Pétitions, manifestations, recours en justice: régulièrement, des projets de porcherie, d’ateliers pour volailles ou d’unités de méthanisation suscitent de vives contestations qui peuvent envenimer les relations de voisinage, peser au plan personnel et familial, et retarder, parfois de plusieurs années, leur réalisation.
« Il faut informer dès les premières réflexions sur un projet et partager ensuite l’évolution du projet », considère Constant Delatte, de l’agence Quelia, spécialisée dans la concertation autour des projets d’énergie renouvelable.
« Il y a dans la société un besoin de mise en confiance concernant le cadre de vie (…) Parallèlement, on est dans de nouveaux métiers parmi les agriculteurs. D’où l’importance de rassurer », poursuit-il. « Il faut expliquer les paramètres du projet, écouter les attentes des parties prenantes et les prendre en compte, être joignable facilement » pour répondre aux interrogations. « Il faut asseoir rapidement les conditions d’une première appropriation du projet » par la communauté, préconise M. Delatte.
Consciente des enjeux, l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) a publié au printemps un « guide de bonnes pratiques » de plus d’une trentaine de pages à l’attention des agriculteurs porteurs de projets.
De même, France Nature Environnement (FNE), une fédération d’associations pour laquelle le biogaz issu de la méthanisation est « un atout pour la transition énergétique », a mis au point il y a deux ans, avec le soutien de l’Ademe et de GRDF (Gaz réseau distribution France), son « Méthascope », téléchargeable sur son site. « C’est un outil complet pour s’approprier les enjeux de la méthanisation dans son territoire », assure la fédération.
Dialoguer avec tous les habitants
Le « méthascope » permet à la fois « d’approfondir sa connaissance des enjeux liés à la méthanisation, de faciliter le dialogue avec les acteurs territoriaux et de se positionner par rapport à un projet précis de méthanisation dans son territoire », résume Xavier Métay, coordonnateur. « Cela permet surtout de mieux se comprendre et ça aide les citoyens, souvent peu formés sur ces questions, à gagner en compétences », complète M. Métay.
GRDF a également travaillé avec deux sociologues sur « l’appropriation locale des sites de méthanisation », réalisant plus de 330 entretiens sur 10 sites différents en France. « Les gens accordent beaucoup d’importance à la visibilité du site, à la façon dont il s’intègre dans le cadre de vie. Ils s’interrogent sur le risque de dépréciation de leurs biens », expose Anne Lafferrerie, chargée de développement biométhane à GRDF.
« La plus grande erreur, considère Constant Delatte, est de tarder à communiquer. Il faut le faire en amont, très tôt (…) Il faut aussi éviter de communiquer seulement avec une partie des personnes concernées, les élus par exemple, en oubliant les habitants, les commerçants, les associations. Et il ne faut surtout pas s’isoler mais mettre en place peu à peu une +stratégie des alliés+ », en gagnant progressivement à sa cause les parties impliquées.
D’un manière générale, résume le fondateur de Quelia, « il est nécessaire que le porteur de projet -agriculteur, investisseur ou collectivités- ne laisse pas s’installer une diffusion de l’information par le bouche à oreille. Il faut qu’il prenne en main lui-même, dès le début, l’information sur son projet, plutôt que de la subir, qu’il anticipe, plutôt que de retrouver en posture défensive ».