La crise du soja a laissé des traces. Des groupes d’éleveurs réfléchissent à produire des protéines localement dans les filières « tracées », type bio, label ou circuits courts, où les cours peuvent atteindre des sommets. En Vendée et dans le Gers, la solution du toaster mobile a été retenue par les cuma départementales pour éliminer les tanins et facteurs anti-trypsiques qui affectent la digestibilité des protéagineux, soja, lupin et féverole en tête. La dimension départementale devrait permettre de « servir » tous les éleveurs intéressés et d’amortir ces gros investissements (125000€ pour la Vendée et 85 000€ pour le Gers) plus facilement. Le Gers a par ailleurs ouvert l’adhésion aux éleveurs des Landes, Pyrénées-Atlantiques et Hautes-Pyrénées.
Grille-pain
La machine porte bien son nom : il s’agit d’un grille-pain géant. Les graines sont amenées via une vis sans fin sur un tapis convoyeur perforé, qui transite dans un compartiment au sein duquel l’air est chauffé à 280°C par un brûleur à gaz ou fuel. Elles ressortent quelques minutes plus tard, et se conservent de 3 à 6 mois en fonction de l’espèce et de la teneur en matière grasse. Avantages du traitement thermique, par rapport à la technique de l’extrusion majoritairement utilisée : sa sobriété énergétique (débit de 1,5t pour 40l de fuel/h contre 300 kg/h avec 300cv pour l’extrusion), et la possibilité de faire voyager la machine. Le Vendéen Hervé propose un toaster Mecmar (Italie), monté sur une remorque agricole. L’inconvénient : les graines produites, contrairement à celles traitées par extrusion, ne sont pas déshuilées.
« La graine de soja toastée ne peut pas être utilisée toute seule, il faut adapter la ration, avertissent Philipe Olivier et Richard Poeres, de la Secopalm. Et l’associer à d’autres matières, puisqu’elle ne fera qu’entre 38 et 40% de protéines contre 45-46% pour un tourteau extrudé. Cette graine fait aussi des rations très riches en matière grasse, ça peut être limitant sur certaines productions. » Malgré ces réserves, les essais qui ont débuté –sur vaches laitières, canards et poulets label- et les résultats sont prometteurs, comme l’indique le résumé ci-dessous.
Production | Action | Résultat |
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44 Prim’Holstein en lactation (essai de courte durée sur petit effectif) | Substitution de 1,3kg/jour de lupin cru par du lupin toasté | • +3,1l de lait/vache/jour • TB : +4,1pt • TP : -1,4pt |
20 Montbéliardes (essai de courte durée sur petit effectif) | Substitution de 1-3kg de féverole par l’équivalent toasté | • + 1,65l/vache/jour ; + 3,2l/vache/jour entre 100 et 200j de lactation • Légère chute des TB et TP • Chute du coût de la ration : -12,30€/1000l |
Canard PAG (essai en cours en exploitation jusqu’à la découpe) | Substitution partielle du tourteau de soja par des graines toastées | • GMQ supérieur (120g/jour contre 90 à 6 sem., 55g/jour contre 40 à 9 sem.) • Poids supérieur à 9 sem. (4,4kg contre 4,1kg) |
Volaille label (essais en cours | Substitution partielle du tourteau de soja par des graines toastées | • Lot1 : 365g contre 335g à 3 sem. • Lot2 : rattrapage du poids théorique en 15j pour un lot parti à 800g à 6 semaines (contre 1160g. normalement) |
Logistique
Les coûts de revient estimés sont attractifs pour ces filières : entre 30 et 50€/t, à moduler en fonction des équipements (système de refroidissement en plus sur la machine vendéenne) et des valeurs alimentaires produites. « Le potentiel de la machine est énorme. Il faut simplement trouver l’organisation qui va avec », précise Eric Figureau, animateur machinisme à la fdcuma du Gers. Vendéens comme Gersois envisagent de faire voyager la machine par secteur, à intervalle trimestriel et avec des responsables en charge de garantir, notamment, le bon réglage de la machine.
Témoignage vidéo de Philippe Pérès, éleveur de canards dans le Gers: