Conserver l’humidité des sols
Sensible à la question de l’eau, le groupe de cumistes s’est alors équipé de différents matériels pour tenter de rendre leurs activités plus durables vis-à-vis de cette contrainte. À l’image du semoir en semis direct qu’ils ont acheté à une dizaine d’agriculteurs. La principale utilisation de cet outil est lors des semis de couverts végétaux. Avec ce semoir, l’idée est de pouvoir semer des mélanges de plusieurs espèces différentes et très rapidement après la récolte.
« Le semoir que nous avons acheté en 2020 possède trois trémies qui nous permettent de réaliser des mélanges de différentes granulométries, explique le président de la cuma, qui s’est lui aussi engagé dans l’achat du semoir Maschio Gaspardo. En un seul passage, le mélange est semé, la levée est aussi plus homogène. » Après deux années complètement différentes en matière de météorologie, les agriculteurs ont tout de même remarqué que les plantes étaient mieux développées. Le but étant de retenir davantage l’eau qui tombe l’hiver.
Travailler le sol pour préserver la ressource en eau
« Avec les couverts, il n’y a pas de croûte de battance qui peut se créer, estime l’agriculteur. L’eau s’infiltre davantage dans le sol et a un effet tampon entre un sol trop sec ou trop humide, mais aussi en matière de température du sol. » C’est sans compter les effets de la matière organique sur le sol avec une vie microbienne plus stimulée et une captation de l’azote. Une économie d’azote a déjà été remarquée. Un investissement de plus de 100 000 €, mais qui satisfait les agriculteurs.
Par ailleurs, les agriculteurs ont également investi dans d’autres outils pour s’adapter au contexte pédoclimatique de leur zone. La même année, en 2020, ils ont investi dans une herse étrille Treffler à 32 000 €. « Nous avons parfois beaucoup de difficultés à désherber nos cultures, avoue Thierry Lheureux.
Nous avons décidé d’acheter cet outil de 12 m de large pour tenter de répondre à la problématique de résistance aux vulpins. Car nous nous situons dans une zone périurbaine, nous avons à cœur de réduire nos indices de fréquence de traitement. » Mais c’est aussi pour gérer au mieux l’eau disponible avec le travail superficiel du sol par exemple. « On bouge la terre, on peut détruire la croûte de battance et ainsi améliorer la minéralisation du sol ou faire lever plus facilement le lin ou autres cultures de printemps », illustre le président de la cuma.
Large panel d’équipements
Toutefois, rien ne vaut le passage d’une bineuse. L’adage « un binage vaut deux arrosages », est bien vérifié dans ce secteur. Ce n’est d’ailleurs pas nouveau. Il y a sept ans la cuma a acheté une bineuse équipée de caméras. Une deuxième bineuse est venue compléter la gamme en 2020. « L’idée était aussi de moderniser le désherbage sans avoir de problèmes pour recruter de la main-d’œuvre, explique Thierry Lheureux. Nous avons équipées les bineuses de moulinets pour que les passages soient plus efficaces dans les rangs. » Forcément, les agriculteurs du groupe ont dû revoir là aussi leurs habitudes pour préserver la ressource en eau : passer très tôt dans la parcelle, voire modifier la largeur de l’inter-rangs sans modifier la densité de semis. En 2022, plus de 200 ha ont été désherbés ainsi.
Irriguer davantage…
Dans cette zone à proximité de la mer, la sécheresse inquiète, mais les agriculteurs restent optimistes. « De l’eau, nous en aurons toujours », estime Thierry Lheureux. Situées à proximité des wateringues, les parcelles peuvent être facilement irriguées. Et l’écoulement de l’eau dans les Hauts-de-France est organisé de manière à ce que tout aille vers la bordure maritime.
Cependant, force est de constater que l’irrigation est devenue obligatoire pour certaines productions, malgré les efforts que fournit le groupe de cumistes pour préserver la ressource en eau. La pomme de terre notamment, avec une vigilance à avoir sur les derniers passages près de la récolte. « Si on n’irrigue pas, nous n’avons rien, alerte-t-il. Mais si nous irriguons avant des pluies non prévues, notre sol peut vite saturer. Il devient damé et c’est impossible d’y mettre les pieds. »
… a un coût
Pour irriguer, si l’eau des wateringues est gratuite, les pompes et d’utilisation des enrouleurs représentent un coût, sans compter la main-d’œuvre. Avec le matériel en cuma, à deux adhérents, il faut compter 10,5 €/ha pour l’usage de la motopompe, avec une consommation de GNR à 18 l/ha. Pour l’enrouleur, le coût est de 16 €/h avec un apport de 25 mm.
« En 2022, nous avons irrigué beaucoup plus que d’habitude, reconnaît l’agriculteur. Nous avons dû nous adapter aux restrictions d’usages selon les horaires. » Cette mesure risque d’ailleurs d’évoluer vers des restrictions volumétriques pour préserver la ressource en eau.
(1) Une wateringue, watringue, ou un watergang est un fossé ou un ouvrage de drainage à vocation de dessèchement de bas-marais, de zones humides ou inondables situées en plaines maritimes sous le niveau des hautes mers.
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