Le 7 octobre, la FnSafer, les chambres d’agriculture, la Fnsea et les JA ont formulé plusieurs revendications en matière de règlementation foncière, dans la perspective très attendue d’une prochaine loi. Les quatre organisations s’appuient d’abord sur la réalité inquiétante des chiffres pour justifier un changement de paradigme foncier :
- Le taux de remplacement des départs de chefs d’exploitation se dégrade à seulement 71%, or l’accès au foncier est au cœur des conditions nécessaires à l’installation.
- 12,6% des exploitations en grandes cultures pratiquent la délégation intégrale des travaux de culture, une démarche qui freine la libération de foncier disponible.
- 6,9% du nombre des transactions foncières et 17,6% de la valeur des ventes correspondent à des transactions sociétaires, sachant que 36 % des ventes de parts de société se font en dehors du cadre familial.
Dans le contexte actuel, les maux qui menacent l’agriculture à caractère familial sont précisément le développement de l’accès au foncier à travers le marché sociétaire utilisé pour s’affranchir des règles, mais aussi la concentration du foncier, les risques de spéculation sans oublier le mouvement continu d’artificialisation des terres.
Renforcer le contrôle des structures
Fnsea/JA/Apca/FnSafer veulent favoriser davantage de transparence et de régulation en durcissant les mécanismes actuels:
- compléter les cas soumis à autorisation (au-dessus du seuil de déclenchement des structures), par exemple lors des prises de participation dans une exploitation agricole par une personne déjà exploitante dans une autre structure; lorsqu’une prise de participation conduit à prendre plus de 25% du capital d’une société; si l’installation ou l’agrandissement concerne une personne qui a atteint l’âge requis en matière de retraite à taux plein; lors de cessions d’exploitations dans le cadre de liquidation judiciaire d’exploitations agricoles
- étendre le refus d’autorisation d’exploiter, y compris lorsqu’il n’y a pas de candidats concurrent
- élargir le système de déclaration à toute opération non soumise à autorisation d’exploiter
- alourdir les sanctions pour éviter les détournements.
Préserver le foncier
Le deuxième volet des propositions des quatre organisations agricoles concerne les moyens de contrer la perte de vocation agricole du foncier, évaluée à 44 500 ha/an. Cette reconversion sert à l’habitat individuel (47%), aux infrastructures de transport (24%), ou aux zones commerciales et économiques (14%). Pour stopper cette tendance lourde dommageable à la transmission des fermes, la profession agricole demande que les collectivités disposent d’outils efficaces pour faciliter la reconquête des bâtiments vacants, friches industrielles et autres « dents creuses ». Les cosignataires plaident pour davantage de densification urbaine, de verticalisation de l’espace bâti et de mutualisation des surfaces tels que les parkings. Leur demande est de restreindre davantage la consommation d’espace agricoles formalisée dans les documents d’urbanisme (SCoT, PLUs/PLUi, carte communale). Les organisations agricoles réclament enfin l’amélioration du dispositif de compensation agricole collective, instauré depuis 2014.
Garder des prix raisonnables
Ces propositions peuvent contribuer à freiner les appétits fonciers insatiables de quelques-uns, qui concourent aux renchérissement du prix des terres. Actuellement, ceux-ci sont nettement plus bas en France qu’ailleurs en Europe. Or, un prix du foncier maîtrisé est tout à la fois favorable à l’installation et à la compétitivité de l’agriculture française sur les marchés extérieurs. En parallèle, le retour espéré à de meilleurs prix de vente des produits agricoles est essentiel. En effet, à défaut de rentabilité suffisante, les agriculteurs misent souvent sur l’agrandissement pour conforter la rentabilité de leurs exploitations. Enfin, de nouvelles dispositions politiques en discussion dans la prochaine PAC, telles que la modulation ou le plafonnement des aides surfaciques par agriculteur actif, sont aussi un levier pour ralentir la course inexorable aux hectares.
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