Qui est Adriano Farano? Serial entrepreneur, ce Napolitain voyageur a récemment quitté, avec sa famille franco-italienne, la Silicon Valley et sa Coccinelle décapotable, inventé un Emoji à succès, ouvert une boulangerie naturelle à Paris (Pane Vivo) et publié deux livres sur le pain.
Dans son premier ouvrage, cet ancien journaliste dégomme avec précision la filière blé des boulangeries « tradition française », pour mieux revenir aux céréales anciennes et au levain. Dans le second, il fait l’éloge du pain rassis et sert à ses lecteurs 10 recettes pour le préparer. Rencontre avec un outsider de l’alimentation.
Adriano Farano: sa proposition aux agriculteurs
« J’aurais un rêve, c’est que le blé dur de variété ancienne puisse retrouver la place qui était la sienne avant les années 1960. J’en parle dans le livre avec la variété Poulard, une variété qui devrait retrouver une place prépondérante en France. »
Aujourd’hui, elle n’est présente que sur une centaine d’hectares en France, selon la chercheuse Marie-Hélène Robin, de l’Inrae. On espère que les agriculteurs vont retrouver ça: c’est bon pour les pâtes, mais ça peut être bon aussi pour le pain.
Dès lors que vous avez du levain, les variétés anciennes de blé dur font une farine que l’on peut utiliser pour le pain.
« Aujourd’hui, nous faisons venir l’essentiel de notre farine de Sicile, mais on le fait parce qu’on doit le faire. Parmi toutes les farines qu’on a essayées, les chercheurs m’ont dit que si vraiment, ce que je veux faire, c’est un pain qui ait un impact sur la santé humaine et sur l’environnement, mieux vaut aller la chercher en Sicile, là où le Russello pousse sans engrais ni irrigation artificielle.
Les blés anciens qu’on retrouve en Ile-de-France et en France, ce sont des blés tendres, qui n’ont pas les mêmes propriétés que les blés durs. »
Un travail collectif sur le blé
« Pour les agriculteurs, il y a évidemment l’aspect économique, c’est un parcours qui prend du temps. Mais vous pouvez facilement quintupler les prix en bio avec des variétés anciennes, voire plus. Et après, vous allez être en paix avec vous-même. Vous aurez démarré une nouvelle dynamique.
En fait, c’est le rôle de toute la filière, en commençant par les agronomes, les semenciers, les agriculteurs, les meuniers.
Chez Pane Vivo, on réalise un travail collectif. Ce n’est pas moi qui ai fait le semis. Je n’ai pas inventé la variété Russello, c’est le fruit de millénaires d’évolution génétique. C’est un travail de l’humain avec la nature.
Mais il faut l’expliquer, le reconnaître, le valoriser, cela passe aussi par le prix. Le prix de Pane Vivo, ce n’est pas anodin, c’est 14,50€ le kilo. Et nous, on est fiers de ce prix. Pas plus qu’une bonne bouteille de vin, pas plus qu’un bon fromage, il n’y a pas moins de travail derrière. Et du coup, le paysan, il faut qu’il soit rémunéré à juste prix. Nos farines, on les paie bien. »
Entretien complet à retrouver dans l’édition de septembre 2021 d’Entraid
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