le document unique d’évaluation des risques professionnels dans le cadre des contrôles de l’Inspection du travail… » N’en jetez plus !
Des injonctions contradictoires
Il est reproché aussi un zèle excessif de la part de certains contrôleurs. Alors que la majorité des erreurs sont le plus souvent la conséquence de négligences. Ou bien de méconnaissance des obligations administratives. D’ailleurs, certaines normes peuvent être contradictoires. Exemple détaillé dans le rapport parlementaire : « « L’arrêté abeille » du 20 novembre 2021. En l’occurrence, l’incertitude porte sur l’usage du glyphosate destiné aux labours d’automne afin de traiter une culture de printemps, au regard des circonstances météorologiques et de l’état de la fleuraison. Ainsi que le rapportent plusieurs organisations professionnelles agricoles, certaines DDT, à l’instar de celle de la Somme, admettent le procédé tandis que d’autres le rejettent au nom de la protection des abeilles. »
L’adage suggérant que « Nul n’est censé ignorer la loi » devient manifestement hors propos. Surtout pour une frange d’exploitants agricoles de plus en plus éloignés de l’évolution règlementaire et de la compréhension des multiples lois qui pèsent sur le fonctionnement des exploitations, dont la première vocation reste de produire de biens alimentaires.
Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :